De notre envoyé spécial à Bordj Bou Arréridj Smaïl Boughazi Alors que le fossé s'agrandit de plus en plus entre le nord et le sud du globe en matière de technologie de pointe, en Algérie une tendance d'évolution commence à voir le jour mais elle est timide et en est à ses tout premiers pas. Les unités qui se sont orientées vers les industries dites de pointe et l'électronique commencent à connaître un véritable essor et à fleurir comme des champignons. Qu'elles soient dans la production électronique ou de l'électroménager, ces unités arrivent, malgré le retard flagrant, à percer, voire suivre une évolution exponentielle qui n'est pas souvent facile. 70 % des appareils du marché sont produits ou montés localement L'industrie électronique qui a vu ses premiers jours dans la wilaya de Bourdj Bou Arréridj arrive tant bien que mal à suivre le train de l'évolution. Ils sont, ainsi, pas moins de 17 opérateurs à choisir un coin au sein de la zone industrielle de BBA. Ils contribuent à hauteur de 70 % des parts du marché, en algérie. Certaines unités, qui ont pu, en un laps de temps court se faire un nom et créer une marque et même gagner une clientèle, arrivent ces dernières années à conquérir certains marchés maghrébins mais aussi européens. Les industriels qui ont bien voulu partager leurs opinions et soucis avec nous n'ont pas été avares en informations, connaissances et même suggestions. Les uns déplorent, les autres aspirent et entre les deux parties, il y a ceux qui ne sont guère satisfaits de l'état des lieux. Les produits électroménagers qui envahissent nos marchés sont, en grande partie, issus d'une production locale ou d'un montage, selon les chiffres des différents responsables rencontrés. Ce qui démontre une vérité jusque-là méconnue. En fait, l'on pense que tous les produits nous proviennent de Chine ou généralement de l'étranger. Même s'il y a une part de vérité dans tout cela, la production nationale accapare, à elle seule, des parts importantes. Il suffit de prononcer le mot El Bordj pour que le réflexe pavlovien nous renvoie au téléviseurs, récepteurs numériques, machines à laver et réfrigérateurs de toutes marques arrivant de cette wilaya qui a su se faire un nom et une vocation comme tiennent à l'affirmer les différents responsables des unités qui activent dans ce créneau. Les marques le plus connues sur le marché, de l'avis du premier responsable de la zone industrielle, sont Condor, Cristor, Sentrax, Cobra, etc. Pour connaître les dessous de ces industries fleurissantes, nous avons approché certains industriels qui représentent ces marques. Leurs avis quant à nos nombreuses questions différent. Leurs avis sont même contradictoires. Une question très pertinente revient dans leur bouche. Les taux d'intégration de ces industries ? une pluie de pourcentage nous a envahi. 25, 51, 70%, etc. Les chiffres sont des plus contradictoires. Taux d'intégration : à chacun ses chiffres Ainsi, pour le responsable commercial de la marque Cristor, M. Belgacem, le taux d'intégration est selon la complexité de chaque appareil. Certains produits ont atteint un taux d'intégration avancée, soit près de 70 %. En nous exhibant le dernier-né de la marque, notre locuteur nous dira qu'il est produit à plus de 80 % en Algérie. C'est un exemple pour lui de l'évolution et même de l'autonomie des unités de cette marque. Cela pour dire que la production est locale et n'est dépendante d'aucune autre marque. Pour un autre responsable de la marque Sentrax, M. Allab, les choses sont différentes. Exemple, le tube cathodique d'un téléviseur représente, à lui seul, 51 % du taux d'intégration. «Nous sommes loin de parler de la production locale à 100 % ou de parler de 70 ou 80 % de taux d'intégration. Nous n'avons même pas les moyens de fabriquer certaines composantes électroniques. Actuellement, il y a cinq constructeurs au niveau mondial qui font ce travail», tonne-t-il. Vu ces chiffres, il n'a pas hésité un instant à poser la question suivante : qui pourra produire une telle composante en Algérie ? Mettant toutes les versions et avis de côté, il avoue qu'en Algérie, le secteur de l'industrie est porteur mais une mise à niveau de ces unités est fortement nécessaire. Une mise à niveau qui doit toucher le secteur de fond en comble et pas seulement le volet administratif, comme le souligne le responsable de la marque Sentrax. Adapter les formations universitaires Même son de cloche ailleurs. Une assistance des pouvoirs publics doit se faire incessamment. Les mises à niveau administratives, c'est peu pour eux, insistent-ils. Les industriels évoquent, en