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Madïn Koroghli un autre Zizou est né
Publié dans Le Buteur le 03 - 03 - 2009

Son père Mohand assure : «Pour nous, il jouera pour l'Algérie»
De notre envoyé spécial à Roubaix Farid Aït Saâda
Pour les amateurs de sport, Roubaix, ville située à 10 kilomètres au nord-est de Lille, à quelques kilomètres de la frontière avec la Belgique, évoque inévitablement Paris-Roubaix, l'un des grands classiques du cyclisme sur route. Or, depuis quelques mois, Roubaix évoque autre chose pour les dingues du football : un petit génie du foot qui a commencé à faire parler de lui, alors même qu'il n'était pas encore entré à l'école. Une star de foot en petite culotte, qui l'eut cru ? Plus même : la petite star est d'origine algérienne. Nous avons eu à le vérifier en allant à sa découverte à Roubaix : ses parents sont bien algériens de pure souche. Madïn Koroghli, le petit qui affole (déjà !) le Real Madrid, Chelsea, Manchester United, le Milan AC et une kyrielle de clubs français, a un talent brut phénoménal pour son âge, mais il est heureusement protégé par des parents responsables, attentifs et sensés qui gardent la tête sur leurs épaules, à un moment où d'autres auraient certainement cédé aux offres mirobolantes que des clubs huppés n'ont eu de cesse de leur transmettre depuis plusieurs mois.
L'apprentissage à 8 mois grâce à un… trotte-bébé !
Né le 21 septembre 2001 à Roubaix, Madïn montre vite qu'il n'est pas comme les autres enfants. Bougeant constamment, très actif (hyperactif dans le bon sens), ayant une formidable énergie à dépenser, il aimait jouer avec tout ce qui roulait. Premier signe : il commence à marcher à l'âge de dix mois, alors que l'âge normal pour commencer à marcher est d'un an. «Ce n'est pas un record dans la famille puisque moi-même, je m'étais mise à marcher à l'âge de huit mois», fera remarquer la maman avec le sourire. Madïn ne se contente pas de marcher. Il trouve un plaisir à taper dans le ballon. «En fait, il tapait sur tout ce qui est rond et qui roule : balle, ballon, pelote… De plus, il avait un trotte-bébé qui lui permettait de tenir en équilibre, même lorsqu'il ne pouvait pas marcher. Et là, il tapait sur des balles toute la journée, inlassablement», raconte Mohand Koroghli, le papa. Pourtant, il n'y avait pas des circonstances particulièrement favorisantes, comme le fait d'avoir des footballeurs dans la famille ou encore habiter à côté d'un stade. C'est juste un don inné. Cette envie irrépressible de taper dans le ballon s'exprime en tout lieu et en tout temps. Si Madïn est d'une grande timidité dans la vie, il ne l'est pas du tout lorsqu'il a un objet rond à portée de pied. «Même à la crèche, il faisait ça, si bien qu'on me le faisait souvent remarquer par les responsables», se souvient la mère. «C'est simple : il a appris à jouer au ballon avec le trotte-bébé.» Voilà donc une nouvelle vocation pour les trotte-bébés, censés uniquement aider les enfants à marcher !
Un reportage dans Téléfoot à 6 ans et demi !
Devant ce besoin de s'éclater en football, le papa inscrit Madïn au Hommelet Sport Culture, un petit club de sport de Roubaix. Il avait 4 ans et se débrouillait bien, plutôt même très bien. Au bout d'un an, son père l'inscrit dans un club à Lesquin, petite ville de la banlieue sud de Lille. C'est dans ce club que les premiers exploits de Madïn sont révélés au grand public. En effet, à l'occasion de matches joués entre poussins, il fait montre d'une classe inouïe et d'une habilité balle au pied hors du commun, se jouant d'adversaires plus âgés que lui et affichant une efficacité incroyable devant le but. Des images sont enregistrées sur des téléphones portables, puis avec des caméscopes et, grâce à ce média universel qu'est l'Internet et aux sites très populaires de partages de vidéos YouTube et Dailymotion, Madïn se laisse découvrir au monde entier. Dribbles, roulettes, passements de jambes, reprises de volée, râteaux, petits ponts, grands ponts : toute la panoplie est réunie dans ce bout de garçon qui ne fait pas encore un mètre. Les images sont tellement saisissantes que même l'émission sportive culte de TF1, Téléfoot, lui a consacré un sujet l'année passée, alors qu'il avait 6 ans et demi, comparant (déjà !) Madïn Koroghli à Zinédine Zidane.
