Photo : APS Par Hasna Yacoub La wilaya de Ghardaïa a passé l'Aïd dans le deuil. Déluge, larmes et gadoue se sont invités à la fête. Les équipes de secours poursuivaient hier encore les recherches dans les décombres de centaines de maisons qui se sont écroulées après des inondations ayant fait au moins 31 morts et une cinquantaine de blessés, à la fin de semaine dernière. Croissant-Rouge, scouts musulmans et bénévoles tentent de prêter main-forte au millier de sinistrés qui se retrouvent depuis cette catastrophe sans abri. Les éléments de l'Armée nationale populaire (ANP) ont également été déployés dans plusieurs points névralgiques de la ville pour assurer la fluidité du réseau routier et lutter contre tout acte de pillage ou de vol. Dans la wilaya de Ghardaïa, huit communes sur les 13 (Ghardaïa, Bounourau El Atef, Daïa Ben Dahoua, Guerarra Beriane, Metlili et Sebseb) ont été touchées par ces intempéries. Presque tous les quartiers ont été inondés. Les habitations, envahies par les eaux, ont été détruites. Des milliers d'autres maisons endommagées sont pour l'instant inhabitables. Plusieurs routes ont également été coupées et les liaisons téléphoniques très perturbées. Mercredi dernier, les plus chanceux des Ghardaouis n'ont eu le temps que de fuir les flots des oueds situés dans la vallée du M'Zab et des régions de Metlili, Berriane et Guerrara qui, gorgés par trois jours de pluies particulièrement violentes et très inhabituelles, ont débordé. Rien n'a résisté au passage de ces eaux en furie qui ont tout submergé jusqu'à une hauteur de huit mètres, obligeant les habitants à se réfugier sur les terrasses ou dans les quartiers plus élevés. Le ministère de l'Intérieur avait d'ailleurs précisé que ces pluies diluviennes enregistrées dans les wilayas des Hauts Plateaux ont entraîné une crue exceptionnelle -qualifiée de centenaire- d'un débit qui a atteint 900 m3 par seconde au niveau de la wilaya de Ghardaïa, ayant pour cause le déversement des oueds des wilayas limitrophes dans l'oued M'Zab dont le niveau a atteint 8 mètres de haut par endroits. Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, qui s'est rendu sur place dès mercredi, a effectivement annoncé un bilan provisoire des victimes, affirmant que les efforts se poursuivent pour porter secours aux populations toujours bloquées et retrouver les disparus. Le ministre a également souligné que la priorité du gouvernement est de «porter secours aux populations sinistrées, les approvisionner en vivres et les loger». «Les boulangeries ne fonctionnent pas, il n'y a ni gaz ni électricité, les magasins sont inondés et leurs stocks sont probablement inutilisables», avait constaté M. Zerhouni qui a procédé, sur le champ, à l'installation d'une cellule nationale de crise regroupant les représentants des différents secteurs afin de coordonner les opérations de secours et d'assistance à la population. Il a été procédé, dans ce contexte, à la mobilisation et à l'acheminement des moyens humains et matériels à partir d'Alger et des wilayas limitrophes vers le lieu du sinistre. Ces moyens consistent en l'envoi de 310 éléments de la Protection civile en plus des moyens humains locaux, ainsi que de girafes, de groupes électrogènes, de motopompes et de Zodiacs et divers moyens de sauvetage et de secours, notamment à l'aide de moyens héliportés qui ont permis le sauvetage de centaines de personnes. Sur place, les secours se sont alors organisés : des membres de la Protection civile, munis de canots pneumatiques, et des équipes médicales, venues des départements voisins, notamment de Naama, de Djelfa et de Laghouat, ont renforcé le dispositif local mis en place. Plus de 400 tonnes de denrées alimentaires ont été acheminées et le ministère de l'Intérieur a envoyé plus de 200 000 couvertures, un millier de tentes, trois boulangeries mobiles, 50 groupes électrogènes et une station de traitement pour la production d'eau potable. L'armée a fourni les moyens aériens nécessaires pour le transport de cette aide et a commencé à sécuriser la zone, pour éviter les pillages en particulier. Des secours, apportant les produits de première nécessité, sont également arrivés par camion des villes voisines. Les services publics, eau, gaz, électricité, téléphone, sont en cours de rétablissement mais l'accès à certains quartiers de la ville était encore très difficile hier en raison des décombres. Innée, la solidarité s'est manifestée : les propriétaires de maisons épargnées accueillent les sans-abri auxquels des repas chauds sont offerts. Après le déluge, le temps s'est éclairci hier sur la ville. Sereins, les Ghardaouis ont accepté ce que la nature leur a réservé.