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Les essais historiques et les romans algériens attirent de plus en plus de lecteurs Malgré le rush traditionnel sur les livres religieux, de cuisine et parascolaires
Photo : M. Hacène Par Sihem Ammour Mardi dernier, le flot des visiteurs est toujours aussi important au niveau de la Safex, à l'occasion du 17e Salon international du livre d'Alger, avec notamment la présence de nombreuses familles accompagnées d'enfants heureux de participer aux différentes animations conçues spécialement pour eux. Au niveau du pavillon Casbah, les livres religieux, de cuisine et le parascolaire connaissent toujours un grand engouement. Mais au détour d'une allée, le stand des éditions El Kalima et Marsa, proposent sur leurs étals une riche collection d'auteurs algériens et de livres d'histoire à des prix variant entre 200 et 300 DA. Fondée il y a trois ans, la maison d'édition El Kalima participe pour la première fois au Sila, au côté des éditions Marsa. Naïma Beldjoudi, responsable d'édition explique qu' «El Kalima, c'est la petite sœur de Marsa. C'est un projet qui me tenait vraiment à cœur. Grâce à l'expérience que j'avais capitalisée avec Marsa j'ai pu réaliser ce rêve qui me taraude depuis des années. Je tiens à préciser que lorsque l'on a fait l'école Marsa on ne peut que promouvoir la culture et la littérature algériennes. J'ambitionne aussi de faire une collection de beau livre consacrée à nos plus belles régions à l'instar de celui que je présente pour la première fois dans le cadre du Sila : Tiaret, Mémoire-miroir, d'Ahmed Benkhodja». C'est dans cet esprit que, dans le cadre du Cinquantenaire, la jeune maison d'édition prépare la publication de toute une série d'ouvrages dédiées à l'histoire et aux sciences humaines, dont le ton est d'emblée donné par Les enfumades de la Dahra, d'Amar Belkhodja, dans lequel il dénonce le génocide commis par l'armée coloniale sur plus d'un millier de femmes, d'enfants, d'hommes et de personnes âgées de la tribu de Ouled Ryah. La maison d'édition a également rendu hommage à Halim Mokdad, à travers un ouvrage dédié spécifiquement à un reportage qu'il avait effectué dans la région de Berrouaghia, où il revient pour décrire d'une façon poignante les massacres commis par le colonialisme français. De même un ouvrage intitulé, Des arts et des artistes, dédié à des artistes de l'Oranie qui ont mis leur art au service de la lutte de la libération nationale, notamment à travers l'écriture, le théâtre, la musique et le chant. L'éditrice annonce qu'il y a aussi une dizaine de projets s'inscrivant dans le cadre de la célébration du cinquantenaire. Amar Belkhodja présent au stand pour dédicacer ses livres confie que «l'histoire locale est indissociable de l'histoire nationale, c'est un ensemble d'événements qui a contribué à renforcer le mouvement national. A titre d'exemple, je voudrais rappeler que l'une des premières cellules du PPA a été créée dans la ville de Tiaret en 1936. Ce sont des choses qui sont tombées dans l'oubli et occultées de la mémoire nationale». Estimant qu'il y a un plus grand intérêt de la part des jeunes pour les livres d'histoire afin de répondre à leurs questionnements sur des pans encore méconnus, il souligne qu'au-delà de l'aspect commercial, le Salon est avant tout un moyen pour les auteurs de rencontrer les lecteurs.
