La crise syrienne, qui met aux prises un régime autiste se limitant à l'option sécuritaire et une opposition voulant sa chute, par tous les moyens, semble déteindre sur son voisinage. Le Liban est de plus en plus secoué par des soubresauts venant du grand voisin, en proie à une grave situation politique, qui dure depuis plus d'une année. Les Libanais sont, plus que jamais, divisés entre pro et anti-syriens et les autorités syriennes sont irritées par le soutien apporté aux rebelles syriens par certains milieux libanais. L'enlèvement de treize Libanais chiites, dans la province d'Alep (nord de la Syrie), alors qu'ils revenaient, en bus, d'un pèlerinage en Iran, ravive la tension, déjà aigüe, entre protagonistes et risque de constituer l'étincelle, dans une disposition fortement inflammable. L'annonce de l'enlèvement a poussé des milliers de personnes à manifester dans la banlieue sud de Beyrouth, à majorité chiite, pour demander la libération des pèlerins, bloquant plusieurs axes, notamment l'ancienne route menant à l'aéroport. Ce qui a obligé le leader du mouvement Hezbollah Hassan Nasrallah à calmer les esprits, en lançant un «appel à la retenue» et révélant que «des contacts ont été pris avec les autorités syriennes et avec d'autres pays influents dans la région, pour assurer leur libération». La contagion des violences en Syrie est devenue une hantise pour tous les Libanais, suscitant l'inquiétude. Les guerres civiles commencent toujours par des incidents de ce genre, avant de faire embraser le pays entier. «La situation en cours est une «menace réelle» et pourrait «très mal se terminer», a mis en garde le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. Beaucoup de spécialistes estiment que le Liban est devenu «l'otage» du conflit qui se déroule chez le voisin syrien, après une série d'incidents meurtriers, impliquant des Libanais hostiles et favorables au régime Assad. On reproche à certains milieux libanais, aveuglés par leur hostilité au régime syrien, d'avoir transformé le nord du pays en «passage» pour les rebelles syriens. Le 12 mai, l'arrestation d'un islamiste sympathisant de la révolte syrienne avait mis le feu aux poudres à Tripoli, la principale ville du Nord. Des accrochages entre sunnites et alaouites avaient fait dix morts dans cette ville. Les violences se sont étendues à Beyrouth, où des heurts entre pro et anti-régime syrien ont fait deux morts, au lendemain du meurtre d'un dignitaire sunnite hostile à Assad. Le roi Abdallah d'Arabie saoudite, très critique envers le régime syrien, a appelé le président libanais Michel Sleimane à intervenir, face à la «gravité» de la crise. Le fragile pays du cèdre risque, en effet, de replonger dans la guerre civile de triste mémoire. M. B./Agences