Synthèse de Ghada Hamrouche Moscou demande à Damas un peu plus d'efforts et averti la communauté internationale que Bachar al Assad ne lâchera pas le pouvoir. Entre-temps la Russie reconnaît et défend son droit de livrer des armes au régime syrien. Une véritable douche glacée pour la communauté internationale qui espérait voir Moscou jouer un rôle pour convaincre le président syrien de quitter la présidence du pays, à l'instar du président yéménite. Moscou a donc déçu «la communauté internationale» en refusant de cautionner le plan de départ d'Al Assad mais surtout par ses livraisons d'armes à Damas. Jeudi les Russes ont placé sous leur pavillon un cargo, repéré au large de l'Ecosse, qui transportait vers la Syrie hélicoptères et batteries antiaériennes. La Russie a affirmé, dans ce sillage, son intention de continuer ses livraisons d'armes à la Syrie, les regards se focalisant depuis mardi sur un cargo russe, le MV Alaed, repéré au large de l'Ecosse et soupçonné de transporter des hélicoptères d'attaque Mi-25 destinés au régime syrien. Le cargo, naviguant sous pavillon de Curaçao, a dû faire demi-tour mardi. «Oui, il transportait trois hélicoptères réparés en Russie», a confirmé M. Lavrov. À bord se trouvent également «des moyens de défense antiaérienne qui ne peuvent être utilisés que contre une agression extérieure et pas contre des manifestants pacifiques», a-t-il ajouté. Le porte-parole du ministère, Alexandre Loukachevitch, a confirmé le type des hélicoptères, des Mi-25 d'attaque, version d'exportation du Mi-24, un appareil de conception soviétique largement utilisé, notamment en Afghanistan (1979-89) et pendant les deux conflits en Tchétchénie. Ces hélicoptères «sont propriété de la partie syrienne et doivent (lui) être rendus après réparation», a souligné M. Loukachevitch. «Pour écarter la possibilité d'une interception du bâtiment, il a été décidé de le faire revenir à Mourmansk (Nord-Ouest), où il est attendu samedi (aujourd'hui Ndlr) pour passer sous pavillon russe», a-t-il ajouté. Evoquant le plan de départ d'Al Assad, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a déclaré: «Le schéma selon lequel le président Assad devrait partir avant que quelque chose ne se produise du point de vue de la fin des violences et d'un processus politique, ce schéma ne fonctionne pas depuis le début.» «Il est irréalisable parce qu'il ne partira pas», a ajouté le chef de la diplomatie russe. «Il faut comprendre, quoi qu'on pense des élections passées, qu'au moins la moitié des Syriens ont voté pour Bachar al Assad, pour son parti et sa politique», a-t-il ajouté, ils «voient en lui leur avenir et leur sécurité». Et comme pour absorber la colère occidentale contre son pays, le chef de la diplomatie russe a indiqué, hier, avoir signifié à son homologue syrien que Damas devait faire «beaucoup plus» d'efforts pour mettre en œuvre le plan Annan, lors d'une rencontre en marge du Forum économique de Saint-Pétersbourg. «Nous les avons appelés à faire en sorte que leurs déclarations sur leur disposition à mettre en œuvre le plan de Kofi Annan soient confirmées par des actes. Ils ont déjà fait beaucoup, mais ils peuvent et doivent faire beaucoup plus», a déclaré M. Lavrov à l'antenne de la chaîne Rossia 24, précisant avoir eu des «pourparlers» avec Walid Mouallem en marge du Forum. Plusieurs dirigeants occidentaux avaient nourri l'espoir que la Russie allait prendre ses distances avec Bachar al Assad et infléchir sa position sur la Syrie, son allié depuis la guerre froide. Le journal britannique The Guardian a même affirmé, jeudi, que les dirigeants britanniques et américains avaient perçu une inflexion sur ce point de la part du président russe Vladimir Poutine, au G20 au Mexique au début de la semaine et en vue d'une conférence sur la Syrie, prévue pour le 30 juin à Genève. Une information que dément catégoriquement le ministre des Affaires étrangères russe. «Notre logique n'a pas été ébranlée», a-t-il déclaré, s'étonnant que «des dirigeants de ce niveau puissent interpréter à ce point la teneur de leurs conversations». A l'issue du G20, Vladimir Poutine avait maintenu devant la presse que «personne» n'avait le droit de décider de qui devait exercer le pouvoir dans un pays tiers.