A la lecture des chapitres budgétaires inscrits dans la loi de finances 2009, il est très facile d'observer le niveau et le classement consacrés aux dépenses du département ministériel en charge de la culture. Le volume financier est dérisoire, pathétique et indexe parfaitement la perception qui est faite du champ culturel, des arts dans toutes les disciplines et dans tous les domaines. La puissance publique sur les volets des aides à la création, de la diffusion à l'interne et à l'étranger, de la conservation et de la restauration d'un ensemble de patrimoines a beaucoup de responsabilités. Ces dernières s'exercent par la réglementation, la législation (projets de loi), et essentiellement par des sommes d'argent en monnaie nationale et en devises au service de la culture nationale, de la formation et du fonctionnement de ce qui relève de l'Etat. Ce dernier, au plan culturel, ne manifeste ni cohérence ni vision à long terme et encore moins une volonté politique audacieuse et conquérante. Comme pour une administration basique, on exécute des tâches quotidiennes, on verse des salaires et on organise des manifestations, toujours les mêmes avec les même mécanismes, avec les mêmes inaugurations «rehaussées» par la présence d'officiels et par des discours des années soixante-dix. L'exemple de la Cinémathèque algérienne révèle plus que tout le statu quo et l'inertie. L'Algérie a plus d'espaces baptisés «cinémathèque» que n'importe quel pays hyperdéveloppé, gros producteur de films (plus de cent chaque année), détenteur de dizaines de chaînes de télévision (publiques et privées) avec un développement grandissant de diffusion d'œuvres cinématographiques sur Internet et par téléphonie mobile. Cette situation, qui avait des justifications et des motivations dans les années soixante-dix, dans des contextes politiques national et international bien connus, est totalement obsolète et archaïque aujourd'hui. Un musée du cinéma peut être comparé, avec des précautions évidentes, à un musée tout court. La nature de la restauration, de la conservation et de la diffusion propre à un musée dédié au septième art n'a rien, strictement rien, à voir avec n'importe quelle forme de cinéma. Or, qu'est-ce qui différencie physiquement, au niveau des personnels, de la programmation, du statut des salariés, une salle commerciale en Algérie d'une autre présumée «cinémathèque» ? Rien. Certains salariés le sont d'un ministère, d'autres d'une APC, et la programmation répond à des conjonctures, à des anniversaires liés à la guerre d'Indépendance… Une cinémathèque se différencie des autres dans le monde par la richesse de sa collection, par la qualité des espaces de restauration et de conservation, par ses incunables jalousement préservés que viennent consulter des chercheurs privilégiés dans de petites salles conçues pour la chose, par des tirages de copies, etc.) A notre première visite à la Cinémathèque de Budapest, sous le socialisme, les nombreux journalistes étrangers parmi lesquels nous étions, se demandaient s'il ne fallait pas enlever ses chaussures durant la visite. Alors, n'est-il pas venu le temps de réfléchir sérieusement à un véritable musée du cinéma et cesser d'avoir plus de «cinémathèques» que la Russie, la France, l'Italie ou l'Espagne… ? A. B.