Président de la République: l'Algérie a parachevé la construction d'un système judiciaire républicain, fort de la confiance du peuple    Clôture du séjour de découverte technologique en Chine pour 20 étudiants    La gestion des archives dans le secteur de la santé et la transition numérique, thème d'un séminaire à Alger    L'expertise du groupe public de construction ferroviaire contribuera à la réalisation des mégaprojets dans les délais (PDG)    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 44.235 martyrs et 104.638 blessés    Attaf reçoit le président de la Commission de la sécurité nationale et de la politique étrangère du Conseil de la Choura islamique iranien    La transition numérique dans le secteur de l'enseignement supérieur au centre d'un colloque le 27 novembre à l'Université d'Alger 3    Hand-CAN- 2024 dames: départ de l'équipe nationale pour Kinshasa    Oran: ouverture du 14e salon des énergies renouvelables "ERA" avec la participation d'une centaine d'exposants    Les incendies de forêts atteignent en 2024 l'un des plus bas niveaux depuis l'indépendance    Concert musical en hommage à Warda el Djazaïria à l'Opéra d'Alger    Liban: Josep Borrell réaffirme le soutien de l'UE à la FINUL    Le Président de la République préside l'ouverture de la nouvelle année judiciaire    Arrivée du Président de la République au siège de la Cour suprême pour présider l'ouverture de la nouvelle année judiciaire    Sonatrach : lancement d'un concours national de recrutement destinés aux universitaires    Président colombien : « Le génocide à Gaza est un message d'intimidation envers les pays du Sud »    Organisation d'une journée d'étude sur l'entrepreneuriat en milieu universitaire    Tebboune ordonne aux membres du Gouvernement de préparer des plans d'action sectoriels    Les joueurs mouillent-ils leurs maillots ?    Ligue 1 Mobilis : la LFP fixe les dates de la 11e journée    Belaili sauve l'EST de la défaite contre Ben Guerdane    Lettre ouverte A Monsieur le président de la République    L'Algérie révise partiellement sa politique des subventions des prix du gaz naturel pour les industriels    La Bolivie exprime son soutien au mandat d'arrêt contre Netanyahu et Gallant    Lettre ouverte A Son Excellence, Monsieur le président de la République    Quarante-cinq lotissements sociaux créés à travers plusieurs commune    Opération de dépistage du diabète    Des artistes illustrent les horreurs de Ghaza    Deux artistes algériens lauréats    Commémoration du 67e anniversaire de la bataille de Hassi-Ghambou dans le Grand erg occidental    Lettre ouverte A Son Excellence, Monsieur le président de la République    Canoë - Kayak et Para-Canoë/Championnats arabes 2024: l'Algérie sacrée championne, devant l'Egypte et la Tunisie    Tunisie: ouverture des Journées Théâtrales de Carthage    Tlemcen: deux artistes d'Algérie et du Pakistan lauréats du concours international de la miniature et de l'enluminure    Le président de la République préside la cérémonie de prestation de serment de la nouvelle Directrice exécutive du Secrétariat continental du MAEP    L'ANP est intransigeante !    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Attali et BHL s'en vont en guerre*
Stratèges en chambre ou sur la croisette
Publié dans La Tribune le 14 - 12 - 2012

Le petit club des penseurs-stratèges et des intellectuels se prenant pour des chefs d'état-major s'élargit à mesure que s'aggrave la crise syrienne : à l'instar de Bernard-Henri Levy, auto-auréolé de son épopée libyenne, qui a enjoint ces jours-ci le nouveau pouvoir français de «dépasser le véto sino-russe au Conseil de sécurité» en envisageant une opération armée sans l'aval de l'ONU contre le régime de Bachar al-Assad, voici qu'une autre grande conscience, un autre «sémaphore de la pensée», Jacques Attali, préconise tranquillement une intervention de l'Otan… au Sahel, «avant que l'équivalent du 11 septembre 2001 ne vienne l'imposer».
Sur son blog de l'Express, Attali rappelle que le Mali est aujourd'hui un pays coupé en deux : «Au Sud, un gouvernement provisoire terrorisé par des militaires qui parcourent les rues, envahissent les palais nationaux et menacent les passagers aux aéroports. Au Nord, un territoire très vaste et magnifique, disputé par les terroristes d'Aqmi et des indépendantistes laïcs targuis, qui viennent de s'unir à des islamistes maliens, proclamant l'indépendance d'un “Etat Islamique de l'Azawad”.»
Ce pays, «qui pourrait paraître sans importance, perdu au milieu de nulle part, sans ressources naturelles ni population», constitue en réalité «un problème qui pourrait devenir beaucoup plus important pour notre sécurité que ne l'est l'Afghanistan», estime notre analyste, qui craint que le Mali ne devienne «le point de rencontre de forces maléfiques venues du monde entier». Comme en Colombie, explique-t-il, «on assiste à une collusion entre narcotrafiquants et militants politiques extrémistes. Avec, cette fois, en plus, un fondamentalisme religieux».

