Le nouveau gouvernement d'unité nationale du Yémen a accordé l'immunité judiciaire au président Ali Abdallah Saleh et à tous ses collaborateurs pour les crimes commis en 33 ans de règne du chef de l'Etat. Ce dernier, contesté par la rue depuis des mois, s'est engagé à passer le relais à son vice-président, Abed Rabbo Mansour Hadi, le 21 février. La décision prise dimanche par le gouvernement, et dont la validation au Parlement ne devrait être qu'une formalité, a surpris nombre de Yéménites qui pensaient que l'immunité garantie au président et à sa famille dans le cadre de l'accord de transfert du pouvoir signé en novembre ne s'étendrait pas à la totalité de son mandat et à tous ceux qui ont travaillé avec le gouvernement. Les manifestants qui défilent quotidiennement au Yémen exigent notamment que le président Saleh réponde devant la justice de la répression du mouvement de contestation depuis onze mois: les centaines de personnes tuées dans des assauts contre des camps de manifestants, le recours à des tireurs embusqués et les attaques armées contre les protestations pacifiques. Selon les activistes, la plupart des attaques ont été menées par la Garde républicaine dirigée par le fils de Saleh. Le texte adopté par le cabinet «accorde au président Ali Abdallah Saleh et à ceux qui ont travaillé avec lui, y compris les institutions civiles, militaires et de sécurité, durant sa présidence, l'immunité légale et judiciaire». Sur le terrain des tensions entre le président sortant Ali Abdallah Saleh et le dirigeant yéménite par intérim, Abd-Rabbu Mansour Hadi, auraient amené ce dernier à menacer de quitter ses fonctions. L'information proviendrait d'un responsable des partis de la Conférence Conjointe (JMP), une alliance de partis de l'opposition. Selon lui, ces tensions seraient dûes aux pressions exercées par Ali Abdallah Saleh sur Abd-Rabbu Mansour Hadi pour que ses proches, poussés à la destitution par la contestation populaire, soient reconduits dans leurs fonctions. Mr Hadi aurait ainsi fait part aux médiateurs occidentaux de son intention d'abandonner ses fonctions pour se retirer dans la cité portuaire d'Aden si les ingérences du président Saleh et de ses proches se poursuivaient. Si cette information s'avérait fondée, le processus de paix au Yémen, initié par le plan de sortie de crise proposé le CCG (Conseil de Coopération du Golfe), s'en trouverait encore plus fragilisé. En effet, le plan de sortie de crise du CCG, qui a déjà permis la formation d'un gouvernement d'union entre le JMP et le GPC (Congrès général du peuple), le parti du président Saleh, a réussi à faire imposer la proposition d'immunité pour le président Saleh et ses collaborateurs, dont un projet de loi a été proposé par le gouvernement. Une partie de la population réclame qu'ils soient tous traduits en justice pour la mort des centaines de yéménites par les forces de sécurité en onze mois de contestation populaire. Agences