«Pour nous, c'est les études en premier, le foot après»
Habiter au nord de l'agglomération lilloise et jouer dans un club au sud n'est pas très pratique, surtout lorsqu'on commence sa scolarité. En effet, Madïn, en dépit de son talent prometteur en football, ne devait pas moins entrer à l'école. Alors, pour des raisons de proximité, il quitte le club de Lesquin au bout d'une année et rejoint celui de Wasquehal, ville limitrophe de Roubaix et qui, de plus, a l'avantage d'être un club avec des moyens, car ayant déjà évolué en deuxième division française. Ainsi, le petit peut suivre sa scolarité le plus normalement du monde tout en continuant à explorer sa vocation footballistique. «Pour moi, c'est clair : le football passe en deuxième position», tranche Mohand. «Le foot est acquis pour lui, car il fait des prouesses que des enfants qui ont deux fois son âge n'arrivent pas à réaliser. Cependant, une éventuelle carrière de footballeur est aléatoire. Qui sait ce que réserve la vie ? Peut-être qu'il sera –que Dieu nous en préserve- malade ou atteint d'une blessure qui l'empêcherait de continuer. Donc, les études sont importantes. Au moment voulu, il tranchera», argumente-t-il. C'est pourquoi ses parents sont à cheval sur l'école. Ils supervisent ses devoirs à la maison, ils sont toujours en contact avec ses enseignants, ils vérifient ses notes. «Lors du dernier trimestre, il s'est classé 8e sur 28. C'est dire que, fort heureusement, il n'a pas que le football en tête», fait remarquer le papa. Et la maman de préciser : «Le directeur de l'école et ses enseignants sont au courant qu'il s'agit d'un épiphénomène et ils font le nécessaire pour l'entourer et le protéger.»
«Il n'ira dans aucun centre avant ses 12 ans»
Protéger le petit, c'est le leitmotiv des Koroghli. «Ce n'est qu'un enfant et il doit être mis à l'abri de toutes ces influences. Regardez-le : il est dans son petit monde d'enfant, dans sa bulle, baignant dans l'insouciance. Je ne laisserai personne le perturber», clame le papa. C'est que la médiatisation prend des proportions énormes. Il y a quelques semaines, un reportage lui a été consacré par Al Jazeera Sport. «J'avais exigé du reporter que je valide le reportage avant sa diffusion, mais il l'a diffusé sans que je le vois et cela m'a mis en colère. J'ai obtenu les coordonnées de la direction de la chaîne au Qatar pour les appeler, mais en constatant que le reportage était correct et conforme à la vérité, j'y ai renoncé.» La semaine passée, l'émission 100 % Foot sur M6 a également consacré un sujet à Madïn. Alors, des mesures ont été décidées par les parents. Première mesure : désormais, il interdit à quiconque de filmer les exploits de son petit sans son autorisation. Deuxième mesure : il éloigne les dizaines d'agents, de prospecteurs et de représentants de médias qui l'appellent quotidiennement. «Je suis harcelé depuis quelques mois et la cadence s'est subitement accéléré il y a une semaine, avec l'annonce de tous les médias d'Europe de l'intérêt manifesté par les plus grands clubs européens. Les plus collants sont les Anglais et les Italiens. Pas plus tard qu'il y a quelques minutes, on m'a encore appelé d'Italie. Je ne leur réponds plus au téléphone. Je leur dis que s'ils ont quoi que ce soit à me demander, c'est par e-mail.» De même, il rabroue tous les agents et assimilés qui proposent leurs services. «Madïn est bien entouré et il n'a pas besoin d'eux. Nous sommes conseillés par des agents intègres et qui n'ont pas que l'argent comme motivation et nous leur faisons confiance», renchérit la mère. Ce qui est certain, c'est que le petit n'intègrera aucun centre de formation à l'heure actuelle. «Pas avant qu'il ait atteint 12 ans !», assène le papa, déterminé. «Peut-être que d'autres parents auraient cédé à la tentation, surtout que les propositions financières sont plus qu'intéressantes, mais pas nous. L'avenir et l'épanouissement de notre enfant passent avant tout.»
