Photo : Sahel Par Samir Azzoug Le président de l'Association nationale des anciens condamnés à mort du FLN dénonce leur marginalisation et réclame un statut de cadres de la nation pour ces résistants. «C'est un statut que nous demanderons jusqu'à la fin. Même si cela doit nous être accordé à titre posthume», insiste-t-il. Dans les locaux de l'Association, à Alger, Mustapha Boudina s'offusque du sort réservé aux condamnés à mort alors que l'Algérie fête son cinquantenaire de l'Indépendance. «Nous sommes écartés des festivités. En dehors du wali d'Oran, personne n'a pensé à ces militants. Aucune partie n'a pensé à honorer ces véritables acteurs de la Révolution et fidèles au FLN», dénonce Mustapha Boudina en notant avec amertume que les 1 100 condamnés à mort toujours en vie sont boudés de toute part. «Lors du dernier congrès du FLN, nous avons été désagréablement surpris d'être invités comme simples observateurs. Des gens qui n'avaient rien à voir avec le parti étaient affublés du badge de congressiste», s'étonne-t-il, poursuivant que «même l'Organisation nationale des moudjahidine, à laquelle nous cotisons, nous tient à l'écart de son congrès». Remonté par ce constat, le président de l'Association, qui dénonce également un «blocus» médiatique, assène : «Les condamnés à mort sont devenus les dindons de la farce», faisant référence à leur instrumentalisation par «des cercles qui profitent de leur souvenir pour s'enrichir ou prendre de la notoriété sur le dos de l'histoire». «Je condamne l'utilisation par certains de l'histoire de la Révolution à des fins personnelles. Il y a une volonté de bloquer et de maquiller cette histoire pour des raisons matérialiste, de célébrité ou pour tromper l'opinion publique», déclare-t-il. Dans ce sens, le conférencier note que les productions –littéraires ou audiovisuelles- sur cette période de la guerre d'Indépendance ont plus d'échos en Algérie et auprès des instances officielles quand elles proviennent de «l'étranger». «On ne veut pas donner de la valeur à nos historiens. Nos officiels préfèrent quand l'Histoire est écrite par les autres», dénonce-t-il. Pour argumenter, il dira que deux auteurs ont écrit sur la torture durant la guerre d'Indépendance. «Henri Alleg qui a écrit un livre qui fera l'objet d'un film, “la question”, très médiatisé et est même passé sur Canal Algérie. Et moi, avec “les rescapés de la guillotine” qui est passé presque inaperçu», juge-t-il en affirmant qu'un scénario pour tourner un film tiré de son livre a été refusé par le comité de lecture des scénarios du ministère de la Culture. «Ils on demandé à en faire un film-documentaire, j'ai refusé», peste-t-il en qualifiant le film sur Ahmed Zabana d'«utilisation de l'histoire à des fins commerciales». Sans retenue, M. Boudina dénonce l'importance accordé aux auteurs étrangers en s'en prenant à l'historien Benjamin Stora. «Ses écrits sont empoisonnés et vont dans l'intérêt de la France. Il parle de 600 000 morts dans la guerre de Libération au lieu de 1,5 million de martyrs. Il compte 16 000 morts au lieu de 45 000 lors des massacres du 8-Mai 1945. Mais, à chaque fois, il est reçu comme une star en Algérie. Nos officiels ont peur de lui, car il peut consulter les archives de la guerre en France et pourrait dire beaucoup de vérités qui leur nuiraient.» «L'histoire ne peut être racontée que par ceux qui l'ont vécue. On ne peut faire un livre ou un film sur Zabana sans consulter ses compagnons de cellule qui sont toujours en vie. L'histoire des condamnés à mort, nous la connaissons et nous avons des preuves pour valider nos récits. On a réussi à avoir les notes du bourreau Meissonier qui livre des détails important sur son exécution, loin des mystifications et autres ajouts infondés», déclare-t-il.