La justice algérienne, qui instruit depuis plus de troisans l'affaire Sonatrach-Saipem, a décidé d'élargir les investigations. Elle informe «l'opinion publique», à travers un communiqué publié dimanche dernier, que les faits révélés par des médias nationaux et étrangers, «sont en relation avec l'information judiciaire déjà ouverte auprès du pôle pénal spécialisé de Sidi M'hamed dans le cadre de l'affaire dite Sonatrach 2». La communication faite par le parquet d'Alger était, pour le moins, inattendue, n'étant pas dans les habitudes de cette institution. Le parquet de la République a même précisé que le juge d'instruction en charge du dossier a été requis afin d'élargir le champ des investigations «aux faits nouveaux rapportés par les différents organes de presse». Il semble évident que la très large médiatisation de l'affaire Sonatrach-Saipem, en dehors des frontières, a poussé la justice algérienne à réagir et à éclaircir certaines zones d'ombres sur le déroulement de l'enquête en annonçant l'existence d'une affaire dite «Sonatrach 2». Car, l'implication de certains hauts responsables algériens ou encore le versement de pots-de-vin ont fait les Unes des quotidiens nationaux bien avant l'annonce de l'ouverture d'une enquête par le parquet de Milan. Quel que soit la chronologie des faits dans l'auto-saisine de la justice, cela importe peu. La décision du procureur général de la Cour d'Alger, M. Zeghmati, est à saluer. Car, seul le résultat, à savoir lutter contre la corruption à tous les niveaux, importe. En effet, les informations rapportées par les médias étrangers citant des sources judiciaires, font état d'une enquête concernant initialement la filiale d'ingénierie et exploration pétrolière Saipem qui a été élargi au directeur général du groupe ENI. Selon ces médias, M. Scaroni est soupçonné d'avoir participé au moins à une rencontre à Paris afin qu'ENI et Saipem obtiennent un marché évalué à 11 milliards de dollars avec le groupe algérien Sonatrach. Dans ce but, une commission de 197 millions d'euros aurait été versée, via un intermédiaire, à de hauts responsables algériens. La police financière italienne a mené, jeudi dernier, des perquisitions aux sièges d'ENI et de Saipem et au domicile de M. Scaroni à Milan. Huit personnes au total font l'objet d'une enquête, selon les médias italiens. Ces informations, révélées au grand jour, ne pouvaient donc que relancer le dossier de l'affaire Sonatrach, que l'on croyait presque clos à Alger. L'enquête devra, bien évidemment, prouver l'existence des commissions de 197 millions d'euros, reçues contre la signature d'un marché de 11 milliards de dollars avec Saipem. Elle devra établir le lien entre les responsables d'ENI, l'intermédiaire et les hauts responsables algériens qui sont concernés par les commissions. Une fois les preuves à charge réunies contre les hauts cadres de l'Etat, une procédure devra être lancée contre les présumés coupables. Reste à espérer l'aboutissement de la procédure. Car, malheureusement en Algérie l'affaire Khalifa a déjà, en son temps, dessiné les limites de la lutte contre la corruption quand il s'agit de franchir une certaine frontière hiérarchique. Faut-il rappeler que dans l'affaire Khalifa, en plus du dossier de Khalifa Airways et des Swift, des affaires en instructions depuis près d'une dizaine d'années, il y a le dossier des hauts cadres de l'Etat qui bénéficient du privilège de juridiction. Ces derniers, cités lors de l'instruction de l'affaire Khalifa Bank, devaient être auditionnés par la Cour suprême. L'ex-ministre de la Justice avait affirmé, à plusieurs reprises, que «le dossier est au niveau de la Cour suprême et que l'enquête se poursuit. Une fois terminée, le dossier sera enrôlé pour que les mis en cause soient jugés». Plus de cinq ans après le verdict dans cette affaire, l'omerta est toujours de mise. Aujourd'hui, que la corruption des hauts cadres algériens fait la Une des médias étrangers, il ne reste pas beaucoup de marge de manœuvre pour Alger. Non pas uniquement pour la justice algérienne mais pour le gouvernement qui fait de la lutte contre la corruption la priorité des priorités. Il ne peut donc plus se murer dans le silence, sous prétexte que c'est là les traditions du système. Car cela risque d'être considéré comme un silence «complice». H. Y.
Le Canada intensifiera sa lutte contre la corruption transnationale Le gouvernement canadien intensifiera sa lutte contre la corruption transnationale, en prenant de nouvelles mesures pour combattre ce phénomène, indique un communiqué de l'ambassade du Canada à Alger. Le ministre des Affaires étrangères canadien, John Baird, avait annoncé, mardi dernier, la décision du gouvernement de Stephen Harper de prendre de nouvelles mesures pour combattre la corruption, en déposant devant le Sénat des modifications à la loi sur la corruption d'agents publics étrangers, rappelle le communiqué de l'ambassade canadienne. «Cette loi nous incite à positionner le Canada comme un fournisseur fiable de ressources dont ont besoin les marchés émergeants pour croître», avait déclaré M. Baird, qui a souligné toutefois que le gouvernement s'attendait aussi à ce que «de leur côté, les entreprises canadiennes respectent les règles du jeu». Le chef de la diplomatie canadienne a espéré que «ces nouvelles mesures seront perçues comme un signe de la détermination du Canada à conserver sa bonne réputation», notant que l'«économie du Canada et sa prospérité future reposent sur l'élargissement de ses relations commerciales avec le monde», selon le texte.