L'industrie cuir, maroquinerie et textile est entrain de renaître de ses cendres. Après des années d'agonie et de descente aux enfers, les pouvoirs publics qui les ont lâchées ont repris conscience de son importance et ont injecté de grandes sommes d'argent pour aller à leur rescousse. Le site de Chéraga où se trouve actuellement l'entreprise MVL (Maroquinerie, vêtements Label) sera transformé en un véritable pôle industriel. Ce dernier sera dédié en plus de la maroquinerie, à la chaussure et au textile. En effet, de la situation lamentable dans laquelle évoluent des centaines de travailleurs, ces secteurs stratégiques auparavant véritables fleurons de l'industrie en Algérie, avant de plonger dans le marasme, deviendront d'ici 2014, au plus tard, des espaces totalement rénovés et modernes. Une évidence si les autorités algériennes veulent que ces secteurs publics rivalisent avec la rude concurrence livrée sur le marché national, notamment par les importateurs. Mais la tâche n'est cependant pas de tout repos lorsqu'on sait que le secteur public a perdu des années au profit des importateurs et du secteur privé qui ont pris une longueur d'onde sur lui. Ceci étant, les responsables à charge de ces secteurs se disent confiants et gardent espoir de reprendre des parts du marché grâce à un savoir faire qui n'est plus à démontrer et à la volonté des travailleurs grâce auxquels ces entreprises ont été maintenues malgré des années de délaissement. En effet, le Groupe public du cuir «Leather Industrie» sous tutelle de la SGP Industrie manufacturière est entrain de préparer la modernisation des filiales qui sont sous sa tutelle, entres autres Macvil à Bordj El Kiffan et MVL à Chéraga.
La chaussure de ville renaîtra de ses cendres Macvil, évoluant depuis 1962 au niveau Bordj El Kiffan nationalisée en 1978, est spécialisée dans la chaussure de ville et des chaussures professionnelles dont la qualité n'est plus à faire connaître. Cependant, et parce qu'il n'y a pas eu de renouvellement des équipements, devenus obsolètes au fil du temps, cette entreprise ne peut plus faire face à l'exigence de la qualité. Mais voilà que les pouvoirs publics ont décidé de la transférer à Chéraga, dans les locaux de l'ex-Sonipec. La délocalisation de cette activité intervient dans le cadre de la stratégie de l'Etat de ne plus laisser des industries dans les agglomérations mais aussi pour être au rendez vous du développement envisagé pour cette importante activité qui s'inscrit dans le cadre de la relance de l'économie nationale. Pour ce faire, des crédits ont été débloqués pour permettre ce transfert vers le site de Chéraga. Ces crédits serviront pour la réhabilitation et pour l'acquisition de nouveaux équipements qui permettront de réaliser une production autour de 1 million et plus de paires de chaussures par an toutes gammes confondues homme, femme, enfants et diabétiques. A la première année un quota de 500 000 paires sera produit contre 800 000 à la deuxième année, pour atteindre le 1 million à la troisième année et 2 millions plus tard. Actuellement Macvil ne produit que 100 000 paires de chaussures dont seulement 25% à destination du grand public. Le reste représente des chaussures professionnelles. La tendance sera donc renversée, avec ce transfert ou très peu de chaussures professionnelles seront produites, puisque la majorité de la production sera orientée vers le grand public. Le terrain affecté à Macvil à Cheraga est de 43 000 m2 (4 Ha) dont 12 000 m2 de bâti. Actuellement, le site de Bordj El Kiffan représente moins de 10 000 m2. L'objectif est de réceptionner ce projet d'ici la fin de l'année en cours ou au plu tard au début 2014. En d'autres termes, si l'échéance arrêtée est respectée l'entreprise sera fonctionnelle à cette date là. Pour l'heure, les travaux de réhabilitation du site de Chéraga vont bon train, la toiture en charpente métallique réalisée avec des panneaux sandwich est déjà achevée. Cette toiture remplace ainsi l'ancienne qui est en amiante produit fortement cancérigène. Pour le moment, il est question du traitement des dossiers d'aménagement intérieur. Il s'agit de manière générale de l'aménagement des bâtiments, l'électricité, la climatisation etc. Selon le gestionnaire de Macvil qui nous a reçus à son usine à Bordj El Kiffan, il restera le choix des équipements à acheter avec le partenaire Espagnol.
