Le Conseil des Gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) a adopté jeudi une nouvelle résolution contre l'Iran pour son programme nucléaire controversé. Téhéran est soupçonné de développer l'arme nucléaire et accusé de manquer de volonté pour négocier sérieusement avec les puissances nucléaires, occidentales, dans le cadre de l'Aiea et sous l'égide de l'Organisation des nations unies (ONU). Les sanctions de l'Aiea, lors de sa réunion à son siège à Vienne, en Autriche, ont quelque chose qui ressemble à du chantage à l'encontre de l'Iran qui n'est pas le seul à se doter d'un programme nucléaire dans cette région fort instable. Car, à côté, Israël dispose ouvertement d'une industrie nucléaire, militaire dont on ignore tout. Mais ni les pays arabes, membres de l'Aiea ni les pays occidentaux ne se montrent intéressés par le programme de Tel-Aviv qui demeure un véritable secret de polichinelle. Plus à l'Est, le Pakistan poursuit sa course au nucléaire avec son voisin indien sans être nullement dérangé. Pourtant, cet arsenal nucléaire risque de tomber à n'importe quel moment entre les mains des islamistes qui ne désespèrent pas de prendre le pouvoir à Islamabad qu'ils accusent de servir les intérêts des Etats-Unis et de ses alliés occidentaux. Washington sait aussi que c'est l'ISI, les puissants services de renseignements pakistanais qui sont derrière la création des Talibans. Qu'est-ce qui justifient les sanctions à répétition de l'Aiea à l'encontre de l'Iran ? Au-delà de cette présumée menace nucléaire, iranienne, cette pression permanente et qui monte depuis quelques mois contre Téhéran trouve ses racines dans un schéma plus complexe. Tout le monde est d'accord pour dire que l'Iran sera attaqué militairement par Israël et ses alliés occidentaux, à leur tête les Etats-Unis, mais aucune date n'a encore été fixée pour le moment. L'acharnement de l'Aiea sur l'Iran est accompagné d'une campagne de médiatisation qui participe de la même logique qui a justifié l'invasion de l'Irak et de l'Afghanistan. Israël et les Etats-Unis tentent de gagner l'adhésion de leur opinion publique à une éventuelle attaque militaire contre les installations nucléaires iraniennes par le biais d'une médiatisation à outrance de cette question. Il faut noter que derrière toute sanction contre Téhéran, aussi bien au niveau de l'Aiea qu'à l'Onu, on retrouve une initiative des puissances occidentales, parfois aidées par les pays arabes de confession musulmane, sunnite et dont la haine du chiite iranien est plus que légendaire. Par ailleurs, il ne faudrait pas perdre de vue les bouleversements politiques que connaît le monde arabe, notamment la péninsule arabique, depuis janvier 2011. Téhéran est ouvertement accusé de soutenir les communautés chiites au Bahreïn, en Arabie saoudite, au Yémen, le régime de Bachar al-Assad en Syrie et le Hezbollah libanais que les Américains considèrent comme une organisation terroriste. En multipliant les pressions diplomatiques sur l'Iran, l'Occident tente d'isoler Téhéran et de minimiser son influence dans ces pays, tous voisins d'Israël. Et Israël a besoin d'être entouré de pays affaiblis pour assurer sa survie. Mais on dira que l'Irak est gouverné aujourd'hui par les chiites qui représentent plus de 65% de la population totale. L'Irak fait partie de ce qui est communément appelé le Croissant chiite et dont font partie le Bahreïn, le Liban et la Syrie. Cela ne suffit toutefois pas pour décréter que les chiites irakiens sont proches du régime des Khamenei iraniens. Et puis, lorsqu'on opère un petit retour dans le passé, c'était plutôt les sunnites qui représentaient un danger pour les Etats-Unis et l'Etat israélien. Pour cela, les Etats-Unis qui encerclent avec leurs bases militaires l'ensemble du territoire iranien se sont alliés à l'Arabie saoudite pour diaboliser Téhéran. L'Arabie saoudite cherche aussi à imposer son hégémonie dans la région, tout comme le Qatar qui s'est également positionné dans la péninsule grâce à ses choix politiques qui correspondent aux intérêts américains et européens. Pour s'assurer une meilleure place sur l'échiquier géopolitique régional, l'Arabie saoudite et le Qatar ont déclaré une guerre sans merci contre le chiisme iranien. Cette guerre sunnite-chiite joue évidemment en faveur de Tel-Aviv qui ne souhaiterait pas voir la dominance d'un courant sur un autre. Aussi, il ne faudrait pas oublier le voisin turc qui a également des ambitions sur ce territoire où seule une instabilité «maîtrisée» des pays voisins d'Israël constitue la seule garantie pour Tel-Aviv. En résumé, les Occidentaux jouent toutes les cartes en même temps pour isoler et affaiblir diplomatiquement l'Iran et garantir la sécurité et la pérennité de leurs intérêts économiques tout en sauvegardant leur position sur le plan géopolitique. L. M.