La commission parlementaire d'enquête sur la pénurie de lait et la hausse brutale et vertigineuse des prix du sucre et de l'huile ayant entraîné les émeutes du début de l'année a terminé son travail, qui a duré six mois (c'est-à-dire dans les délais), et a remis son rapport au président de la République, a fait savoir le Dr Kamel Rezgui, qui préside cette commission, dans un entretien accordé à la Chaîne III de la Radio nationale dont il était l'invité de la rédaction. Parmi ses conclusions, un fait déjà connu a été cité dans le rapport : un seul opérateur (que le Dr Rezgui n'a pas nommé) détient plus de 40% du marché intérieur du sucre et de l'huile (ce n'est pas normal, dit-il), c'est-à-dire une situation de dominance favorisée, selon le Dr Rezgui, par l'inexistence du Conseil national de la concurrence (dont le rôle est de réguler) et surtout par l'absence de l'Etat dans le circuit du sucre et de l'huile depuis que les entreprises publiques de ce secteur ont été privatisées. Le cahier des charges de ces privatisations n'a pas été respecté, rappelle-t-il tout en demandant à l'Etat d'intervenir pour contrôler et sévir dans ces situations de manquement à leurs engagements par les repreneurs de ces entreprises. Les mécanismes de contrôle du commerce intérieur se heurtent au secteur informel qui échappe au contrôle alors qu'il occupe une grande place dans le marché, fait-il remarquer, en précisant qu'il s'agit du gros lot de marchandises qui ne passent pas par le circuit officiel, donc pas de facturation, refus d'utilisation du chèque qui devait être en usage depuis avril 2011 (et dont la mise en application a été différée par le gouvernement), d'où le fait qu'une grosse partie de ces marchandises ne passent pas par un circuit transparent, d'où également une perte pour les recettes fiscales ordinaires. A ce propos, il tient à signaler que les grossistes, contrairement aux opérateurs et institutions, n'ont pas répondu à la convocation que leur a envoyée la commission parlementaire pour s'expliquer sur leur rôle dans le dysfonctionnement du marché des produits alimentaires de base intervenu au début de l'année. Concernant la politique actuelle de soutien de l'Etat des produits de large consommation, elle doit aller, dit-il, vers les catégories démunies qui seraient identifiées sur un fichier national. Il faut encourager la production nationale, ajoute-t-il, comme solution au problème des prix. Il estime que la politique de soutien de l'Etat telle qu'elle est mise en œuvre de façon aveugle, est difficile à tenir. Tant que le baril est à 100 dollars, il n'y a pas de problème et jusqu'à 60 dollars aussi, mais il met en garde contre les conséquences graves d'une diminution du prix du pétrole sous ce seuil. Il propose que le soutien aille directement aux catégories qui en ont besoin à travers les salaires et les pensions. Il fait remarquer que les subventions actuelles servent aussi à fabriquer du yaourt, des boissons, de la pâtisserie,…et pas seulement pour soutenir les prix du lait, du sucre, de l'huile et du pain comme produits alimentaires de base destinés à la consommation. Les transferts sociaux, tous confondus, s'élèvent à 1 500 milliards de dinars, fait-il observer. Il demande un débat national sur cette question. Il estime que les importations de produits alimentaires subventionnés par les privés doivent être plafonnées en fonction des besoins du pays pour qu'ils n'achètent pas à n'importe quel prix et la quantité qu'ils veulent. Il propose enfin qu'une cellule de veille des marchés mondiaux aide à mieux acheter à l'étranger.