«Ce n'est pas une régression d'aller jouer en Algérie» Walid Cherfa veut jouer en Algérie la saison prochaine. Pour rebondir en club, mais surtout pour intégrer enfin les Verts. Son agent est en négociations avec un grand club de la capitale. Il ne le dit pas encore, mais c'est sans doute l'USM Alger. Racontez-nous un peu votre saison à Albacete ? J'ai signé en janvier parce que j'étais signataire à Gironna dont le président a démissionné en plus du coach et du directeur sportif. C'était devenu ingérable, puisque c'est eux qui m'ont fait signer mon contrat. C'est eux qui m'ont fait venir. Après leur départ, je me suis retrouvé avec un nouvel entraîneur qui n'avait aucune envie de me garder, sans même m'avoir vu m'entraîner. Il a eu la correction d'être clair dès le départ en me disant qu'il a ramené un autre latéral gauche avec lequel il voulait travailler. Il m'a donc demandé de me préparer à chercher un autre club. A ce moment, il ne me restait plus assez de temps pour trouver un autre club. C'était le 31 août, si nos souvenirs sont bons, n'est-ce pas ? Exactement ! J'ai résilié mon contrat précisément le 31 août à 23 heures ! Est-ce que j'avais le temps de faire autrement à une heure de la fin du mercato ? Bien évidemment non. Et pourtant, j'avais des contacts sérieux avec Reims qui voulait me faire signer ; mais le 31 aout à 23 heures… c'était vraiment compliqué. Je me suis donc mis à m'entraîner tout seul à Toulouse, pendant quatre mois. C'était dur à vivre, surtout quand on voit que les championnats étaient bien lancés. Pourquoi le choix d'Albacete au mercato d'hiver ? Mon manager m'a appelé pour me dire qu'il avait deux offres sérieuses pour moi. C'était le Recreativo Huelva et Albacete. J'avais donc le choix entre ces deux clubs, mais au final, j'ai décidé d'opter pour Albacete pour la simple raison que c'est celui qui m'avait montré le plus d'envie de me faire signer. Avec le Recreativo, j'avais compris que j'allais être un second choix pour le coach. C'est ce qui m'a fait décider de signer à Albacete. Et pourquoi ça n'a pas marché avec Albacete ? Arrivé à Albacete, j'ai joué quatre matchs avec l'entraîneur Antonio Calderon qui a fini par être viré. J'ai encore joué trois matchs avec le nouveau qui s'appelle David Vidal et qui m'avait fait totalement confiance, comme son prédécesseur. Mais là encore, il a été viré à son tour. On a épuisé trois entraîneurs en l'espace de cinq mois. Du jamais vu ! Arrive enfin le troisième entraîneur, Mario Simon, qui s'occupait jusque-là, de l'équipe réserve. A sa nomination, le club était quasiment sûr de descendre en deuxième division. Il a donc écarté les quatre joueurs qu'il savait certains de quitter Albacete. J'en faisais partie bien sûr. Comment expliquez-vous cette stagnation au niveau de votre carrière ? J'aurais pu aller au Deportivo et tout se serait passé autrement. Je ne suis pas mytho, car je les ai eus moi-même au téléphone. J'ai discuté avec le directeur sportif du club. Ce n'est pas quelqu'un qui m'a raconté cela. Mais les changements d'entraîneurs m'ont fait encore entrave. Le contact était réel, ils me suivaient, mais comme je n'ai pas rejoué avec Tarragone, ça devenait encore plus compliqué. C'est Tarragone qui m'a encore bloqué dans cette histoire. N'est-ce pas frustrant de ne pas sortir la tête de l'eau, alors que vous auriez pu jouer le Mondial ? Et comment ! J'avais tellement espéré de cette sélection, j'étais tellement proche du Mondial qu'en apprenant que je n'avais pas été retenu, j'avais senti comme si le ciel me tombait sur la tête. Racontez-nous les contacts que vous avez eus