Photo : S. Zoheir Par Kamel Amghar Professionnalisme oblige, les grands clubs de football en Europe et en Amérique latine sont aujourd'hui cotés en Bourse comme de vraies multinationales. Ils ont leurs propres chaînes de télévision, leurs radios, leurs sites Internet et leurs publications internes pour défendre leur marque de fabrique. Appelés show stores, des magasins et des boutiques sont ouverts dans les grandes capitales pour rapprocher leurs produits dérivés de leurs fans aux quatre coins du monde. Aux Etats-Unis d'Amérique, les sociétaires de la NBA, le célébrissime Championnat de basket-ball, sont de véritables puissances financières. Les tennismen, les grands athlètes, les rugbymen, les boxeurs, les catcheurs, les pilotes de la Formule 1 comme les grands champions du rallye brassent des milliards de dollars à travers le monde et occupent le devant de la scène à longueur d'année. Leur richesse et leur gloire font rêver des milliards d'êtres humains. Le sport, ainsi scénarisé, est devenu une industrie comme une autre. Les droits de retransmission télévisuelle des grandes compétitions mondiales, obéissant aux règles du système marchand, se négocient à coups de millions d'euros. A défaut de payer rubis sur l'ongle ces substantielles redevances, des peuples entiers sont privés des images lors des grandes messes, comme le Mondial, les joutes intercontinentales ou même les championnats nationaux. Des organisations non gouvernementales, comme la FIFA, l'UEFA, le Comité olympique international (CIO) et les Confédérations continentales de football, exercent des pouvoirs énormes. L'information et la communication occupent un rôle de premier ordre dans ce système créateur de richesses et de valeurs. L'image de marque d'un pays tout entier dépend en partie de ses performances sportives. C'est un indice de développement. De nombreux Etats ont lourdement investi dans ce secteur pour redorer leur blason. Infrastructures gigantesques, écoles de formation et chaînes de TV thématiques, des moyens colossaux sont déployés pour refléter une bonne image d'eux-mêmes dans le concert des nations. Le privé est partout encouragé à apporter sa petite pierre à l'édifice. Les publicistes et les spécialistes de la communication utilisent à outrance le sport et les sportifs pour faire la promotion de leurs produits. C'est tout simplement quelque chose d'énorme. Où en sommes-nous dans tout cela ? Y a-t-il un marché algérien de l'information sportive ? Quel est son poids ? Ses perspectives ? Les Algériens sont incontestablement de grands amateurs de sport. Le football, la boxe, les arts martiaux, les sports mécaniques ou le water-polo comptent des millions de fans dans notre pays. Des supporters, souvent connaisseurs, qui se tiennent toujours informés de tout ce qui se passe. Ils sont aussi des passionnés que les contre-performances de notre élite attristent au plus profond d'eux-mêmes. Pour être toujours à la page, ils se tournent naturellement vers les chaînes étrangères et les sites Web des principales organisations sportives. Les émissions de l'ENTV, celles des différentes chaînes de la radio nationale et les couvertures de la presse écrite dite «spécialisée» ne répondent pas aux besoins du grand public. Tous ces médias focalisent sur les championnats locaux dont les performances sont loin de rivaliser avec ce qui se fait de mieux ailleurs. A cette absence de sensations fortes et de spectacle s'ajoute une «peoplisation caricaturale» de ces périodiques qui ne répondent pas aux attentes de la galerie et ne servent pas, non plus, la cause sportive. Faut-il rappeler toute l'invective et tous les propos orduriers que s'échangent les responsables des différentes équipes à travers cette presse prétendument spécialisée. Le professionnalisme est fondamentalement une question d'éthique. Et lorsqu'on parle de sport, on est tenu d'être doublement à cheval sur cette déontologie, ce fair-play. On ne doit pas cependant mettre tous les travers du mouvement sportif à l'actif de cette jeune presse malgré tous ses défauts. Evidemment, il appartient aux responsables et aux acteurs du secteur de donner en premier l'exemple. Cet assainissement commence à s'opérer naturellement dans les milieux du football notamment. De grands chefs d'entreprise et des managers conscients de leurs missions s'intéressent de plus en plus aux clubs de l'élite. Inutile de citer des exemples, le renouveau est perceptible. Croisons les doigts pour que cela se solde par une sortie définitive du tunnel dans lequel nous nous sommes perdus, il y a de cela plus de 15 ans. Amen !