«Notre choix est qu'il joue pour l'Algérie»
Reste la question qui turlupine l'esprit de tous les Algériens. «C'est la question qui tue», plaisante Mohand. Madïn jouera-t-il pour l'Algérie ou bien pour la France ? Même si la question est prématuré (il a jusqu'à l'âge de 21 ans pour trancher, donc encore une marge de réflexion de 13 ans et demi), les parents ont une idée arrêtée. «Bien sûr que nous souhaiterions qu'ils jouent pour l'Algérie ! Nous savons d'où nous venons et nous n'avons pas de complexe sur ce point. Cependant, nous n'allons rien lui imposer. C'est notre souhait et nous ferons de notre mieux pour l'en convaincre, mais c'est sa vie à lui et nul ne sait de quoi sera fait demain», répondent-ils. Déjà, l'environnement algérien dans lequel il évolue à la maison, la présence des oncles et cousins à ses côtés, la forte communauté maghrébine qui vit à Roubaix (c'est la commune de France qui compte le plus fort pourcentage d'étrangers) sont autant de facteurs qui pourraient être favorables à un choix en faveur de l'Algérie, mais c'est une autre histoire. Une histoire qui ne connaîtra son épilogue que dans 13 ans. En attendant, savourons notre fierté (il ne nous reste que ça, en plus de nos yeux pour pleurer) de compter en France un génie du foot «Madïn» Algeria.
Farid Aït Saâda
Des «ghoraf», des roulettes et des reprises comme un grand !
Sur ce terrain synthétique du Centre sportif de Roubaix, le seul parmi une batterie de terrains en gazon, Madïn ignore la ribambelle de gosses qui jouent sur le même terrain. Il n'a d'yeux que pour ce ballon qui le fascine et qu'il a déjà apprivoisé à un âge précoce. Il est là en cette fin d'après-midi hivernale pour jouer au ballon avec son frère aîné Lyès, 14 ans, car, en ce mardi, il n'a pas entraînement à Wasquehal. «A chaque fois que j'ai du temps, je l'amène pour s'amuser», explique son papa. «C'est un hyperactif du foot ! Il est capable de jouer toute la journée sans se fatiguer !» Cela se voit à l'œil nu : il «dévore» les espaces. Comme tout Algérien qui se respecte, il adore tripoter la balle, la conserver, foncer avec, non pas tête baissée, mais avec le sens du dribble aux aguets. Le dribble ? C'est son dada. Son coup imparable ? Le râteau, plus connu chez nous sous l'appellation «ghoraf» que Salah Assad a su magnifiquement élever au rang d'art. Lorsqu'il conclut son «ghoraf» par un double contact, l'adversaire est dans le vent, sinon à terre. Autre geste qu'il accomplit avec une adresse inouïe pour son âge : la reprise de volée. Que le ballon vienne de gauche, de droite ou de face, il sait comment le reprendre avant qu'il ne touche terre. Son père lui sert d'entraîneur pour améliorer sa technique.
* «Tu étais parti en cachette au Stade de France
Madïn est un enfant et ça se voit à son insouciance. Il n'a même pas conscience de l'effervescence qu'il suscite. «Lorsque les premières vidéos commençaient à circuler, des gens du quartier venaient le voir à l'œuvre, par curiosité. Mais le fait qu'ils le voient tous les jours sur le terrain en train de jouer est devenu banal. Actuellement à Roubaix, tout le monde le laisse tranquille.» Cela se sent en ville. Lorsqu'on prononce son nom, personne ne le connaît, mais il suffit de dire «le petit sur Internet» pour que tout le monde dise «Ah, le petit qui joue tout le temps !» C'est qu'il joue vraiment tout le temps. Lorsqu'il voit un ballon, il le prend et il joue avec, point. Sinon, question parlotte, il n'est pas du type très loquace. A peine arrivons-nous à lui arracher quelques mots. Il a fallu que son père raconte une anecdote pour qu'il prononce enfin plusieurs phrases successives. «Je vais souvent au stade. Je suis même souvent parti au Stade de France voir Zidane. Tu t'en rappelles, Madïn ?» Et ce dernier de répliquer, vexé : «Oui, je m'en rappelle, car tu m'avais promis de m'emmener avec toi, mais alors que j'étais parti me changer, tu es parti en cachette.» La vérité vient de la bouche des enfants et la seule vérité que connaît Madïn est celle du foot, sa raison d'être et, certainement, celle de son avenir.
