Ils étaient des milliers de manifestants à crier leur envie de trouver un emploi stable. Ils étaient des milliers à ne pas comprendre comment l'une des capitales des hydrocarbures ne pouvait leur offrir un travail. Ils étaient des milliers à poser la question de la mobilité de certains et leur exclusion du peu de postes d'emploi existant dans leur wilaya. Ce questionnement légitime de ces chômeurs pose de manière accrue la question de l'emploi et du pouvoir d'achat en Algérie. Il est clair que la question de l'emploi, de l'investissement et du pouvoir d'achat sont au cœur des préoccupations de la majorité des Algériens. Les aides à l'emploi et à l'investissement et les augmentations de salaires de la Fonction publique et du secteur publics n'ont rien réglé. La fermeture des frontières à l'Est et la situation sociale en Libye et Tunisie ont réduit à néant les revenus des «trafics» transfrontaliers. Cet ensemble devrait pousser les gouvernants à repenser de manière sereine et en dehors de toute pression la politique d'assistanat mise en place depuis l'indépendance. En effet qu'est-ce qui a poussé, par exemple, Mohamed Lamine Lahmar à aller se sacrifier à des centaines de kilomètres de chez lui ? La question peut paraître provocante mais elle est caractéristique de la problématique. Un jeune a quitté sa wilaya pour trouver un emploi pour deux raisons essentielles. La première est l'absence d'offre d'emploi correspondant à sa qualification dans sa wilaya. La seconde est un meilleur salaire à travail égal. Rien ne pourrait justifier qu'un Oranais aille travailler comme jardinier à Hassi Messaoud s'il avait eu la même offre pour le même salaire. Cette équation simple pose la question de la mobilité de la main- d'œuvre et du droit au travail sur le territoire national pour tout algérien. L'instruction du Premier ministre donne la primauté aux natifs d'un village, d'une ville ou d'une région. Cette instruction qui soulagera peut être les habitants des wilayas du Sud, ne résoudra pas la question du chômage au Nord. Elle crée une discrimination qui ne peut être positive. Si certains jeunes arrivent à faire prévaloir une certaine mobilité en raison du fort taux de chômage dans leur wilaya, pourquoi n'en serait il pas de même pour les jeunes de Ouargla, d'Illizi ou de Tamanrasset ? Les secteurs du Btph et de l'agriculture se plaignent d'un manque criant de main-d'œuvre et ce dans toutes les wilayas du pays. Trop de temps a été perdu dans la mise en place d'une réelle vision du développement harmonieux de tout le pays. Peu de décideurs, au niveau local ou national, ont pris la mesure de ce qui se passe dans le pays après tant d'années de terrorisme. Des formations inadaptées, une bureaucratie qui brise toute velléité d'investir, un Etat qui se désengage de la production industrielle en espérant que le secteur privé le fera à sa place, des disparités régionales énormes, des universités qui forment des chômeurs, tel est le constat général. En refusant d'être un investisseur et un bâtisseur, le gouvernement a préféré redistribuer la rente pétrolière à travers différentes aides, subventions et soutiens. Il a fait des Algériens qu'ils soient chômeurs ou «capitaines d'industrie» des assistés qui attendent tout de l'Etat. Un état de fait qu'il sera difficile d'inverser. A. E.