De notre envoyée spéciale aux camps des réfugiés sahraouis à Tindouf Karima Mokrani
Message très clair du peuple et de l'institution militaire sahraouis au monde entier et particulièrement à l'Etat envahisseur, celui du Maroc : la lutte pour la libération des terres sahraouies se poursuivra politiquement, de manière pacifique, dans un respect total des résolutions onusiennes, mais pas pour longtemps si les efforts consentis ne donnent pas le résultat escompté. Chaque chose a ses limites, entendent dire le peuple et l'armée sahraouis, décidés, et ils le disent clairement, à reprendre la lutte armée à tout moment. La situation du statut quo - ni guerre ni paix- imposée par les accords d'Huston en 1991, est devenue tout simplement insupportable pour les centaines de milliers de familles sahraouies, éparpillées entre des camps de fortune, dans des conditions à la limite du mépris et de la désolation, sur les territoires sahraouis occupés et autres libérés mais aussi sur une bonne partie du territoire algérien. A Tindouf, la population sahraouie est de plus en plus nombreuse et l'appel à l'autodétermination, à l'indépendance, est très fort. Les jeunes nés dans les camps sont bien décidés à aller au front. Et le président Mohamed Abdelaziz ne dit pas non. Bien au contraire, c'est lui-même qui leur montre la voie et leur donne le flambeau. C'était hier, au milieu d'une grande place de la ville d'El Ayoune, à l'occasion de la célébration du 40e anniversaire de la création du Front Polisario, suivie, dix jours après par le déclenchement de la lutte armée. Un grand nombre d'officiels sahraouis mais aussi de politiques représentants les pays voisins, arabes et africains, étaient au rendez-vous. Une foule nombreuse de simples citoyens, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes et beaucoup d'enfants, était présente. Un moment fort d'émotion qui rappelle un parcours à la fois riche et triste d'une lutte politique et armée, d'une quarantaine d'années, née dans l'enthousiasme et l'engagement mais dont l'élan a, plusieurs fois, été freiné par des résolutions non appliquées sur le terrain. D'une mission à une autre, d'une résolution à une autre et d'un report à un autre...En fin de compte, des résultats pas du tout satisfaisants. Dans son discours, le président de la Rasd, Mohamed Abdelaziz, a indiqué que «ce front de libération est la fierté de notre peuple. Il est issu d'une longue tradition de résistance populaire durant laquelle le soulèvement de Zemla du 17 juin 1970, sous la direction du regretté Mohamed Sidi Brahim Bassiri, a été un tournant décisif. Le Front Polisario est aujourd'hui le fer de lance d'une lutte révolutionnaire ayant pour mission de briser les chaînes du colonialisme, de sortir le peuple des griffes de l'ignorance, du sous-développement, du tribalisme, de la marginalisation, de l'oppression, de la soumission et de lui rendre sa dignité et sa gloire». Et de poursuivre en insistant sur le fait que «le peuple sahraoui est définitivement attaché aux objectifs du Polisario visant à consacrer ses droits légitimes et à instaurer son Etat indépendant sur l'intégralité de son territoire». En tenue de combat, le président de la Rasd lance un appel à la communauté internationale pour prendre une décision politique ferme à même de mettre un terme au conflit qui l'oppose à l'Etat marocain. Il lui demande surtout de «protéger les Sahraouis des violations flagrantes des droits de l'Homme dont il est victime depuis plusieurs années». Le Président de la Rasd s'adressera au peuple marocain «frère» pour lui dire : «Nous ne sommes un danger ni pour toi ni pour un quelconque autre peuple au monde. Notre lutte est pacifique. Nous sommes ouverts au dialogue mais aussi à toutes les probabilités. Si la voie politique ne mène pas au but recherché, il n'y aura pas d'autre solution que la lutte armée. Nous avons une armée compétente, comptant sur le soutien indéfectible du peuple sahraoui.» Ce dernier qui, tout au long d'un long défilé militaire organisé à l'occasion de ce 40e anniversaire, n'a pas cessé de crier «Nasr, nasr» (victoire). K. M.