F. A-S.
Algériens de chez l'Algérie
Dans la maison des Koroghli, tout respire l'algérianité : le tapis berbère qui orne le mur, le mandole cher au papa, chanteur de mélodies du terroir, la derbouka qui trône sur la cheminée, la gestuelle toute méditerranéenne des parents qui tranche avec le flegme des gens du Nord… Né en 1963 au village Igariden à Maâtkas (pas loin de Draâ Ben Khedda), Mohand Koroghli a débarqué en France avec ses parents en 1965, à l'âge de deux ans. Son père, émigré venu gagner sa croûte comme des milliers de Kabyles à l'époque, a trouvé du travail à Roubaix et s'y est installé. La maman, elle, est née à Roubaix, mais ses parents, également émigrés et nés à Margheb, petit village pas loin de Bouira, sont restés tellement attachés au bled qu'elle s'est faite l'héritière naturelle de la culture d'origine. Jusqu'à ces dernières années, Mohand partait souvent en Algérie, parfois plusieurs fois par an. La mère y est allée l'année dernière suite au décès de son père. «J'aimerais y aller plus souvent», avoue-t-elle. Le fait qu'il ait choisi d'être chanteur kabyle, alors qu'il a grandi en France, démontre tout son attachement à la terre de ses aïeux. «Avec mon mari, je parle en kabyle. Les enfants parlent en français, mais sans l'air de rien, ils comprennent le kabyle, même s'ils ne le montrent pas», raconte la maman, avant d'ajouter, amusée : «Parfois, Mohand et moi parlons en kabyle pour qu'ils ne comprennent pas ce que nous disons. Mais je les vois tendre subrepticement l'oreille, signe qu'ils comprennent lorsqu'ils le veulent.» Ce qui est certain, c'est que Madïn est fan de musique kabyle. «Parfois, il est turbulent dans la voiture, car hyperactif, mais il suffit que je mette de la musique kabyle pour qu'il se calme et écoute religieusement en dodelinant de la tête», assure le papa.
Un énorme écho au bled
Depuis que des vidéos du petit Madïn circulent sur le net, c'est l'effervescence parmi la famille au bled. «Vraisemblablement, il suscite plus de passion là-bas qu'il n'en suscite ici, car on nous appelle pour nous parler de l'engouement des gens du village alors qu'ici à Roubaix, on ne ressent aucune pression», explique Mohand Koroghli. La maman est elle aussi informée de l'énorme écho que les prouesses de Madïn ont eu auprès de sa famille à Bouira. «Depuis quelque temps, à chaque fois que j'appelle ou qu'on m'appelle, on me parle de ça. On me demande aussi s'il est vrai qu'il ira dans tel ou tel club d'Europe. C'est dingue !»
Même les Turcs veulent le récupérer !
Objets ces derniers temps de beaucoup de convoitises d'agents de joueurs flairant la bonne affaire et des «scouters» (prospecteurs) anglais, Madïn Koroghli fait réagir beaucoup de gens à travers le monde, tous essayant de s'approprier le petit. Sur Internet, la dernière ineptie en date est la tentative de certains internautes turcs de «revendiquer» Madïn. En effet, le nom de famille, Koroghli, a une signification en turc. Le Koroghli est un homme issu d'une union entre un Turc et une femme non turque. Comme le nom Koroghli (et aussi Kouroughli) est très répandu en Turquie, la tentation de récupération est grande chez certains. Cela fait sourire Mohand Koroghli. «Je ne sais pas si un de mes ancêtres a eu un parent turc. Ce que je sais, c'est que je me sens parfaitement et intégralement algérien amazigh.»
Mai 2006, le soir où Madïn a regardé Zizou debout sur son siège
S'il y a une soirée qui restera gravée dans la mémoire du petit Madïn, c'est bien celle d'un certain mercredi 31 mai 2006. Son papa l'avait emmené au stade Félix-Bollaert de Lens pour assister à l'avant-dernier match amical de la France avant le Mondial-2006, contre le Danemark. «C'est simple : tout au long du match, il était debout sur son siège. Je dis bien DEBOUT. Il ne voulait rien rater du match, surtout pas Zidane. Il réagissait à chaque action du match, en vrai supporter, si bien qu'il était devenu l'attraction dans la tribune où nous nous trouvions», raconte le père, amusé. N'ayant pas encore bouclé ses 5 ans à l'époque, Madïn avait déjà le foot de haut niveau dans le sang.
Bientôt des vacances en famille au bled
Les enfants de Mohand Koroghli ne sont jamais partis en Algérie. «Ce n'est pas que je ne veuille pas les y emmener. Il se trouve qu'il y a un problème de temps. Lorsqu'ils sont en vacances scolaires, moi je travaille car c'est durant les vacances qu'il y a des spectacles et des concerts. Je peux prendre quinze jours, mais ce n'est pas intéressant d'aller en famille juste pour deux semaines», explique le père de famille. Toutefois, il songe sérieusement à de vraies vacances prochainement en Algérie. «Nous louerons quelque chose au bord de la mer. Je veux passer de vraies vacances au bled», promet-il.
