Voilà un sujet qui constituerait un thème à un bon film noir en raison de l'ingrédient sémantique qui fait la trame d'un scandale qualifié en tant que tel par un dirigeant du Cnapest. Il est vrai toutefois qu'au rythme où est dénoncée la gabegie nationale et évidemment la somme d'affaires éparses ici et là, frisant l'irréel pour l'une (affaire Sonatrach) et, face à celle-ci, une autre à des allures presque ridicule, celle du mauvais usage des fonds des œuvres sociales du secteur de l'éducation, c'est plutôt la banalité qui s'installe. Mais en plus sérieux encore, l'argent des travailleurs pour lesquels ces derniers ont tellement battu le pavé, pénalisant élèves, parents, compromettant tout un système «heureusement» rééquilibré «génialement» par des examens folkloriques de fin d'année à l'issue desquels il n'y avait presque pas de perdants mais surtout rien que des gagnants. Les diplômes étant ventilés comme dans son geste auguste le semeur ventile les graines au profit de la terre nourricière. Le Cnapest dénonce donc «des primes secrètes» que se sont auto-attribuées des membres de la commission nationale des œuvres sociales. Au vu de la solennité conférée à l'information balancée, le communiqué donnerait lieu à croire que sur les 200 mille milliards de centimes sinon les 600 milliards de centimes au moins la moitié aurait été utilisée à des fins douteuses. Il faut convenir que l'indécision sur la vérité des chiffres consacrée par l'évaluation de 200 000 et 660 000 milliards prêterait à plus que du doute. Près de 400 milliards égayés dans la nature et le communiqué du syndicat autonome (Cnapest) qui ne vient dénoncer que l'octroi en douce de primes de 8 000 et 10 000 dinars grâce auxquelles quelques membres de la commission nationale envisagent de se sucrer mensuellement. «Secret total» est-il consigné dans un document que la direction du Cnapest affirme détenir. Pour 10 000 DA/mois, soit 120 000/an, n'est-ce-pas là une honte pour le reste des pilleurs du pays, plus particulièrement ceux qui s'approvisionnent presque dans les coffres du Trésor public ? En fait, ce sentiment d'impunité absolue duquel semble convaincus des individus à hauteur de tous les rouages de l'Administration et des corps d'activités tous genres confondus, les bords politiques, etc. est littéralement passé au statut de… droit. Un droit de cuissage sur les fonds publics au motif, lui-même très secret, que tout le monde se sert. Quand un modeste receveur d'une très petite agence des postes, censé gérer quelques liasses de petites coupures représentant les revenus de modestes gens, prend la clef des champs avec 15 milliards de centimes, chacun des Algériens qui pourrait se retrouver dans un tel rôle ne pourrait se dire que «pourquoi pas… moi ?». Forcément. Les fonds gérés par les structures des œuvres sociales, voire par la commission nationale désignée à cet effet et chargée particulièrement de veiller à leur bon usage appartiennent aux travailleurs, à l'ensemble des fonctionnaires du secteur et doivent autant que faire se peut être répartis en ce sens d'où la destination très précise contenue dans deux décrets (82-179 et 82-303). Deux textes de loi dont il faudra retenir l'essentiel qui consiste à ce que «La gestion des œuvres sociales est soumise au contrôle de l'Etat» (art 33). Ce qui n'est évidemment pas le cas et ne risque pas de l'être car tant que les pouvoirs publics se tiendront éloignés de cette question ils auront la garantie d'avoir un secteur plutôt calme. En somme la paix sociale contre une cécité délibérée. Par ailleurs, il est également recommandé à ce que «Le fonds des œuvres sociales ne soit pas détourné de son affectation». Une recommandation peu probable d'être observée d'autant plus que les actions auxquelles devraient être consacrées l'argent des travailleurs puisés sur leur masse salariale se résument entre autres en… assistance sociale - préservation de la santé - crèches et jardins d'enfants - activités de culture et de loisir - sport de masse - excursions, centres aérés, centres de vacances, centres de repos familiaux (développement du tourisme populaire) - coopérative de consommation (protection du pouvoir d'achat) - création de coopératives immobilières (résorption de la crise du logement). Tout cela est donc bien loin, très loin, de la réalité. Cet avatar de gestion dit des «primes secrètes» ne sera que le début d'une série de casseroles qu'un avenir proche dévoilera.