Un partenaire Espagnol pour une assistance technique La SGP des industries manufacturières a justement signé un protocole d'accord avec l'entreprise Espagnole Celem pour accompagner l'Algérie dans la réalisation de ce projet à travers une assistance technique, le développement des collections, et la formation des personnels. Un aspect pour lequel des crédits sont dégagés. Toute cette démarche a pour objectif de permettre à l'usine de reprendre une part de marché grand public, car elle est insignifiante actuellement compte tenue de la qualité due au problème des équipements vétustes, nous fait savoir notre interlocuteur. Puisque Macvil fabriquera exclusivement des chaussures grand public, qui s'occupera de la production des chaussures professionnelles ? Le responsable de l'entreprise nous fera savoir qu'il sera procédé à une spécialisation puisque le site de N'gaoues à Batna sera spécialisé dans la chaussure de sport, Akbou à Béjaïa dans la chaussure professionnelle, et Macvil dans la chaussure de ville. Les prix des produits qui seront fabriqués sur le site de Chéraga concerneront toutes les couches sociales et avec une qualité irréprochable. La moyenne des prix tournera autour de 3 000 DA, tout dépendra du modèle fabriqué. Déjà, il y'a sur le marché national des chaussures civiles, des mocassins et des ballerines pour femmes en cuir dont les prix varient entre 2 000 et 3 000 DA. Pour ce qui est de la commercialisation, un réseau de distribution, géré conjointement avec le Groupe Cuir et confection, sera mis en place et qui aura le pouvoir de distribuer les produits, nous apprend le gestionnaire de Macvil sans compter, ajoute-t-il, les autres actions qui vont êtres lancées par l'entreprise pour toucher l'ensemble des distributeurs privés. Ajouté à cela la mise en place d'un grand showroom sur site de Chéraga pour les 3 entreprises cuir, confection et chaussures qui aura pour mission la présentation et la vente des produits. Bien évidement, et pour remettre sur rail cette industrie, l'entreprise, dans le cadre des objectifs qui lui sont assignés devra compter sur le concours des pouvoirs publics pour réguler le marché et combattre l'informel, qui est un danger pour l'économie nationale et pour les entreprises industrielles de production créatrices de richesses. «Les pouvoirs publics doivent se manifester pour combattre l'informel qui tue l'économie», rappelle notre interlocuteur ajoutant qu'il y a «une concurrence déloyale de la part des importateurs dont la qualité des produits importés est douteuse par rapport à la production de la manufacture publique 100% en cuir». La nouvelle entreprise de chaussures créera environ 400 emplois et permettra le développement de la région de Chéraga, habituée dans le temps à cette activité créatrice de richesse. Pour ce qui est de l'exportation, le gestionnaire de Macvil fera savoir qu'elle sera envisagée éventuellement avec le partenaire Espagnol.
Une gamme de vêtements de Cuir MVL pour le public Par ailleurs, l'entreprise de Maroquinerie, vêtements de Label cuir (MVL) de Chéraga sera bientôt modernisée à la faveur d'un nouvel investissement qui lui a été accordé par les pouvoirs publics. Jusque-là elle a évolué dans le marché avec des hauts et des bas, puisqu'elle aussi fait partie des entreprises publiques reléguées aux oubliettes depuis bien des décennies et livrée à une concurrence déloyale de la part des importateurs. Elle a été parfois bénéficiaire et d'autres fois déficitaire, nous a appris son directeur général, M. Youcef Belahcene. Les résultats négatifs de l'entreprise ont été induits par une concurrence déloyale de la part des ateliers qui travaillent au noir et qui ne déclarent qu'une partie de leur personnel. Pis encore, ils pratiquent des prix moins chers non pas parce qu'ils sont meilleurs mais parce qu'ils s'approvisionnent en matières premières sans factures et cela induit des coûts de production moins chers, explique encore notre interlocuteur qui n'a pas manqué de souligner que cette situation porte préjudice à son entreprise non sans ajouter que «la concurrence ne nous fait pas peur bien au contraire. La concurrence lorsqu'elle est loyale nous pousse à nous améliorer d'avantage et à viser toujours plus haut». Il affichera sa satisfaction de voir les pouvoirs publics armés d'une grande volonté pour remettre sur rail cette industrie. «L'Etat garde un œil sur ce qui se passe dans ce secteur et nous avons le sentiment qu'il s'intéresse de plus en plus à cette activité et porte une attention à nos préoccupations». D'ailleurs, l'entreprise a bénéficié d'un crédit de plusieurs millions de dinars à des taux préférentiels qui permettront, comme pour Macvil, la réhabilitation de toute l'infrastructure et donc l'amélioration des conditions de travail des employés, et par là même l'acquisition de nouveaux équipements de production pour aller vers plus de qualité et donc relever les défis d'un