Et le père est… Mohand Azar
Le nom de Madïn Koroghli commence à être connu parmi les initiés du football grâce notamment aux nombreuses vidéos relatant ses exploits qui circulent sur les sites Internet YouTube et Dailymotion. Ce que très peu de gens savent, c'est que son papa est aussi quelqu'un de connu parmi une autre catégorie d'initiés, celle des amateurs de la chanson kabyle. En effet, le père du jeune prodige algérien n'est autre que le chanteur Mohand Azar (c'est son nom d'artiste, «azar» signifiant «racine» en kabyle), connu surtout par le public de la communauté kabyle établie en France. Il a sorti plusieurs albums (dont certains sont commercialisés en Algérie) et a animé plusieurs concerts. Exerçant alternativement le métier d'organisateur de spectacles, il a organisé plusieurs concerts à Roubaix ou dans la région, avec comme animateurs de nombreux chanteurs algériens.
Madïn, le Berbère qui a le «dïn»
Pourquoi le prénom de Madïn ? Nous n'avons pas manqué de poser la question aux parents, d'autant plus que ce prénom n'est pas très usité en Algérie. «A chacun de nos enfants, nous recherchons toujours un prénom qui est à la fois en relation avec la culture algérienne et dont la prononciation est légère pour une assimilation facile dans la société française», nous ont-ils expliqué. En plus clair, dans un pays où il peut y avoir de la discrimination juste à l'énoncé d'un prénom, il était important de protéger leurs enfants, tout en évitant de les déraciner de l'Algérie. Des études sérieuses, relayées par des émissions de télévision, ont démontré qu'il était plus facile d'être accepté pour un emploi lorsqu'on se prénomme Jean ou Virginie plutôt que Kaddour ou Messaouda. Pour éviter d'éventuelles discriminations, des parents algériens donnent à leurs enfants nés en France deux prénoms, l'un algérien pour la famille et les amis, et l'autre français pour la carrière professionnelle. Les Koroghli, eux, ont opté pour une solution intermédiaire. «Les prénoms de nos quatre enfants (Lyès, Kenza, Madïn et Lahna) ont été soigneusement choisis, parce qu'ils sont à la fois algériens et légers. Madïn est un prénom berbère qui, de plus, peut dire en arabe «quelqu'un qui a la foi» car il comporte la racine «dïn». Donc, il veut dire un Berbère attaché à son «dïn», à sa religion.»
Que de contre-vérités sur Internet !
Le petit Madïn suscite un tel engouement que beaucoup de contre-vérités circulent sur le net à son sujet. Chaque média, dans une course effrénée à la surenchère de l'information, ajoute un détail souvent aberrant pour montrer qu'il est le plus «à jour» en matière d'informations le concernant.
Première aberration : un média arabe a mis que le nom du petit est Mohamed Madïn. «Certains veulent lui coller du Mohamed coûte que coûte ! C'est dingue !», s'insurge le papa. C'est ce dernier qui est Mohamed (Mohand en kabyle). Deuxième aberration : un autre site soutient que le petit est né en Algérie et qu'il est arrivé à Roubaix à l'âge de 3 ans. «Complètement faux ! Il est né à Roubaix et il n'est encore jamais parti en Algérie !» Troisième aberration : toujours sur le net, il est affirmé que son père est un ancien footballeur d'élite. «J'ai joué au foot, mais comme tout le monde, en amateur, avec des matches dans le quartier et au lycée quand j'étais petit et des parties entre amis les week-ends quand j'ai un peu grandi, mais je n'ai jamais été footballeur d'élite !»
* «J'en ai marre de corriger tous les médias !»
Si les aberrations se concentraient sur le net, ce serait demi-mal. Or, il y en a même dans les grands médias ! «France 4 a dit un jour n'importe quoi sur Madïn. Alors, j'ai pris le téléphone et j'ai appelé le directeur de la rédaction. Il a été surpris que je l'appelle ! Je lui ai dit que je tenais à ce que l'erreur soit rectifiée.» Mais la série des bourdes a continué sur d'autres médias, à tel point que Mohand a rendu les armes. «A un certain moment, je me suis résigné à ne plus rien rectifier. C'était un engrenage. N'importe qui écrivait ou disait n'importe quoi. J'en ai marre de corriger tous les médias ! Alors, j'ai décidé d'isoler mon fils de tout et de laisser dire et médire. Le plus important est de ne pas occulter l'essentiel : «Je sais où je vais.»
F. A-S.


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