d'autres termes, le problème de transfert des technologies. Pour eux, il s'agit des formations universitaires qui doivent être au diapason de l'actualité technologique. Pour ce faire, tous nos interlocuteurs s'accordent à dire que les formations théoriques ne suffisent pas, il faut qu'il ait des formations pratiques. «Nous recrutons des ingénieurs, mais une fois sur place, il leur manque le plus important, la pratique» se désole un responsable de la marque Sentrax. Les industriels évoquent, aumême titre, l'absence de facilités et d'assistance de la part des pouvoirs publics, notamment ce qui concerne la mise à niveau, la lutte contre l'informel et la contrefaçon qui font rage, actuellement, dans notre pays. A travers leurs différentes déclarations, il ressort que les produits chinois sont devenus un rempart à leur développement. Faut-il suivre les chinois ? Toutefois, pour ne pas dire que tout est au noir. L'un des industriels estime que les avancées sont remarquables et les chinois qui ont pu en quelques années changer les donnes étaient dans cette étape au départ. «Les chinois, avant qu'ils produisent localement toutes les composantes, avaient monté leurs produits et copié des autres» affirment notre vis-à-vis. Approché afin de connaître son avis à propos de cette question le directeur général de la zone M. Babouche Lamri, a estimé qu'il y a eu une reconversion de ces industriels. Au départ, c'étaient des importateurs de ces produits, mais maintenant, nombre d'entre eux ont pu monter leurs propres unités et se sont consacrés à la production ou au montage. Il reconnaît, pareillement, que le taux d'intégration évolue régulièrement, et même qu'il y a des produits qui sont fabriqués localement à hauteur de 80 % s'intégration. Le boom de l'électroménager en régression Le volet commercial a été aussi au menu puisque les opérateurs ont à l'unanimité déplorer l'absence d'une culture de consommation et la concurrence déloyale qui fait rage au sein de nos étals. «Un téléviseur de 55 cm à 8 000 Da, c'est dérisoire» peste l'un d'eux. Nous fabriquons et nous consentons un effort remarquable mais en fin de compte, la marchandise se retrouve prisonnière pour de longues durées dans les magasins. Pourquoi ? C'est compliqué, résume notre locuteur. «Car les commerçants en premier lieu n'ont pas la culture de vendre, pour eux, il n'y a que le gain qui compte. Ceci nous a énormément affaiblis», analyse-t-il. Les produits chinois sont partout. que peut un industriels ou un commerçant ? s'interroge un autre. En somme, les opérateurs, reconnaissant les affres de la contrefaçon, souhaitent des «mesures draconiennes» pour endiguer ce phénomène. Toujours dans le même registre, certains, en évitant de nous communiquer des chiffres, ne cachent pas qu'ils ont pu conquérir certains marchés extérieurs notamment en ce qui concerne les récepteurs numériques. Nouvelle zone industrielle : 134 dossiers d'investissements qui ont été, déjà, agréés Sur autre sujet, le Dg de la zone industrielle a dit que la nouvelle zone industrielle qui sera réalisée à Mechta Fatima, pour laquelle le permis de lotir est fin prêt, générera quelque 12 000 emplois et permettra à quelque 134 dossiers qui ont été, déjà, agréés par le CALPIREF de s'installer dans cette zone. Evoquant la situation de la zone actuelle, le DG estime qu'elle est une zone moyenne d'une superficie de 180 ha. 105 opérateurs y activent, dont 50 en activité, 34 en cours de réalisation et 16 opérateurs à l'arrêt pour des raisons diverses, notamment des entreprises étatiques dissoutes. En évoquant la question de l'intégration des unités industrielles, il nous avouera que les groupes Condor et Cristor ont atteint un taux d'intégration avoisinant les 80 % pour certains produits, notamment les machines à laver et les réfrigérateurs. Pour exemple, il nous dira que, la fabrication des frigidaires a atteint un taux d'intégration élevée. Il n'y a que les compresseurs qui sont importés, a-t-il assuré. Outre l'industrie électronique, notre interlocuteur nous affirme que d'autres industries sont en place, notamment les matériaux de construction et l'agroalimentaire. La zone industrielle emploie quelque 3 800 employés et connaît une activité intense ; pour preuve, le Dg a aussi souligné qu'en moyenne pas moins de 2 250 véhicules y entrent. Il y a lieu de signaler aussi que la wilaya, selon le dg, fait partie des wilayas pilotes, aux côtés d'autres wilayas limitrophes, pour la création d'une zone de développement industriel intégré ZDI. Un projet en maturation au niveau du ministère de l'industrie, ajoute M. Babouche Lamri.