Photo : S. Zoheir Par Ali Boukhlef Les émeutes de janvier 2011 n'étaient pas forcément provoquées par la hausse des prix de l'huile et du sucre. Mais la commission d'enquête parlementaire «sur la pénurie et la hausse des prix de large consommation» trouve que les événements qui avaient ébranlé le pays durant plusieurs jours étaient provoqués par une «hausse inexpliquée» des prix de ces produits de large consommation. Pour une fois dans l'Histoire du pays, une commission d'enquête parlementaire rend public ses conclusions. Une occasion pour les membres de la commission parlementaire «pour la pénurie et la hausse des prix de produits de large consommation» de rencontrer la presse et, parfois, de s'expliquer sur ce qui peut constituer un manquement ou une interrogation pour l'opinion publique. «On a tout simplement essayé de comprendre ce qui s'était passé», s'est défendu Kamel Rezgui, le président de la commission (FLN). Selon lui, «la commission est parvenue à la conclusion que parmi les raisons qui avaient poussé aux émeutes de janvier dernier, il y a la hausse des prix des produits de large consommation». Pis, il a expliqué que sa commission ne pouvait pas «enquêter sur des évènements dont la justice s'est saisie». Il a répondu à une question sur le fait que la commission ne s'est en aucun cas intéressée aux émeutes qui avaient fait au moins 5 morts en janvier dernier. Fait étrange, la commission parlementaire pense de la manière la plus sérieuse que l'instauration, à partir d'avril dernier, du chèque pour les transactions dépassant 500 000 DA, «était parmi les raisons qui avaient provoqué les émeutes». Pis, ce serait les grossistes qui seraient derrière d'éventuelles manipulations de jeunes ayant participé aux émeutes. L'autre point noir soulevé par la commission d'enquête est la non présence des grossistes aux convocations des parlementaires. Kamel Rezgui a avoué que ni lui ni le président de l'Assemblée populaire nationale ne savent pourquoi ces commerçants ne voulaient pas venir. «Je vous mentirais si je vous disais que nous avons des réponses. Ce qui nous a été proposé comme réponse n'est pas convaincant. Mais, le président de l'Assemblée a saisi les instances concernées et je vous assure que nous n'allons pas lâcher l'affaire», a-t-il indiqué. Autrement dit, des commerçants ont refusé de répondre aux convocations des députés, alors que de gros industriels se sont présentés devant les parlementaires.Autre fait étrange révélé par ce rapport : le ministre du Commerce, Mustapha Benbada, n'a trouvé comme explication à la hausse des prix de l'huile et du sucre que l'application, par le patron du groupe privé Cévital, de la réglementation. Autrement dit, un opérateur économique a appliqué des dispositions que l'Etat n'a pas réussi à faire appliquer. Pis, un ministre qui reproche à un industriel d'avoir appliqué des lois. Sans vouloir entrer dans les détails, le président de la commission s'est dit frappé par «un manque de coordination flagrant entre les services de l'Etat à la base». Il a révélé avoir découvert, dans plusieurs endroits visités par les parlementaires, des situations énigmatiques. Il a cité par exemple le fait qu'un bateau attend au quai les résultats d'analyses de laboratoires, alors que d'autres bateaux attendent en rade, avec tout ce que cela peut provoquer en termes de perte de temps et d'argent. Pour les recommandations, l'orateur s'est posé beaucoup de questions, soumises au gouvernement. «Est-il normal que le riche et le pauvre achètent au même prix le sachet de lait ? Est-il normal que les subventions destinées au lait partent pour le yaourt et celles du blé partent pour des gâteaux ?», s'est-il interrogé. Le député FLN reconnaît qu'il n'a pas de réponse à donner.Le président de la commission d'enquête a insisté sur le fait que son rôle réside dans le seul fait de rapporter les anomalies constatées. Un rapport est donc transmis au gouvernement avec des recommandations. L'Exécutif est-il prêt à trouver des solutions ? Cela est une autre question qui relève d'un autre pouvoir.