Terroristes et kamikazes
Autre donnée du «problème» : cette sécession malienne peut déstabiliser tous les autres pays de la région, laquelle risque de devenir une base arrière de formation de «terroristes et de kamikazes qui viendront s'attaquer aux intérêts occidentaux un peu partout dans la région, et même, par de multiples moyens de passage, en Europe».
«Ils ne sont encore que quelques centaines ; si rien n'est fait, ils seront bientôt plusieurs milliers, venus du Pakistan, d'Indonésie et d'Amérique Latine. Et les gisements d'uranium du Niger, essentiels à la France, ne sont pas loin», poursuit le général Attali. Solutions préconisées : soutenir le gouvernement au sud du Mali, et lancer au nord «une action militaire sur le terrain, avec un appui logistique à distance, des moyens d'observation, des drones et une capacité d'encadrement stratégique». Et le stratège de conclure : «Il sera bientôt nécessaire de réfléchir à mettre en place une coalition du type de celle qui a fonctionné en Afghanistan

Ton comminatoire
Personne ne peut prétendre que la Syrie est perdue au milieu de nulle part, pas même Bernard-Henri Levy qui rêve d'initier cette année à propos de ce pays une opération similaire à celle qu'il estime avoir réussi pour la Libye l'an dernier. «La France fera-t-elle, pour Houla et Homs, ce qu'elle a fait pour Benghazi et Misrata ?», demande-t-il dans une lettre ouverte parue le 30 mai dernier dans plusieurs grands medias, quelques jours après qu'une centaine de personnes, dont près de la moitié d'enfants, ont été massacrés à Houla, dans centre de la Syrie.Sur le ton assez comminatoire qui est sa marque de fabrique, BHL interroge le président François Hollande : «Mais qu'est-ce qui était le plus urgent : aller en Afghanistan préparer le retrait anticipé de nos troupes ou prendre l'initiative en Syrie ? Qu'est-ce qui était le plus important : annoncer la réduction du salaire de vos ministres et le gel du prix des carburants, ou introduire au Conseil de sécurité une résolution autorisant le bombardement des tanks positionnés à l'extérieur des villes, en position de tir ?»

Le plan B de BHL
Invoquant l'urgence, le 30 mai sur Europe 1, l'écrivain va-t-en-guerre a cependant salué le «vrai pas» du président Hollande qui n'avait pas exclu (sur France 2, la veille) une intervention militaire, à condition qu'elle soit autorisée par l'ONU. «Un bon début. Je suis content» même si «ce n'est pas assez…», commentait notre bel intellectuel, soutenant qu'il faut agir même sans l'aval de l'ONU, et ne pas accepter que «deux Etats nous prennent en otages» (La Chine et la Russie).L'habituel chantre de la manière forte a défendu son «plan B» : l'Union européenne et la Ligue arabe appelleraient à «une intervention humanitaire musclée», l'Otan prêtant ses centres de commandement (comme au Kosovo ou en Libye). Il a balayé les objections à propos de réactions en chaîne, en Israël ou au Liban : ce qui est «hasardeux, c'est de laisser Assad en place», «chaque jour qui passe, on augmente le danger islamiste (…) de guerre civile, de déchirement, de tribalisation… ».
En Syrie, «ce n'est pas plus difficile qu'en Libye», pour celui que certains surnomment «Charia express». Sur la croisette, à Cannes, BHL s'est d'ailleurs affiché en compagnie de deux anonymes présentés comme des résistants syriens sortis clandestinement du pays, le visage masqué par le drapeau des «révolutionnaires»…

Le cours de l'histoire
Dans son film Le serment de Tobrouk, lancé à grand battage médiatique, qui sort en salle le 6 juin et relate son action aux côtés des insurgés libyens en guerre contre Mouammar Kadhafi, «la fiction l'emporte largement sur la réalité», estime Pascal Boniface, le directeur de l'Iris, dans une contribution au «Plus» du Nouvel Observateur. «Même les thuriféraires de BHL admettent qu'il en fait un peu trop pour se mettre en avant dans ce documentaire. C'est dire ! Mais le message qu'ils veulent faire passer est de reconnaître sa contribution essentielle et positive au changement du cours de l'histoire dans l'affaire libyenne», ajoute-t-il. Boniface rappelle que Bernard-Henri Lévy avait fortement plaidé pour que l'intervention en Libye ait lieu sans le feu vert du Conseil de sécurité qu'il jugeait impossible à obtenir : «Heureusement qu'Alain Juppé et les diplomates, que BHL méprise, ont obtenu le vote de la résolution 1973 au Conseil de sécurité (…) A suivre la voie proposée par Bernard-Henri Lévy, nous nous serions retrouvés dans la même situation qu'en 1956 lorsque Paris et Londres sont intervenus conjointement à Suez. On se rappelle que ce fut un énorme désastre diplomatique, et à une époque où la suprématie occidentale était indiscutable, ce qui n'est plus le cas.»

Information manipulée
Autre rappel, qui explique les actuelles réticences russes à propos d'une éventuelle intervention en Syrie : le sens de la résolution 1973 avait été modifié en cours de route, «passant de la responsabilité de protéger à celle du changement de régime, bref, une ingérence classique». Si tout le monde peut se féliciter de voir Kadhafi renversé, estime Boniface, les conditions de ce renversement ont eu des conséquences stratégiques importantes et négatives.
«Désormais, il est tout simplement devenu quasiment impossible d'évoquer de nouveau cette responsabilité de protéger. C'était pourtant un concept novateur qui permettait d'échapper à l'alternative ingérence-impuissance. Les Russes et les Chinois, qui ont été dupés après avoir laissé adopter la résolution 1973, s'opposent désormais à ce qu'elle soit évoquée de nouveau. La population syrienne en paye un prix lourd pour le moment», conclut Pascal Boniface qui, après avoir listé les conséquences en chaîne de l'intervention en Libye, exécute le général Levy :
«L'enjeu du débat sur le Serment de Tobrouk ne porte pas seulement sur l'égo puéril et ridicule de BHL. Il porte sur une information respectueuse du public sur des sujets stratégiques essentiels. Le problème de BHL n'est pas qu'il ait l'âge mental d'un enfant de huit ans doté de moyens financiers colossaux lui permettant de réaliser ses caprices. C'est la manipulation de l'information à laquelle il se livre.»
P. L.
*Article paru in le Monde diplomatique de juin 2012


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.