Photo : S. Zoheir Par Hassan Gherab En remontant la rue Larbi Ben M'Hidi, sur le trottoir de gauche, on passe devant une bâtisse aux larges portes et baies vitrées : c'est le Musée national des arts modernes et contemporains d'Alger, le Mama, dernière acquisition «culturelle» de la capitale. Le musée a été aménagé dans les anciennes Galeries algériennes. Il est rare de voir une grande surface dédiée à la consommation, transformée en temple des arts, c'est généralement le contraire qui arrive en Algérie.Mais, revers de la médaille, cette gigantesque galerie est boudée par le public. C'est à peine si les gens ralentissent un peu le pas et jettent un coup d'œil vers l'intérieur éclairé a giorno quand ils passent à coté. Quant à y rentrer, ils n'y pensent même pas. Plus loin, dans ce qui était le cœur de la cité, la Casbah, qui pleure aujourd'hui sa beauté d'antan, le musée des arts et traditions populaires, aménagé dans le palais de Khdaoudj El âamia, est logé à la même enseigne. Les visiteurs ne font pas la queue devant les imposants huis. Idem pour le musée des Beaux-arts ou celui des antiquités. Le prestigieux musée du Bardo n'est pas mieux loti. Bien que situé en plein centre-ville, sur le boulevard Franklin Roosevelt, avec une belle entrée, en haut d'une allée ombragée très bucolique, il n'attire pas plus de monde. Nous nous sommes même retrouvés seuls lors de notre passage pour une visite non guidée. Car, généralement, les musées n'ont pas de guides pour prendre en charge les hypothétiques visiteurs qui pourraient s'intéresser aux richesses exposées. Si nécessaire, des employés se proposent de vous faire visiter, s'improvisant guides pour la circonstance. Il ne s'agit pas, toutefois, de se braquer sur l'arbre en éclipsant la forêt. Le problème ne réside pas dans l'existence ou non de guide, mais plutôt dans l'absence de visiteurs. Pourtant, l'accès à ces institutions est quasi gratuit. Le prix du ticket ne dépasse pas celui d'un sandwich de base. Et si la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, est toute disposée à batailler pour la gratuité des musées, la cause est noble mais guère porteuse, hélas. Ce n'est pas le prix du billet qui empêche les gens d'aller aux musées, puisqu'ils n'y vont même pas pour savoir combien il coûte. Dans l'imaginaire collectif, le musée a encore et toujours cette image d'une institution vieillotte, sombre et abritant des vieilleries qui ne peuvent intéresser que ces vieux scientifiques et chercheurs portant binocle et s'exprimant dans un langage incompréhensible pour les non initiés. Donc, la gratuité ne peut être la solution. Il faudrait penser à distribuer de l'argent aux passants pour, peut être, les décider à aller dans un musée, dirions-nous. La cause est entendue. Que faire alors ? Des musées ont trouvé la solution en adoptant l'activité extra-muros. Des valises muséales sont ainsi constituées pour être exposées dans les écoles et autres structures culturelles. Mais quelle que soit leur volonté, ces musées ne peuvent remplir leur mission, si le ministère de l'Education, l'académie, les directions de l'Education et les directeurs d'écoles ne jouent pas le jeu. Mieux, le secteur de l'Education ne devrait pas attendre que le musée vienne, mais il doit plutôt prendre les devants et aller vers lui. Il suffirait de reprendre les sorties éducatives qui permettent aux élèves de découvrir les patrimoines naturel, culturel et cultuel de leur région, au moins.De plus, il est connu que les musées font le gros de leurs entrées avec les touristes. Là, c'est le secteur du Tourisme qui doit s'impliquer. La présentation des musées et la promotion du tourisme culturel doivent avoir une place de choix dans les salons, les circuits et les prospectus des opérateurs touristiques.C'est après, et seulement après, qu'on pourra parler de formation de guides, achats de pièces et objets, ouverture de nouveaux musées, et critiquer ou soutenir la démarche des directeurs de ces institutions ou du ministère de tutelle.