Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali Le marché des CD piratés a beau être clandestin, illégal, théoriquement combattu par les instances de lutte contre les produits contrefaits, il n'en permet pas moins aux Oranais de satisfaire une passion pour le cinéma qui, autrement, resterait probablement inassouvie étant donné l'absence de salles de spectacles (toujours fermées) et d'une industrie cinématographie. «C'est, en partie, grâce à ces vendeurs que j'ai pu passer un bon ‘‘Ramadhan cinématographique''. J'ai pu regarder toutes les nouveautés et me mettre à jour avec les séries», témoigne l'un des innombrables consommateurs de CD piratés en affirmant avoir vu une dizaine de séries et autant de films récents. «Je n'ai pas les moyens de m'abonner aux bouquets satellitaires et s'il fallait attendre que l'Algérie se mette au diapason…», explique-t-il encore en estimant que si le piratage provoque des ravages dans les économies évoluées, il ne constitue aucune menace pour l'Algérie.Cette gratitude envers le marché parallèle est partagée par l'ensemble des cinéphiles que nous avons interrogés à Oran et qui estiment unanimement que les vendeurs de CD piratés jouent un vrai rôle dans l'animation culturelle de la cité et la diffusion de la culture, un rôle dont la ville s'accommode parfaitement étant incapable de l'assumer elle-même. «La volonté annoncée de lutter contre ces produits illégaux est une hypocrisie, assure-t-on ainsi. Jamais le marché parallèle n'a été aussi florissant et les points de vente aussi nombreux.» Il est vrai que ces vendeurs pas du tout à la sauvette pullulent dans la wilaya d'Oran. A M'dina J'dida, quartier commercial au centre-ville, ainsi que dans les quartiers périphériques, ce sont des centaines d'étals qui sont dressés sur les trottoirs. Et l'activité s'est étendue jusqu'aux cybercafés ou bureaux de tabac qui se sont mis au commerce des CD piratés, cédés à entre 75 et 85 DA l'unité.Selon les chiffres officiels, publiés par la presse nationale, il s'agirait de plus de 30 millions de CD vendus illégalement dans la région ouest du pays alors que ces dix dernières années ont vu 75 maisons d'édition mettre la clé sous le paillasson. A bien y regarder, contrairement à ce qu'on peut penser et ce que certains soutiennent même, l'Algérie n'est peut-être pas à l'abri des dommages du piratage…