Le président soudanais, Omar el-Béchir, a effectué une courte visite à Juba, la première depuis celle qu'il avait effectuée en juillet 2011 à l'occasion de l'indépendance du Soudan du Sud, un déplacement perçu comme un signe d'apaisement entre les deux pays. Béchir est arrivé dans la capitale sud-soudanaise, accueilli par son homologue Salva Kiir, qui lui a présenté son gouvernement. Les deux dirigeants ont immédiatement rejoint le palais présidentiel pour des entretiens. La visite de Béchir est aussi la première depuis les graves affrontements frontaliers qui avaient opposé les deux pays au printemps 2012 et fait craindre une reprise d'un conflit à grande échelle entre Juba et Khartoum. Le Soudan du Sud a conquis son indépendance à l'issue de décennies de guerre civile entre une rébellion sudiste, dont Kiir était l'un des commandants, et Khartoum. Les hostilités ont pris fin en 2005 avec la signature d'un accord de paix qui a débouché sur la partition du Soudan mais a laissé de nombreuses questions en suspens. Pour la visite du président soudanais, un important dispositif de sécurité a été déployé dès jeudi soir à Juba. La visite de Béchir, plusieurs fois annoncée puis annulée depuis un an, n'a duré que quelques heures. Depuis l'accès du Soudan du Sud à l'indépendance le 9 juillet 2011, de nombreux différends continuent d'empoisonner les relations des deux anciens ennemis, notamment les questions de la démarcation de la frontière commune de la région contestée d'Abyei ou encore du pétrole. Juba a hérité des trois-quarts des réserves pétrolières du Soudan d'avant la partition, mais n'a jamais pu se mettre d'accord avec Khartoum sur le montant des redevances à lui verser pour emprunter ses oléoducs et exporter. Ce différend pétrolier a dégénéré en janvier 2012, quand, faute d'accord et furieuse de voir le Soudan prélever du brut au passage dans ses oléoducs, le Soudan du Sud a stoppé net sa production. L'arrêt de la production a mis les économies des deux pays à genoux. Les violents affrontements frontaliers du printemps 2012 avaient eux opposé les armés des deux pays dans la région pétrolifère d'Heglig, revendiquée par les deux parties. La visite de Béchir intervient dans la foulée de la signature, en mars, d'un accord à Addis Abéba qui a permis la mise en place d'un calendrier pour relancer les relations bilatérales et la reprise samedi dernier de la production pétrolière sud-soudanaise. Selon les médias soudanais, le brut devrait pouvoir à nouveau être exporté depuis Port-Soudan, sur la mer Rouge, d'ici fin mai. Un précédent accord avait déjà été signé en septembre entre Khartoum et Juba, mais n'avait jamais été appliqué. Au cœur du blocage, figuraient les garanties que Khartoum réclamait de Juba sur un autre sujet de discorde : le soutien sud-soudanais aux rebelles actifs dans les Etats soudanais du Kordofan Sud et du Nil Bleu (sud). R.I.