De notre correspondant à Constantine A. Lemili Les représentants des pouvoirs publics se sont déplacés en masse dans la matinée d'hier au siège de l'EPCA Khroub.Il y avait de quoi ! Les centaines de niches à ordures réparties à travers le chef-lieu de la commune et celles des cités périphériques, dont une partie de la nouvelle ville Ali Mendjli, n'ont pas été débarrassées depuis samedi dernier. La raison ? Le mécontentement des 229 agents, toutes activités confondues, d'une part, quant à leur misère sociale et, d'autre part, les dépassements et plus particulièrement les passe-droits et abus de pouvoir par lesquels se signalait une partie du staff directionnel. Il y a lieu de signaler qu'un premier arrêt de travail a eu lieu au lendemain du mois de Ramadhan et a vite été étouffé suite aux engagements pris par le conseil d'administration de l'EPCA de répondre aux revendications des travailleurs. Mais, au-delà des revendications salariales et autres améliorations des conditions de travail, les grévistes avaient exigé le départ du directeur et de trois de ses collaborateurs accusés de «conduire l'entreprise à sa perte par une mauvaise gestion criante», pour ne pas dire littéralement de dilapidation de biens publics, à l'image de l'arrêt pour cause de panne de la moitié des camions de ramassage. Une panne imputée à l'inertie des cadres précédemment évoqués qui ne se souciaient pas des demandes formulées par le personnel technique quant à l'entretien des engins et, le cas échéant, atermoyaient quand il s'agissait de procéder à leur réparation. Autrement dit, les bons de commande n'étaient pas signés, l'argent n'étant pas disponible. Une situation qui réduisait drastiquement la capacité d'intervention du personnel sur les sites et, ce faisant, augmentait la masse des ordures tout en leur rendant la tâche difficile. La situation a, face au mutisme du CA, empiré et les travailleurs, qui avaient essuyé un refus concernant la tenue d'une AG avec le même conseil, ont décidé de durcir leur attitude et ont déposé un préavis de grève dans les règles. D'où le déplacement du P/APC, du chef de Sûreté de daïra, du SG de l'APC et des cadres de l'union locale de l'UGTA. Précisons qu'entre-temps, les cadres dénoncés par les travailleurs avaient été éloignés momentanément (placés en congé de détente d'office pour quelques semaines) et un directeur par intérim désigné, sauf que ce dernier ne pouvait accéder à aucun des bureaux, notamment celui de son prédécesseur et le bureau du personnel et des moyens généraux. Autant dire qu'il était à la rue et ne servait pratiquement à rien. C'était un moyen comme un autre pour les membres du CA de renvoyer sine die le problème, à plus forte raison parce que, selon les syndicalistes de l'EPCA, le nœud du problème est politique. «Le directeur mis en congé est un élu FLN, ledit parti est majoritaire au sein de l'APC par la grâce d'un seul siège. Or, il se murmure ici et là que, si jamais le directeur était obligé de quitter son poste, Y. Hamdani, le maire qui est aussi président du CA, pourrait à son tour vaciller dans son poste compte tenu de la précarité des équilibres au sein de l'assemblée.» En tout état de cause, le maire a été pratiquement renvoyé des lieux et aucune des propositions qu'il a lancées à l'endroit des travailleurs n'a été acceptée. Celui-ci avait même été traité de «menteur» et, pis, accusé de «collusion avec des intérêts privés extérieurs qui se verraient bien attribuer le marché [très juteux] du ramassage des ordures. Nous pouvons affirmer aujourd'hui que certains ont même acquis les équipements nécessaires». Une situation qui a conduit les syndicalistes à solliciter la désignation d'une commission d'enquête que le chef de Sûreté de daïra a évacuée du revers de main en soulignant toutefois que «cette commission d'enquête, c'est nous qui allons l'exiger». C'est dire que ce dossier est brûlant et risque de l'être encore plus sachant que les travailleurs ont refusé de reprendre le travail et en appellent à l'arbitrage du wali quant à la situation administrative de l'EPCA qui relèverait de l'APC dès qu'il s'agit de réviser celle (situation administrative) des travailleurs au motif qu'ils relèvent de la fonction publique et sont donc tributaires de son seul statut mais qui passe au stade d'Entreprise publique à caractère industriel et commercial (EPIC) dès qu'il est question des avantages que s'octroient les cadres dirigeants. A titre comparatif, les syndicalistes nous citeront, entre autres avantages en nature, le salaire du directeur qui est de «85 000 DA», en aucun cas comparable avec celui du chef de service (14 000 DA). En conclusion, il existe beaucoup d'incohérences dans une entreprise où il y a une absolue nécessité de recadrer la gestion et sans doute l'asseoir sur des normes plus humaines au profit de travailleurs dont les tâches sont pénibles et dangereuses. En attendant, les centaines de tonnes d'ordures auxquelles vont s'en ajouter d'autres continueront à servir de décor à la ville et à ses environs.