Photo : Riad Entretien réalisé par Badiaa Amarni LA TRIBUNE : Aujourd'hui, la notion Média Salon s'impose de plus en plus à travers le monde. Pourriez-vous nous éclairer là-dessus et nous dire quel est son rôle ? Kamel Khelifa : Le rôle du salon, comme vecteur de communication, ne fait plus de doute et son engouement à travers la planète explique le nombre impressionnant des manifestations organisées. Comme média, et au même titre que la télévision, la radio, les journaux, etc., il crée l'événement mais de façon pleine et entière pendant quelques jours. Il se prépare longtemps à l'avance, comme on se livre aux préparatifs d'une fête. On remarquera que les salons réussis drainent beaucoup de monde. Mais, il faut faire la distinction, dans l'événementiel, entre le salon, généralement professionnel ou spécialisé, et la foire, qui peut être un fourre-tout du genre Foire internationale d'Alger ou certaines braderies organisées dans des villes ou des villages par les communes, ou encore spécialisée (par exemple : la Foire de l'agriculture en France). Il est certain que l'organisation de ces manifestations constitue un investissement dont les retombées économiques sont assurées quand l'événement est bien préparé, car, aujourd'hui, on ne doit plus dire combien coûte un salon, mais plutôt combien il rapporte. Qu'en est-il, justement, du retour sur investissement après l'organisation d'un salon ou d'une exposition ? Le retour sur investissement (ROI), qu'on appelle aussi remontée salon, est un objectif à atteindre (comme dans n'importe quel investissement), mesurable par comparaison entre les coûts de la manifestation et les prévisions projetées, en termes de taux de fréquentation et de commandes immédiates. Les commandes immédiates sont chiffrées sur-le-champ, mais les commandes potentielles demandent un temps plus ou moins long, raison pour laquelle on fait intervenir les techniques de communication intégrée ou Mix Marketing (promotion des ventes, force de ventes, relations publiques, lobbying, etc.), pour booster les ventes... Vous avez aussi évoqué l'assurance en disant que les organisateurs et les exposants prenant part aux expositions ne se soucient pas de cet aspect. Peut-on avoir plus de détails ? Il est observé que rares sont les organisateurs et même les exposants qui assurent les produits exposés. En cas de sinistres (incendie, casse, vol, etc.), organisateurs et exposants se retrouvent aux prises, parce que les termes du contrat (qui doit comprendre une clause relative à l'assurance) n'ont pas été lus ou ont été mal interprétés. Je ne parle pas de l'assurance Cagex, prévue dans le cadre des foires et des expositions, que les habitués des manifestations internationales connaissent désormais, vu le travail de communication dynamique engagé par cet organisme. Vous avez aussi fait allusion à la nécessité de normaliser les salons qui pullulent en Algérie ... La normalisation des manifestations économiques et surtout la moralisation s'imposent, car c'est devenu un vrai maquis. Beaucoup de gens s'improvisent organisateurs d'événements, empochent des avances et, parfois, se retrouvent en train de rembourser quand ils n'ont pas purement et simplement disparu. D'autres vont plus loin en s'emparant carrément du concept d'autrui pour le reproduire ailleurs dans d'autres régions, quand ils ne l'organisent pas dans le même lieu, parfois avec la bénédiction, pour ne pas dire la complicité des loueurs de sites qui leur proposent même des partenariats, quand ils veulent «couler» un organisateur qui n'a pas l'échine souple. Tout ce que j'avance là est vérifiable preuve à l'appui. Il existe même une black list d'organisateurs et de sous-traitants de matériels «interdits» d'exposition dans certains palais des expositions... La normalisation suppose des cahiers des charges assortis de conditions affichées. En dehors d'un texte régissant les braderies, pris il y a deux ans par le ministère du Commerce, il n'existe aucune règle, loi ou règlementation pour s'ériger en «créateur» d'événements, ce qui explique le nombre incontrôlé d'organisateurs. Cela dit, il y a des professionnels qui se distinguent parfaitement dans ce rôle, mais ils n'arrivent pas à s'entendre pour se constituer en association, ou, à tout le moins, en conseil, ne serait-ce que pour veiller à l'éthique de la profession. Quelle est, aujourd'hui, la réalité de l'exportation hors hydrocarbures et quelles sont les erreurs à ne pas commettre dans cette action très sensible ? Les exportations hors hydrocarbures sont confrontées à une véritable panne d'imagination, d'encadrement technique, de communication et d'image du pays, sans parler des méconnaissances des nouvelles normes internationales et des labels disparus (dattes Deglet Nour, mandarine Clémentine, olive sigoise, etc.). L'Algérie exportait, avant les années 1970, pas moins d'un million de tonnes de fruits et légumes, dont 80% étaient vendus à l'état de primeurs. Ce n'est qu'aujourd'hui que le Maroc a pu atteindre de tels chiffres. Savez-vous que le Haut Conseil à l'exportation ne s'est pas réuni une seule fois depuis la création d'Algex (Agence de promotion des exportations) livrée à elle-même sans moyens ni perspectives. Enfin, il faut une immense volonté politique et le recours à un conseil en commerce extérieur, encadrement qui existe dans le monde entier, alors que, chez nous, on a le sentiment que personne n'a besoin de personne et encore moins d'expertise... Tout le monde sait tout et fait tout par lui-même.