Le sanglant attentat qui a touché la banlieue sud de Beyrouth aura ajouté à la tension au Liban et fragilisé davantage le consensus en cours. Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière au Liban depuis celle qui a coûté la vie au Premier ministre Rafik Hariri en février 2005. Un assassinat dont les conséquences rythment, depuis, la très complexe vie politique libanaise. La question des armes de la résistance, celle du tribunal international, les crises à répétition des différents gouvernements rythment depuis des années la vie politique du pays. Et maintiennent la tension entre les différents courants et partis composant la mosaïque politique dans le pays du cèdre. Aujourd'hui la guerre civile syrienne estampille de son influence le Liban. L'attentat de la banlieue sud de la capitale libanaise a été revendiqué par un groupuscule totalement inconnu dans une vidéo non authentifiée dans laquelle il explique l'attaque par des représailles à l'engagement du Hezbollah aux côtés du régime syrien. Cependant l'attaque pourrait bien avoir été commanditée par un des Etats activant indirectement sur le terrain libanais. Les moyens mis pour perpétrer une opération de cette nature sont loin d'être dérisoires, notamment lorsque l'on sait le degré de maillage sécuritaire dans cette partie de la capitale libanaise. Des civils libanais ont encore une fois payé de leur vie la guerre froide au Liban. L'opposition, qui pourtant n'hésite pas à aider une des parties en conflits accuse le Hezbollah de vouloir entraîner le Liban dans la poudrière syrienne. L'intervention du Hezbollah dans des proportions extrêmement limitées dans la crise syrienne a été pourtant très bien expliquée par l'impératif de protéger le dos de la résistance. La résistance libanaise est bien visée intérieurement et sur le plan international. Le parti de Nasrallah s'est retrouvé obligé de peser dans un rapport de force qui menaçait sérieusement les équilibres dans la région. Inévitable effet syrien
La grave crise en Syrie est aujourd'hui un élément inévitable dans la vie politique du Liban, car menaçant inexorablement la stabilité de ce pays. Les relations très particulières entre les deux pays font en sorte que l'instabilité de l'un influe grandement sur l'autre. La guerre civile actuellement en cours en Syrie, voila maintenant deux années, pèse grandement dans la vie politique libanaise. Le gouvernement libanais qui a opté pour une posture pour le moins raisonnable, celle de la non-ingérence dans les affaires syriennes, pourra-t-il maintenir le cap ? Les attaques à répétition contre le fief du Hezbollah pourraient pousser certains acteurs à bout. Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a franchement accusé des «terroristes takfiri» d'être à l'origine de l'attentat meurtrier. Dans son discours Nasrallah réaffirme que la résistance ne pliera pas face aux pressions et adresse des avertissements à ceux qui veulent entraîner le Liban dans la guerre. L'inimitié des groupuscules djihadistes en activité en Syrie est devenue virulente depuis l'épisode Qoseir. La Coalition de l'opposition syrienne a mis en garde le Hezbollah contre son soutien «au meurtre des Syriens et la répression de leur révolte», l'accusant d'avoir pris part «dans les crimes du régime et de contribuer à entraîner la région vers le chaos». Le discours haineux des groupes de l'opposition syrienne envers le Hezbollah ne fait qu'exacerber la tension et souffler sur la braise des contradictions. Le conflit en Syrie provoque la sensibilité, déjà à fleur de peau, entre les deux différentes communautés du Liban. Le clivage sunnite-chiite alimenté par certains médias, notamment satellitaires, est plus que jamais arrivé à des limites dangereuses. N'était la sagesse et le sang-froid de personnalités dans les deux camps, le seuil de rupture aurait largement été atteint. Le Liban est paralysé depuis cinq mois, après la démission du gouvernement en raison des coups de boutoir donnés par une opposition particulièrement revêche. Pourtant, le Liban est directement concerné par l'avenir de la Syrie tant l'enchevêtrement entre les deux pays sur le plan social et économique est indéniable dans cette région du Cham. M. B.