Les auteurs algériens de plus en plus courtisés Dans le genre littéraire, une vente dédicace se déroulera aujourd'hui à partir de 14 heures au niveau du stand, avec l'écrivain Belkacem Rouache qui présentera son dernier livre L'homme qui regarde la mer où il exorcise la mort tragique de sa femme et de son fils. L'éditrice d'El Kalima, explique pour sa part qu' «il existe un lectorat qui vient essentiellement pour le roman et la littérature de façon générale, mais aussi pour les livres dédiés à l'histoire. Parmi cette catégorie de lecteurs, il y a de plus en plus de jeunes qui sont curieux de découvrir la littérature algérienne». Elle ajoute : «Je pense que mon devoir en tant qu'éditrice n'est pas seulement de vendre mais aussi de les guider et les conseiller dans leur choix de leur livre de chevet. Ce qui m'impressionne chez cette catégorie de lecteurs, c'est leur façon de voir et de feuilleter les ouvrages avec émerveillement.»A propos des rachats des droits et de la coédition, elle rappelle que les éditions Marsa étaient précurseurs dans ce domaine, et que dès le début des années 2000, ils avaient réussi à racheter les droits de plusieurs auteurs algériens publiés par des maisons d'édition françaises. Elle confie à ce propos : «Ce n'était pas facile à cette époque mais on a réussi à le faire parce qu'il était important pour nous, en tant qu'éditeur algérien, de nous réapproprier nos auteurs et les rendre accessibles aux lecteurs algériens. Pour réussir cela, on avait lancé la formule du livre de poche où de grands auteurs algériens inaccessibles, du point de vue prix et même de disponibilité sur le marché national, deviennent accessibles, grâce à cette formule le dernier Anouar Benmalek, ou les romans Un cœur insulaire et L'Enfant de jade devenaient disponibles au prix de 200 DA. Aujourd'hui d'autres maisons d'édition s'intéressent de plus en plus au rachat des droits d'édition, d'autant plus que le contexte actuel est plus favorable avec l'implication du ministère de la Culture, afin de contribuer à ce que les Algériens puissent goûter à la joie de la lecture des œuvres de leurs compatriotes.»De son côté, la maison d'édition El Dar El Ohana, présente de nouvelles publications dans le genre littéraire et essai, abordant notamment des personnalités de l'histoire de l'Algérie à l'instar de l'essai de Khaled Mersouk intitulé Messali El hadj et ses compagnons à Tlemcen, récits et anecdotes de son époque 1898-1974 et celui de Hocine Mezali «Ferhat Abbas, un homme, un visionnaire»
Les pans méconnus de l'histoire attisent la curiosité des jeunes A ce propos l'auteur, présent pour une vente dédicace, souligne : «Je le considère comme un grand homme, c'est celui qui a formulé l'avenir de l'Algérie dans la démocratie et non pas en dehors. Durant toute sa vie il a défendu la démocratie et s'il est mort à un âge où il aurait dû vivre davantage, c'est parce qu'autour de lui il n'y avait pas beaucoup de démocratie.» Il ajoute sur la personnalité de Ferhat Abbas et de son engagement pour l'Algérie : «C'est un homme qui, malgré les anathèmes que l'on a pu lui jeter dans son dos parce qu'il avait prononcé une phrase datant des années et qui avait été sorti de son contexte et mal interpréteé par les Algériens, a toujours été droit comme un I dans son engagement anticolonial et pour défendre la démocratie. Je le considère comme un visionnaire, car fidèle à ses principes. En 1963 il a démissionné de l'Assemblée quand il a vu que Ben Bella se présenter au pouvoir sous le sceau du parti unique, empêchant ainsi les autres Algériens de parler. D'ailleurs dans sa lettre de démission et l'argumentation où il justifie sa démarche, il avait prévu tous les malheurs qui allaient tomber sur l'Algérie si on muselait l'expression démocratique du peuple.» Sur un autres registre, la maison d'édition Adam, qui existe depuis 2002 en France et à Londres, et qui s'installe pour la première fois en Algérie participe pour la première fois au Sila. Spécialisée en littérature, elle offre un large panel d'ouvrages dédiés aux romans et essais d'auteurs internationaux traduits en français. La collection «Le cercle des poètes disparus», clin d'œil au film éponyme est dédiée aux biographies des grands poètes français, anglais, italiens américains, espagnols et bien sûr algériens. La collection est composée, actuellement, de plus d'une vingtaine d'ouvrages, dont ceux dédiés à René Char et Oscar Wilde, écrits par des spécialistes qui proposent une étude sur la vie et l'œuvre de ces deux auteurs. La représentante des éditions Adam confie : «Nous venons à peine de nous installer en Algérie et on n'a pas eu le temps d'inviter ces spécialistes dans le cadre du Sila, mais on espère organiser prochainement des rencontres littéraires à Alger et dans d'autres villes d'Algérie pour faire connaître la collection.»