Le président français, François Hollande, a inauguré, jeudi dernier, la nouvelle stèle dédiée à la mémoire du martyr algérien, Maurice Audin. A 13h40, le chef d'Etat s'arrête devant l'œuvre en marbre retraçant, en langues, arabe et française, la vie dramatiquement interrompue du mathématicien militant du parti communiste, algérien. Sous une pluie de pétales de roses, François Hollande lit attentivement le texte encadré par des mosaïques aux couleurs du drapeau national et de la transcription «El Djazaïr» en arabe, texte écrit par l'historien et auteur, Mohamed Rebbah. Rencontré sur place, quelques heures avant l'arrivé du cortège officiel, M. Rebah, ancien élève de Maurice Audin, qui affirme bien connaitre la famille du martyr, rapporte que la principale revendication de la famille est de connaître l'endroit où a été enterré Maurice. «Maintenant, il n'est plus très important de savoir qui est la personne qui a exécuté Maurice Audin. Ce que veulent réellement, Mme Josette Audin et ses enfants, c'est de savoir où a été enterré le corps de leur mari et père», informe-t-il. Maurice Audin est né le 14 juillet 1932 à Béja (Tunisie). Il fit ses études à Alger avant de devenir assistant d'analyse au département de mathématiques de la faculté des sciences d'Alger (de 1953 à 1957). Le jeune Maurice était membre du PCA et militait en faveur de l'indépendance de l'Algérie. Il fut enlevé par les «bérets bleus» du général Massu, le 11 juin 1957, à 23h. Torturé puis assassiné, il est déclaré «disparu» quelques jours plus tard. Il avait 25 ans. Le 4 juillet 1963, la place qui portait le nom du maréchal colonialiste, Louis Hubert Lyautey, fut débaptisée pour devenir la célèbre place Maurice Audin d'Alger.Au début du mois de décembre, dans une missive adressée à Josette Audin, le président français assure avoir «demandé à Jean-Yves le Drian, ministre de la Défense, de la (Mme Audin) recevoir afin qu'il lui remette en mains propres l'ensemble des archives et documents en sa possession, relatifs à la disparition de son mari». Après cet hommage rendu à Maurice Audin, le président français et la délégation qui l'accompagnait s'offrent le deuxième bain de foule de la visite à Alger. Après celui de la veille au boulevard Zighout Youcef, François Hollande a salué la foule, alignée le long de la rue Didouche Mourad jusqu'au portail de la faculté d'Alger, deux artères emblématiques de la capitale, célèbres par leur importance et par le poids des noms qu'elles portent, ceux de deux illustres combattants de la Révolution, membres du groupe des 22 historiques qui ont déclenché la guerre ayant mené à l'indépendance de l'Algérie. Dans un moment nostalgique, François Hollande a tenu à visiter la brasserie de la Faculté, connue sous le diminutif «La Brass.» Jadis, lieu de rencontre des intellectuels, journalistes et étudiants, ce bar-restaurant était le point de chute de l'effervescence intellectuelle, algéroise où le jeune François, alors stagiaire de l'ENA (en 1978) détaché à Alger, venait s'imbiber des valeurs de la Mecque des révolutionnaires.Après ce moment de charme, la délégation a repris son chemin vers l'aéroport international d'Alger, direction la ville de Tlemcen, autre étape de la visite d'Etat du président français en Algérie. S. A.
Josette Audin au journal français «l'Humanité» : le discours de Hollande est «le minimum du minimum» «Je n'apprécie pas du tout son discours qui me semble le minimum du minimum, du minimum de ce qu'il aurait dû faire», a déclaré la veuve de Maurice Audin, ce jeudi, quelques heures après que François Hollande a reconnu, devant le Parlement algérien, les «souffrances que la colonisation française» a infligées au peuple algérien. «C'est tout à fait insuffisant à mon sens. Le mot torture a été prononcé entre deux ou trois autres, mais en passant très vite alors qu'il aurait été bien qu'il ne passe pas sous silence ce genre de choses hautement répréhensibles», a ajouté la veuve du mathématicien communiste, disparu à Alger en 1957, après avoir été arrêté par des militaires français. «Il y a des précédents, le président Chirac a fait une déclaration sur la rafle du Vel d'Hiv', il me semble que Hollande aurait pu faire une déclaration disant : «La République française a commis des actes qui sont injustifiables, la torture, les exécutions sommaires, pendant la Guerre d'Algérie. Je demande simplement la reconnaissance des faits», a-t-elle ajouté, regrettant que le discours de Hollande occulte quasiment la guerre. «C'est très bien de reconnaitre les méfaits de la colonisation mais il ne faut pas oublier la guerre».