Photo : La Tribune Par Noureddine Khelassi A ce jour, les préconisations et autres suggestions et souhaits des partis politiques ne permettent pas de se faire une idée précise de ce que sera la Constitution qui sera amendée après l'élection d'une nouvelle Assemblée nationale au mois d'avril 2012. L'absence de débat sur le sujet ne permet pas non plus d'y voir plus clair. Le fait même de connaître les préférences des uns et des autres, y compris le choix initial du chef de l'Etat, n'autorise pas à dessiner avec quelque précision les contours du futur régime. Régime présidentiel, parlementaire ou mixte, c'est-à-dire semi-présidentiel ? La question est posée, même si on sait que la tendance qui s'est dessinée au sein des trois partis constituant l'Alliance présidentielle (FLN, RND, MSP), serait plutôt favorable à un régime semi-présidentiel, plus ou moins équilibré, où une voix prépondérante serait octroyée alors au président de la République.A l'évidence, le futur régime politique, issu d'une Constitution substantiellement amendée et validée par une assemblée dotée, selon les engagements solennels du chef de l'Etat, d'une légitimité démocratique forte, sera notamment le fruit du jeu des forces politiques et des cercles d'influence au sein du pouvoir actuel. Il sera également déterminé par d'autres facteurs historiques, idéologiques et culturels. La mouture finale serait le résultat de l'arbitrage ultime du chef de l'Etat, auquel revient l'initiative de la révision constitutionnelle, en vertu de l'article 174 de l'actuelle Constitution. Elle est votée en termes identiques par les deux Chambres du Parlement et soumise par référendum à l'approbation du peuple. Dans tous les cas de figure, l'élaboration de la révision sera un compromis entre les idées du président Abdelaziz Bouteflika et les préconisations de commissions de préparation constituées d'experts, de spécialistes du droit, notamment de constitutionnalistes. Si le contexte national, régional et international est favorable à l'élargissement du champ des droits fondamentaux et des libertés, on peut tout autant imaginer que la révision porterait tout aussi bien sur l'organisation des institutions et les pouvoirs du président de la République et du Parlement. La propre préférence du chef de l'Etat est un secret de Polichinelle. Le président Abdelaziz Bouteflika a toujours été favorable à un régime présidentiel mais qui ne serait pas strict comme le système américain. Aux Etats-Unis, il est caractérisé par une rigoureuse séparation des pouvoirs : le pouvoir législatif a le monopole de l'initiative et la pleine maîtrise de la procédure législative. Le pouvoir exécutif, qui dispose d'une légitimité fondée sur le suffrage universel, ne peut être renversé ; le pouvoir judiciaire bénéficie de larges prérogatives. Dans ce système, l'exécutif relève du seul président, celui-ci est à la fois le chef de l'Etat et le chef du gouvernement. Sa responsabilité ne peut être mise en cause par les assemblées, mais, réciproquement, il dispose de peu de moyens de contrainte à leur égard. L'actuel chef de l'Etat algérien est plutôt favorable à un régime présidentiel de type gaullien où il est à la fois le garant et l'arbitre du jeu institutionnel. Sa philosophie de pouvoir a été esquissée à la faveur de la révision de la Constitution en novembre 2008. Il y est devenu l'unique chef de l'exécutif, avec un Premier ministre chargé de mettre en œuvre sa politique. Dans ce régime, disons présidentialiste, la responsabilité du chef de l'Etat, seul patron de l'exécutif, n'est en aucun cas engagée devant le Pparlement. Certains partis comme le MSP islamiste ou le PT ouvriériste et nationaliste de Louiza Hanoune souhaitent l'instauration d'un régime parlementaire pour lequel le pays, en raison notamment du niveau de culture démocratique et d'expertise politique nationale, n'est pas préparé. Le compromis historique serait donc de choisir un régime semi-présidentiel comme c'est le souhait des deux grands partis issus du régime, le FLN et le RND. On y trouve des caractéristiques du régime présidentiel : le chef de l'Etat, élu par le peuple, choisit et révoque les membres du gouvernement, s'il dispose d'une majorité conforme à ses vues. Le régime semi-présidentiel emprunte aussi au régime parlementaire où l'exécutif est dissocié entre le chef de l'Etat et le gouvernement. Dans tel cas, le chef du gouvernement, et non le Premier ministre, doit disposer de la confiance de la majorité parlementaire dont il est issu : il est donc responsable devant elle et non devant le chef de l'Etat comme c'est le cas dans l'actuelle Constitution algérienne. Le régime mixte, qui a surtout les faveurs du FLN, ne peut bien fonctionner qu'en cas d'accord parfait entre le chef de l'Etat et la majorité parlementaire. Dans une telle configuration, le chef du gouvernement est doublement responsable devant le président de la République et le Parlement. Mais, contrairement au régime français actuel, dans le cas contraire, le président de la République ne céderait pas en Algérie la prééminence au chef du gouvernement. C'est le cas de figure de la cohabitation sous la Ve république. En Algérie, on s'acheminerait vers un régime où la balance des pouvoirs serait plus équilibrée qu'elle ne l'est actuellement, même si elle pencherait un peu plus vers un président de la République qui serait le garant du bon fonctionnement des institutions et le père de la nation. Dans l'esprit, le suffrage universel serait la seule source du pouvoir. Les pouvoirs exécutif et législatif seraient effectivement séparés afin que chacun assume pleinement ses attributions. Le gouvernement serait à la fois responsable devant le président de la République et le Parlement. Et, in fine, l'autorité judiciaire serait indépendante.