Photo : Sahel Par Amirouche Yazid Lancé par Abdellah Djeballah, qui venait d'être destitué du parti Ennahda, le mouvement El Islah a manifestement la particularité de vivre, depuis, au rythme des dissensions. Même après avoir chassé son leader, le parti islamiste n'a pas connu de stabilité organique dans le sens où El Islah a été, par la suite, traversé par une crise interne qui a donné naissance à une autre formation politique. Cette dernière s'apprête ainsi à se lancer dans sa première expérience électorale en prenant part aux élections législatives prévues au mois de mai prochain. Une telle trajectoire du mouvement El Islah sera incontestablement une matière à observation à l'occasion de cette échéance électorale. Ce sera visiblement une étape déterminante pour évaluer les performances des uns et des autres. C'est-à-dire vérifier si le mouvement El Islah est en mesure de préserver sa place sur l'échiquier politique algérien. La question de savoir si le parti peut vivre longtemps au lendemain du départ de son leader charismatique aura logiquement sa réponse à l'issue de la prochaine consultation électorale. Il sera également vérifié si la direction du parti a réussi la restructuration de l'appareil politique nouvellement créé. Nul doute que le mouvement El Islah va tenter de mettre à profit la montée des partis d'obédience islamiste dans le monde arabe pour se faire une certaine place sur la scène politique. Et être représenté à l'Assemblée populaire nationale. Mais l'ambition d'El Islah ne sera pas facile à réaliser, compte tenu du nombre de partis islamistes qui se lanceront dans la bataille des législatives. Cette donne, à savoir plusieurs partis islamistes en lice, émiettera davantage l'électorat de ce courant politique sur le retour. Ce qui serait une arme à double tranchant pour le mouvement El Islah. Mais au-delà de ces interrogations d'ordre circonstanciel, les résultats qu'obtiendrait le mouvement El Islah seront une réponse à la question de savoir si les dissensions vécues par le parti traduisent une divergence d'idées et d'approches politiques ou si elles révèlent des rivalités clientélistes. Car quand une formation politique est cycliquement exposée à des frondes, les explications superficielles ne tiennent pas la route. C'est incontestablement le cas d'El Islah, marqué par d'interminables luttes internes pour la légitimité de diriger le parti. Les autres formations politiques ne sont pas pour autant immunisées du syndrome de la dissidence. 2011 a été ainsi marqué par des frondes dans la plupart des partis politiques, y compris ceux qui étaient connus, jusque là, pour leur discipline partisane. L'ancien parti unique peine encore à surmonter une crise interne pour retrouver sa sérénité. Cette désunion risque de lui jouer un mauvais tour à l'occasion des prochaines législatives. Avant les mois agités du parti du FLN, c'était le MSP qui a défrayé la chronique avec une dissension menée par Abdelmadjid Menasra contre le président du parti, Aboudjerra Soltani. El Islah se distingue cependant par des dissensions sans discontinuité. Ce qui a ouvert la voie à toutes les interprétations quant aux motivations et aux conséquences de ces frondes. Les uns voient en cela le signe d'une vitalité organique. Les autres évoquent, plutôt, un malaise profond qui peut prendre une dimension lourde de conséquences organiques à mesure que la date des futures joutes électorales approche. En réalité, il est difficile d'imaginer un parti, quel que soit son gabarit, pouvoir mener dans la sérénité des élections au moment où la lutte des personnes pèse lourdement sur le fonctionnement des structures. Un chercheur de la pensée politique nous écrit à cet effet que “l'indiscipline des militants ou des élus, dans un parti, est de nature à affaiblir gravement sa capacité d'influence. C'est la convergence des prises de parole qui impose, dans la vie publique, l'idée que ce ne sont plus des individus qui s'expriment mais une organisation”. En tout état de cause, le mouvement El Islah sera attendu à l'occasion des législatives de mai 2012. Pour vérifier qu'il peut évoluer politiquement sans son fondateur Djaballah. Et s'il est en mesure de résister aux troubles internes qui le frappèrent à son tour. Il y a le printemps pour y répondre.