Les troupes de la Gendarmerie nationale ont procédé mardi dernier à l'arrestation de 30 immigrants clandestins au niveau de l'oued Anfou, dans la ville de Maghnia, sur les frontières algéro-marocaines. L'opération combinée, enclenchée tôt dans la matinée de mardi, a ainsi abouti à l'encerclement de ce groupe de trente candidats à l'immigration clandestine. Si certains de ces immigrants étaient tentés par une «expérience» sur le sol algérien où ils croient pouvoir s'installer en trouvant un poste d'emploi à même de leur permettre de subvenir à leurs besoins, ce n'est pas l'avis des autres. Ces derniers révèlent que leur objectif est de transiter par le sol algérien avant de rejoindre le Vieux Continent où l'espoir d'améliorer leurs conditions de vie, estiment-ils, est plus important. Les personnes arrêtées ne sont pas restées sans voix même devant les éléments du 1er groupement de la Gendarmerie nationale qui ont procédé à leur arrestation. Et si la ville de Maghnia est connue pour être une passerelle pour ces candidats à l'immigration clandestine via le sol algérien, les agents de surveillance révèlent que les accès à cette zone sont multiples. De Tamanrasset à Bordj Badji Mokhtar en passant par Aïn Guezzam, toutes les voies semblent pouvoir mener à Maghnia, la localité qui permet visiblement aux immigrants de rejoindre aussi bien le territoire algérien que marocain où les espoirs de survie se sont considérablement amenuisés, selon des récits au niveau des frontières. On fait état en effet de «zéro chance» de trouver un minimum de conditions de vie -plutôt de survie pour le cas des immigrants clandestins- du côté de Oujda, la ville frontalière. D'où, par ailleurs, le flux migratoire des Maliens, Tchadiens, Camerounais, Nigériens vers le sol algérien. Déterminés à fouler le territoire algérien, qui pour une durée limitée, qui pour y séjourner le plus longtemps possible, les immigrants clandestins ne sont pas près de reculer devant tout le dispositif de lutte mis en place ces dernières années. A Maghnia, ils ont donné la preuve de leur obsession à aller jusqu'au bout de leur «rêve». Loin d'accepter leur statut d'éléments avérés d'un mouvement de clandestinité et d'illégalité, ces jeunes et moins jeunes, venus d'Afrique, n'hésitent pas à contester une supposée maltraitance de la part des gardes frontières algériens. Un clandestin d'origine camerounaise, un récidiviste selon les témoignages des gendarmes algériens, se plaignait de la perte de son téléphone portable durant l'opération de poursuite. Surnommé «Babayaro» par les gardiens des frontières, le Camerounais, sans se déclarer vaincu, se dirigea vers un des responsables du groupement des frontières pour arracher une autorisation de se rendre aux toilettes. Une demande qui lui sera accordée. «Moi, je suis un Tchadien. Je suis ici depuis bientôt 6 mois. Après un passage au Maroc, j'ai compris qu'il valait mieux aller chercher un autre lieu pour trouver du boulot. Aujourd'hui, ils viennent de nous arrêter. Ce n'est pas notre tort si nous transitons par ici. Nous n'avons pas une autre solution de rechange», témoigne Omar, un natif de N'Djamena, la capitale tchadienne. Le parcours de l'Ivoirien Idriss est identique à celui du Tchadien. L'étape marocaine semble inévitable pour ces immigrants. «Moi, j'ai passé quatre mois au Maroc. Je suis venu pour m'installer en Algérie car des compatriotes et des amis m'ont dit que ça marche bien ici. Maintenant, je me retrouve dans un poste de police.» Parmi les trente personnes arrêtées sur la bande frontalière, plus précisément au niveau de l'oued Jorjï, quelques-uns ont fait des études universitaires. Un jeune Camerounais, âgé de 27 ans, a indiqué qu'il n'a pas entamé son aventure à partir d'un bidonville de Douala. Il vient plutôt de la célèbre université d'Al Azhar où il a suivi un cursus dans le marketing et le commerce international. «Le manque de perspectives sociales dans notre pays nous contraint à aller chercher ailleurs. C'est pour cette raison que je suis ici. Ce n'est pas par plaisir que je m'aventure, mais par obligation. Je ne peux pas traîner sans emploi à Douala», déclare-t-il. Son compatriote Mohamed fera remarquer qu'il travaillait il n'y a pas si longtemps à Charm Echeikh en tant que plongeur. Il percevait une mensualité de 2 200 euros. Quel sera le sort réservé à ces immigrants clandestins ? Le commandant du 1er groupement des gardes frontières de Maghnia, M. Aouerag Lounes, répond : «Ils seront traduits devant la justice. Certains parmi eux seront refoulés. Cependant, il y aura sans doute ceux qui seront emprisonnés dans la mesure où nous avons des preuves qu'ils sont bel et bien des récidivistes.» La même source explique qu'«il ne s'agit pas ici d'une opération spectaculaire puisque nous avions eu par le passé à arrêter un nombre plus élevé. Nous enregistrons plutôt une baisse conséquente suite au renforcement, du côté algérien, des postes de surveillance. 11 postes sont opérationnels au niveau de la bande frontalière et 13 autres sont en cours de réalisation. Une fois ces postes livrés, nous aurons plus d'atouts pour freiner l'ampleur prise par ces deux phénomènes, à savoir l'immigration clandestine et la contrebande et ce qui les accompagne comme “importation” de drogue…» La priorité des forces de sécurité est manifestement très claire : la sécurisation de la zone frontalière passe irrémédiablement par la neutralisation du mouvement des immigrants clandestins et le contrôle de tous les réseaux de drogue.