Huit ans après avoir organisé le Mondial 98, la France du football a dû se montrer déçue et jalouse en voyant les enceintes allemandes, celle nouvellement bâties ou celles rénovées, abriter le Mondial 2006. Avec des stades de qualité supérieure, architecturalement, et offrant plus de confort aux spectateurs, le Mondial germanique est venu ainsi sonner le coup de vieux d'un stade de France inauguré avec orgueil et fierté. Que devraient penser les responsables du football algérien dix-huit années après la seule Coupe d'Afrique des nations organisée par l'Algérie en 1990 ? Qu'il est temps de postuler une nouvelle fois pour l'organisation d'une manifestation sportive d'envergure à l'image d'une CAN. Pour l'Algérie, la problématique est loin d'être simple à résoudre. Faut-il construire des stades d'envergure pour courir derrière une organisation de la CAN ou plutôt gagner le ticket de l'organisation pour attaquer le chantier de la construction. Pour diverses raisons, la première option semble la plus adaptée au cas algérien. Pour le simple motif que le pays accuse un grand retard en matière d'infrastructures en mesure d'abriter les grandes manifestations. Nul n'ignore que plusieurs stades ont été bâtis un peu partout à travers le territoire national. Beaucoup de villes sont ainsi dotées de stades qui servent de lieu de déroulement des compétitions nationales. En l'espace de quelques années, la ville de Blida s'est transformée en capitale des grands rendez-vous du football national, conséquemment à la fermeture cyclique du stade du 5 Juillet. Du coté de l'Est, la ville d'El Eulma, administrativement affiliée à Sétif, possède un stade qui n'est pas loin des normes internationales : grand terrain, piste olympique et une capacité supérieure à 35 000 places.
Infrastructures inachevées Cette réalisation a été par ailleurs vite accompagnée de l'accession de l'équipe locale parmi l'élite. C'est dire que le développement technique passe inévitablement par la disponibilité de l'infrastructure. D'autres stades ont été aussi inaugurés ici et là. Force est de constater que ces infrastructures sont loin de constituer des chefs-d'œuvre en la matière. Par conséquent, leur utilité ne dépasse pas le cadre d'un championnat local dont les règles de déroulement s'éloignent visiblement de ce qui se fait ailleurs. La qualité des pelouses de nos stades laisse manifestement à désirer. Le dernier match à domicile des Verts dans les éliminatoires jumelées de la CAN et du Mondial 2010 contre le Sénégal en a offert la parfaite illustration avec l'état de délabrement dans lequel se trouvent nos arènes sportives. Il a fallu la mobilisation de toutes les autorités de la ville des Roses pour soigner la pelouse du stade, qualifiée d'impraticable par le sélectionneur national quelques jours avant le coup d'envoi de la partie. Le message ne souffrait aucune équivoque : les terrains de nos stades sont laissés à la merci de la nature. Il faudrait donc passer à un autre niveau de responsabilité pour espérer voir ces réalisations tenir plus longtemps. Pour s'en convaincre, il suffira de tenter un déplacement entre le stade de Blida et celui de Radès, dans la capitale tunisienne. Le premier donne déjà des signes de vieillissement alors que le second séduit encore par la qualité de son architecture et sa tenue. La raison est toute simple : la pelouse principale du stade Radès n'est pas utilisée quotidiennement comme c'est le cas en Algérie. Elle sert seulement aux grands matches du championnat national. En plus, évidemment, des rencontres, amicales et officielles, de la sélection nationale. Sans oublier, bien entendu, le fait que le terrain principal est entouré d'une dizaine de terrains de réplique. En Algérie, la réalisation de stades en mesure d'abriter les grandes manifestations n'a été que rarement accompagnée de terrains de réplique. La seconde option qui s'offre à l'Algérie est celle d'oser présenter un dossier «théorique» pour l'organisation de la Coupe d'Afrique des nations et de mobiliser par la suite beaucoup de moyens pour être à jour. Il n'est pas nécessaire ici d'aller chercher un exemple sur le Vieux continent. Il nous est servi au cœur de l'Afrique. Il nous vient du Gabon, qui consacre une enveloppe de 213 millions d'euros, en perspective de la coupe d'Afrique des nations, qu'il organisera en 2012 conjointement avec la Guinée équatoriale. L'annonce a été faite par le ministre de la Jeunesse et des Sports, qui promet au passage de relever le défi. «Les besoins ont été estimés à environ 140 milliards de FCFA pour des projets d'infrastructures sportives et hôtelières devant être construites ou réhabilitées dans l'optique de cet événement majeur et de haute portée nationale», est-il relevé dans le communiqué du Conseil des ministres sanctionnant sa dernière réunion.
Mobilisation générale Le ministre gabonais a néanmoins voulu mettre la pression sur ses collègues du gouvernement. Il a ainsi demandé à tous les autres ministères impliqués à divers degrés dans l'organisation de la CAN d'«évaluer les investissements et les actions concernant leurs secteurs respectifs». Pour lui, le Gabon a, comparativement à la Guinée équatoriale, pris du retard dans ses projets pour la CAN, sans que cela soit jugé inquiétant pour le moment. A la lecture de la situation qui prévaut au Gabon en matière d'infrastructures sportives et les préparatifs qui sont en marche à quatre ans du grand rendez-vous footballistique, il y a des raisons à ce que les Algériens se posent des questions. L'Algérie a-t-elle peur d'organiser la CAN ? N'a-t-elle plus les moyens de le faire ? Au-delà de toutes les carences qui pourront entacher notre organisation, force est d'admettre qu'elle est largement en mesure d'assurer une organisation correcte. Les récentes éditions du grand événement biennal du football africain sont manifestement loin d'impressionner. A l'image de ce qui a été réalisé par le Ghana lors de la dernière édition, l'Algérie peut largement faire mieux. Il ne faudrait pas néanmoins se contenter de l'image. Organiser une telle compétition avec toutes ses exigences devrait constituer une étape charnière dans la vie du sport du pays. Dans ce chapitre, le modèle allemand s'impose encore une fois. L'étude annuelle du cabinet de conseil et perspectives du football professionnel 2006 souligne que dans ce pays «un club sur deux des 1er et 2e divisions aura bénéficié d'une nouvelle enceinte depuis 2000». L'étude ajoute qu'il s'agit «de stades compacts, sans piste d'athlétisme, avec des gradins proches du terrain, de grands écrans et des systèmes audiovisuels modernes.» La référence en la matière est Veltins Arena, à Gelsenkirchen, une ville de 278 000 habitants où évolue Schalke 04, qui compte 48 000 abonnés. Dans le cas de l'Algérie, tout porte à croire que les dirigeants actuels ont peur d'évoquer le sujet. Aussi bien au ministère qu'au niveau de la Fédération algérienne de football, on n'ose pas y penser. Pas par appréhension. Mais plutôt par rapport aux conséquences qui découleront d'un tel défi. Dit clairement, si l'Algérie postule à l'organisation de la CAN, le pays aura besoin d'instances et de cadres à la mesure de l'événement. Ce qui signifierait la fin des dirigeants actuels, incapables d'organiser un match de coupe d'Algérie. Maintenant que l'Algérie n'est pas loin de participer à la CAN après deux absences consécutives, il faudra réfléchir à l'organisation de la compétition. La CAN 2014 à Alger ? C'est jouable. A. Y.