«Que ce soit les Français ou les Algériens, on n'a pas le droit de s'envoyer des pics» Christophe Josse est l'un des plus célèbres journalistes sportifs de Canal+. Il commence sa carrière en tant que correspondant à Saint-Etienne sur France Inter. Il fera ensuite ses débuts à la télévision sur Eurosport puis rejoint Canal+ qu'il quittera pour France Télévisions en 2000, puis travaillera pour TPS et commente les matchs de Ligue 1 aux côtés de Daniel Bravo, Estelle Denis (l'épouse de Raymond Domenech) et Emmanuel Petit jusqu'en 2007. Il sera aussi journaliste occasionnel à M6, pour laquelle il commente les matchs de Coupe UEFA et de Coupe Intertoto avec l'ancien Auxerrois Jean-Marc Ferreri. En juin 2006, il commenta des matches de la Coupe du monde aux côtés de Christophe Dugarry. Sept ans après son départ, il revient sur Canal+ pour laquelle il commente la grande affiche de la Ligue des champions avec Reynald Denoueix. A eux deux, ils forment la paire la plus crédible et la plus appréciée de Canal+ en matière de football. Nous l'avons rencontré dans les tribunes du stade de Soccer City, à la fin du match Ghana-Uruguay, toujours en compagnie de Reynald Denoueix, bien évidemment. Sans le connaître, on a déjà une idée de ce qu'est Christophe Josse. C'est-à-dire égal à l'image du parfait gentleman sympa et chaleureux. C'est avec le sourire et la bonne humeur qu'il nous a accordé cet entretien dans lequel il nous a fait sentir la grandeur de sa personne et, surtout, celle de son cœur. Appréciez la chaleur humaine de ce frère français. Quel est votre avis sur la prestation de l'équipe d'Algérie ? On a vu une équipe d'Algérie avec du potentiel, incontestablement. Quoi que, à mon avis, il n'a pas manqué grand-chose pour une réussite supplémentaire. C'est sûr qu'il y a eu du bon, mais aussi du moins bon. C'est quoi le moins bon que vous ayez vu ? Je crois qu'il y a un petit manque de constance qui est préjudiciable dans cette équipe d'Algérie. Ce n'est pas très méchant. Mais dans l'ensemble, l'Algérie possède une équipe assez homogène et c'est assez intéressant, vraiment ! Moi, j'en avais fait mon deuxième favori pour une qualification en 8es de finale, après l'Angleterre. Mais ça n'a pas été le cas, malheureusement. Ce fut un échec, comme pour la plupart des équipes africaines. Mais il y a eu des signes encourageants en tout cas. Que pensez-vous de la prestation des Algériens face à l'Angleterre ? Quand je parle de signes encourageants, je pensais justement à ce match, car je crois que l'Algérie avait les moyens de battre l'Angleterre ce jour-là. C'est dans cette rencontre avec la prestation qu'elle a réalisée qu'on a vu que l'Algérie pouvait rivaliser avec les plus grands de ce monde, sur la planète football. L'Algérie va attaquer une seconde phase de reconstruction de l'Equipe nationale et cela passera forcément par une tentative de chiper à la France des jeunes talents comme Feghouli, Brahimi, Tafer et Belfodil. Qu'en pensez-vous en tant que Français ? Ce que j'en pense, c'est que les joueurs qui choisissent la sélection algérienne ne doivent pas le faire par défaut. Je veux dire par là, qu'il faut qu'ils aient une vraie envie de le faire, afin de représenter leur pays, d'honorer le maillot qu'on porte. Il ne faut absolument pas que ce soit par défaut… Qu'il y ait un engagement total du joueur, c'est ça ? Oui, il faut qu'il y ait un engagement total de la part du joueur. Une implication incontestable, sinon ça ne marchera pas et les gens le verront tôt ou tard dans la réaction du joueur. Si on le fait avec la volonté de le faire totalement, alors ça marchera parfaitement. Si le joueur le fait parce qu'il n'a pas réussi à intégrer l'équipe de France, il aura toujours une forme de frustration, un sentiment d'inaccomplissement et peut-être même d'aigreurs et d'amertume. Et cela pourrait être préjudiciable au rayonnement de l'équipe et à la fraternité qui devra exister au sein d'un groupe représentant la sélection d'un peuple. Pensez-vous qu'un joueur comme Feghouli, dont on a abusé un peu médiatiquement en France, pourrait être dans ce cas de figure que vous évoquez et aller voir du côté de l'Algérie juste pour se venger des médias français ? Si Feghouli opte pour l'équipe d'Algérie juste parce qu'il est en colère contre certains faits qu'il a pu vivre en France, ce ne sera pas la meilleure manière de faire pour réussir. Il ne faut pas qu'il y aille avec un esprit de revanche. Maintenant, s'il a envie d'honorer la sélection algérienne, eu égard à ses origines et tout, il faut qu'il le fasse de son cœur, car dans ces moments, c'est le cœur qui compte, pas la tête. S'il décide de surchauffer sa tête à cause de quelques histoires qu'il a vécues en France, alors je pense sincèrement qu'il fait fausse route, car il ne réussira pas à se projeter de la sorte, pleinement serein sous le maillot algérien. Il faut qu'il le fasse de tout son cœur et c'est tout. Quand on vous dit que dans nos deux pays, il y a des flèches qu'on s'envoie des deux côtés par rapport à ce sujet en disant que l'Algérie est l'équipe bis de la France, par exemple, ou alors la sortie honteuse du journal Libération au sujet de l'Algérie. Comment le prenez-vous justement du côté français ? Vous savez, aujourd'hui, on n'a pas de leçons à donner à qui que ce soit, quand on est du côté français, quand on regarde ce qui se passe ailleurs. Il faut qu'on regarde avec une vraie tendresse ce qui se passe en Algérie, parce que cette équipe algérienne est composée de joueurs qu'on connaît bien. Ils ont grandi chez nous, avec nous et parmi nous sur le territoire français. Mais on n'a pas le droit de s'envoyer des pics. Je crois qu'il faut qu'on vive les expériences et les aventures des uns et des autres avec beaucoup de tendresse. Ce sera bien pour le sport, mais ce sera aussi bien pour les deux peuples.