L'ancien président afghan devenu négociateur de paix, Burhanuddin Rabbani, a été enterré hier à Kaboul, trois jours après son assassinat, lors de funérailles nationales chaotiques où ses partisans n'ont pas caché leur colère envers le président Hamid Karzaï et lesEtats-Unis. Face au cercueil de Rabbani, enveloppé d'un drapeau afghan et couvert de fleurs, Karzaï a prononcé une brève allocution assurant que «le sang versé par le martyr» Rabbani engageait le gouvernement à poursuivre ses efforts pour restaurer «la paix et la stabilité» dans le pays. Les prières et allocutions officielles ont été prononcées dans la citadelle fortifiée du palais présidentiel de Kaboul, dans la «zone diplomatique» de la capitale de plus en plus frappée par les attaques rebelles et transformée pour l'occasion en camp retranché protégé par des milliers de soldats et policiers. Ces funérailles ont surtout été marquées par les quolibets lancés par une partie de la foule, venue rendre hommage au défunt, contre le gouvernement et ses partenaires étrangers, largement représentés à la cérémonie. «Mort à l'Amérique, mort au Pakistan, mort à Karzaï», ont crié certains manifestants, en jetant des pierres sur les véhicules gouvernementaux, avant d'être dispersés par des tirs de sommation des forces de sécurité. L'ancien président a ensuite été enterré au sommet d'une des collines surplombant la capitale, en présence de plusieurs milliers de ses partisans en colère, qui agitaient des drapeaux noirs en réclamant justice. Karzaï, surprotégé et qui quitte très rarement le palais présidentiel lorsqu'il est dans le pays, n'a pas assisté à la mise en terre. Les environs du palais ont été totalement bouclés par des forces de sécurité et plus de 3.000 policiers supplémentaires déployés dans la capitale placée «en état d'alerte maximale», selon la police. Ancien héros de la résistance face aux Soviétiques dans les années 1980, puis président de l'Afghanistan entre 1992 et 1996 pendant la terrible guerre civile qui a en partie détruit Kaboul, Rabbani, 71 ans, dirigeait à sa mort le Haut conseil pour la paix (HPC), une instance créée à l'automne 2010 par le président Karzaï pour établir des contacts avec les rebelles talibans afin de mettre fin à la guerre. Il a été tué mardi chez lui à Kaboul, une demeure proche du palais présidentiel, par un kamikaze qui s'était présenté à lui comme un émissaire taliban avant de faire exploser une bombe dissimulée dans son turban. Rabbani, qui avait été le mentor du commandant moujahid Ahmad Shah Massoud, lui aussi tué dans un attentat suicide en 2001, est la plus haute personnalité politique afghane assassinée depuis l'invasion du pays par les Occidentaux à la fin 2001. La police a accusé les rebelles talibans, qui ont assassiné récemment plusieurs importantes personnalités liées au gouvernement, mais qui se sont gardés de revendiquer ce meurtre. L'assassinat de Rabbani risque de compliquer encore plus la mise en place d'un éventuel processus de paix, toujours officiellement refusé par les talibans malgré les appels du pied de responsables occidentaux. Agences