Des milliers de personnes sont sorties, hier, au Caire, pour protester contre le président Mohamed Morsi, accusé de trahir la révolution qui a fait chuter l'ancien régime. «Dégage !», a scandé la foule, sortie dans les principales artères de la capitale après la prière du vendredi. Arborant des banderoles réclamant «justice pour les dizaines de victimes» des violences de ces derniers jours, les manifestants se sont concentrés sur la place Tahrir ou devant le palais présidentiel d'Héliopolis. D'autres villes du pays ont connu également des manifestations à l'appel du Front du salut national (FSN), principale coalition de l'opposition. Le FSN réclame la fin de la posture ostentatoire des Frères musulmans, dont est issu l'actuel président. L'opposition exige la mise en place «d'un gouvernement de salut national», une révision de la Constitution ou encore le départ du procureur général nommé par le chef de l'Etat. «Sans la satisfaction de ces revendications, aucun dialogue politique ne sera fructueux», avertit le FSN. Les violences en Egypte ont coûté la vie à 56 personnes au moins en une semaine. Ces nouveaux rassemblements sont un test de la capacité de l'opposition à mobiliser. L'un des chefs de file de l'opposition, l'ancien SG de la Ligue arabe, Amr Moussa, a plaidé pour des manifestations «pacifiques». «Nous ne voulons pas d'une effusion de sang, ni de destructions. Nous voulons la liberté d'expression, nous voulons la démocratie», a déclaré Moussa. Malgré les promesses d'apaisement de la classe politique, une partie de la presse était sceptique sur les chances d'amorcer un véritable dialogue pour juguler une crise périlleuse pour l'avenir du pays. «Même s'il y a un dialogue, ce sera un dialogue de sourds entre le camp de ceux qui gouvernent et ceux qui refusent son autorité. Les premiers se fondent sur leur légitimité, et les seconds menacent d'embraser le pays», note le journal al-Ahram. La vie politique en Egypte se caractérise désormais par une dichotomie infinie. Les partisans de Morsi estiment que le président est arrivé au pouvoir démocratiquement et, de ce fait, ne peut céder au chantage. De son côté l'opposition accuse le président, ainsi que les Frères musulmans, de privilégier l'idéologie islamiste au détriment de l'intérêt du pays dans sa différence. Et pour augmenter la pression sur Morsi, l'opposition l'accuse d'échouer à faire face à la grave crise économique qui frappe le pays. L'Egypte connaît en effet une chute drastique de ses réserves de devises, une baisse de la valeur de la monnaie nationale et une aggravation de son déficit budgétaire. Les affrontements ont débuté à la veille du deuxième anniversaire du soulèvement populaire ayant entraîné la chute de Hosni Moubarak. Les heurts ont été particulièrement sanglants au Caire, ainsi que dans la région du canal de Suez. La condamnation à mort de 21 supporteurs du club de foot de Port-Saïd, Al-Masry, impliqués dans des heurts meurtriers, en 2012, à l'issue d'un match contre le club cairote d'Al-Ahly, a jeté de l'huile sur le feu provoquant des émeutes qui ont fait plus de 40 morts dans cette ville importante pour l'économie de l'Egypte. M. B./Agences