marché très concurrentiel. Ces crédits couvriront également la formation des personnels (ils sont au nombre de 175) pour les mettre à niveau. Ces recyclages se feront localement et les employés les plus méritants seront motivés. Bientôt les équipements arriveront, nous fait savoir M. Belahcene. Les négociations avec les fournisseurs sont en cours de finalisation.Le plan de relance de l'entreprise Maroquinerie et cuir donnera l'occasion d'améliorer la production, orientée actuellement vers les institutions publiques. Une gamme de produits variés va vers la Protection civile, la gendarmerie et la police. Aujourd'hui, la gamme grand public ne sera plus négligée. Une petite chaîne de production est déjà mise en place avec des modèles et des couleurs qui répondent au goût de la clientèle. Pour M. Belahcene, produire du cuir pour le grand public lui tient à cœur et il compte relever le défi. D'autant que le cuir algérien est très prisé à l'échelle internationale, vu sa très bonne qualité. «Nous ferons en sorte de répondre aux exigences des clients avec des produits irréprochables et de qualité», dira notre interlocuteur. Et ce dernier d'ajouter que «notre rôle est de repositionner l'entreprise et améliorer sa situation sur le plan économique et répondre ainsi aux attentes des travailleurs après des années de sacrifices». Toujours au volet ressources humaines, le DG de MVL explique que sa société travaille beaucoup avec l'Anem (l'Agence nationale de l'emploi). Un rôle important est joué par son entreprise dans le cadre de la politique nationale d'emploi, puisqu'elle accueille beaucoup de jeunes, dont certains finissent par intégrer définitivement ses effectifs. Une trentaine au total parmi les travailleurs envoyés par l'Anem évoluent actuellement au sein de la société. Qu'en est-il de l'exportation après la modernisation et la relance de cette entreprise ? Son DG nous fera savoir qu'il est question de rechercher un partenaire beaucoup plus commercial pour les accompagner pour aller vers le marché extérieur. «Nous avons un savoir faire et une expérience et nos produits sont prisés de l'autre côté de la mer», rappelle encore M. Belahcene. Et de faire remarquer qu'une opération d'exportation vers l'Espagne a été menée auparavant avec une grande réussite. Pour la commercialisation au niveau local, elle se fera à travers la réhabilitation du réseau Distrish. Les industries maroquinerie et chaussures auront de belles années devant elles si la volonté confirmée par les pouvoirs publics reste de mise. Il appartient aussi aux travailleurs de se remettre au travail pour relever les défis et faire face à la rude concurrence du marché.
B. A.
10 à 15% des chaussures pour les diabétiques Il y a une part de 10 à 15% de chaussures Macvil qui couvriront les besoins des diabétiques. Tous le monde sait que l'une des complications de la maladie du diabète reste le pied diabétique. Parfois elles conduisent carrément à l'amputation du pied. C'est pourquoi, Macvil va produire des chaussures spéciales diabétiques pour contribuer à réduire les coûts de la santé publique. 50% des chaussures pour les femmes et les hommes et 50% pour les enfants et les diabétiques. Les quotas pourront évoluer suivant la demande du marché. «Nous allons adapter la production suivant les besoins du marché. Il y aura une flexibilité pour répondre à toute la demande», précise le gestionnaire de Macvil. B. A.
MVL produit 40 000 articles de maroquinerie par an L'entreprise MVL est spécialisée dans les vêtements professionnels (Protection civile, Gendarmerie et Sûreté nationales), les articles de protection en croûte (tabliers, gants en croûte etc.), les articles de sécurité, tout article de maroquinerie (serviettes, articles scolaires, ceintures, portefeuilles, pochettes, sacs etc.) et confection de vêtements de ville, en direction du large public. D'autres produits en cuir sont également fabriqués tels les coffrets. «On ne se limite pas à notre gamme de produits. Nous produisons parfois sur demande de la clientèle», nous fait savoir M. Youcef Belahcene directeur général de MVL. Actuellement, les capacités de production sont de 25 000 articles par an pour la confection, 40 000 pour la maroquinerie et 300 000 pour les équipements de protection en cuir. La modernisation de l'entreprise et l'acquisition de nouveaux équipements seront à même d'améliorer sensiblement la qualité, qui n'a déjà rien à envier à ce qui se fait ailleurs. Un tour au niveau de l'entreprise nous a laissé entrevoir la précarité absolue dans laquelle évoluent les employés. Une usine très vieille qui n'a bénéficié d'aucun plan de relance auparavant. De l'extérieur déjà, l'entreprise donne l'apparence d'être fermée. A l'intérieur, la structure elle-même est totalement délabrée. Le plan de modernisation dissipera sans doute cette image hideuse et permettra de rivaliser avec les autres entreprises par la qualité et par l'apparence. B. A.