Les incohérences, l'amateurisme et les faux experts balisent aujourd'hui le chemin qui mène au sous-développement du cinéma et de l'audiovisuel algériens. Dans le pays, selon le Journal Officiel, témoin froid pour l'histoire, il y a plus de centres dédiés au cinéma que dans les grands pays producteurs en Europe. Les missions et prérogatives de ces centres, redondantes et tellement gonflées que tous les studios à Hollywood et Bollywood font figure de parents pauvres en termes d'organigrammes, de directions, de sous-directions, de départements, etc. La duplication des structures bureaucratiques plaquées sur des organismes censés libérer la création et faciliter les financements, renseigne sur la qualité et l'esprit de ceux qui ont «rédigé» lesdits organigrammes et missions. Les soubassements fondamentaux de ce qu'a publié le JO sont la pensée unique, le parti unique et la «tutelle». Chasser le naturel et…Euromed, les accords de «coopération» signés avec des pays européens, pléthoriques depuis 1962, avec des chaînes de TV publiques d'Europe, avec le C.N.C français ont occulté et occultent toujours ce qui fait la vigueur et la richesse des cinématographies et de l'audiovisuel en Europe, aux U.S.A, en Inde, au Japon, etc. etc. Dans ces pays, le cinéma (production, distribution, exploitation, industries techniques, effets spéciaux, carrière des acteurs, achats de droits sur des livres, des pièces de théâtre, musique, salaires des techniciens, exportations, etc.) est géré par le droit privé, le contrat, les avocats, les agents, l'offre et la demande (vraie ou suscitée). L'Etat réglemente, régule, protège ou pas, et les ministères de la Culture ne peuvent ni censurer, ni interdire et encore moins produire ou co-produire. Le système est bon ou mauvais, il est reconnu, admis par tous les professionnels et il fonctionne là où il existe.Les «spécialistes», «conseillers» et experts en Algérie du cinéma et de l'audiovisuel sont sur une autre planète, celle de l'article 120 et 5 de la loi (il y en a eu tellement) sur le cinéma. Quant au cahier des charges de l'ENTV, appliqué ou pas, la bureaucratie et ses «conseillers» ne l'ont pas lu. Le statut d'EPIC de la TV ne leur dit rien. Ils sont dans un passé qui est du javanais pour les Européens, les Américains, les Brésiliens, les Indiens et les merles siffleurs. Un ministre de la Culture en Europe ne pourra jamais imposer une coproduction avec l'Algérie parce qu'il n'en a pas le droit et que le marché de tel ou tel pays européen ou autre est maître chez lui. Alors pourquoi ces visages graves sur un podium où siègent des Européens et des Algériens ? Pour remplir le bilan des activités. Sans plus. Les exemples de films comme Indigènes et tant d'autres attestent que les articles 120 et 5 n'ont aucun intérêt pour les parties non algériennes. L'article 5 de la loi sur le cinéma en Algérie stipule que tout film sur la guerre de libération doit être accepté par «le gouvernement».Vous avez bien lu «le gouvernement», quel qu'il soit, à n'importe quel moment. Le rédacteur de cet article ne se tire pas une balle dans le pied. Il commet un crime contre la création et la subjectivité des artistes. Il confie la guerre de libération et son traitement purement subjectif et artistique au «gouvernement» quel qu'il soit (moderne, républicain, islamiste, etc.). L'histoire du cinéma algérien reconnaîtra cette forfaiture et les rédacteurs de l'article comme étant les fils putatifs de l'article 120. Elle reconnaîtra aussi tous ceux qui ne l'ont pas dénoncé publiquement, arguments culturels et démocratiques à l'appui. Ils adorent le cinéma et ne pipent mot lorsqu'il est mis sous tutelle. Pas parlé, pas pris ! Erreur monumentale. Ceux qui faisaient les mêmes basses manœuvres sous Saddam, sous Moubarak, Kadhafi et Ben Ali seront, espérons-le, jugés. A réfléchir ! Le boomerang par les temps actuels est aussi inattendu que violent. A. B.