avec la FAF avant le Mondial ? Le coach Saâdane m'avait appelé avec Zoheir Djelloul et ils m'ont dit que Djelloul allait se déplacer pour me voir jouer. J'étais très heureux de pouvoir enfin être si proche de l'EN. Mais quand il est venu, par malheur, le coach ne m'a pas fait jouer pour les raisons que j'ai évoquées. Djelloul m'a appelé après le match pour me dire de continuer à travailler et ne pas baisser les bras. Quand j'avais vu la liste des 23 pour le Mondial, je ne vous cache pas ma frustration alors… J'en voulais à mort aux dirigeants de Tarragone. Ils m'ont fait beaucoup de mal en me privant du Mondial. Qui vous a appelé pour vous inviter en Afrique du Sud ? C'est El hadj Raouraoua en personne. Vous ne pouvez pas imaginer le bien que ça m'avait fait de l'entendre me parler au téléphone. Je me suis senti renaître. C'est là que j'avais mesuré combien cet homme avait de la classe. Il aurait pu laisser le soin à sa secrétaire ou à quelqu'un d'autre de la FAF. Mais je suis sûr qu'il avait mesuré la douleur et la frustration dans laquelle je me trouvais. Tant que ça ? Oui, et bien plus encore ! J'avais longtemps espéré être de la partie. Toute ma famille et mes proches avaient espéré avec moi, en vain. Vous savez quoi ? Le coup de fil de Monsieur Raouraoua m'a effacé la douleur de la frustration. Que vous a dit Raouraoua au téléphone ? Il a eu l'incroyable gentillesse de me dire : «Inch'Allah, tu accepteras que je t'invite venir vivre l'aventure avec nous en Afrique du Sud.» Je l'ai remercié vivement pour ce geste de seigneur et par la suite je lui ai dit que je devais d'abord voir avec mon agent si j'allais avoir le temps de m'absenter avant la signature de mon nouveau contrat. Il s'est montré très compréhensif. Je l'ai rappelé donc une semaine plus tard pour lui demander si l'invitation tenait toujours et j'ai accepté d'y aller avec grand plaisir. Sincèrement, j'étais très fier que Raouraoua, Saâdane et Djelloul m'aient appelé. Après le Mondial, j'ai appelé El hadj Raouraoua pour le remercier d'avoir pensé à moi. C'était la moindre des politesses. Je n'oublierai jamais son geste. Lui, c'est un radjel ounass ! Comment aviez-vous vécu la Coupe du monde 2010 ? J'y étais avec les familles des joueurs, et donc on a vu tous les joueurs. J'ai vibré avec l'équipe comme tous les Algériens. Avec quels joueurs aviez-vous parlé en Afrique du Sud ? A vrai dire, quand on vu les joueurs, je me suis fait tout petit. Je me suis mis à l'écart, dans un coin pour ne pas trop déranger. Mais à un moment donné, j'ai vu Anthar Yahia venir vers moi pour me serrer la main. Je me suis présenté à lui en lui disant. «Je suis Walid Cherfa.» Anthar m'a regardé dans les yeux et a souri. Il m'a répliqué en me disant : «Mais je sais parfaitement qui tu es. Je te connais bien moi aussi.» J'ai tout de suite apprécié l'homme qu'il est. Il a joué parfaitement son rôle de capitaine. Il m'a donné son numéro de téléphone et on a gardé contact à ce jour. Saâdane ? (Il le dit en arabe). H'chemt mennou. Je n'ai pas osé aller lui parler, tout comme aux autres. Je leur ai juste serré la main. L'arrivée de Vahid Halilhodzic, un commentaire ? C'est un coach qui a prouvé, il est respecté en France, il a l'image d'un dur, mais la rigueur est importante dans ce métier. Il veut rebondir pour ne pas rester sur un échec en terre d'Afrique. Il a envie de rebondir comme les Verts, ça tombe bien. Quel sera votre avenir cet été, sachant qu'il y a très peu de chances de vous voir encore à Albacete ? Oui, la reprise était pour mercredi passé, après on a convenu avec l'agent que je n'y vais pas. Je suis jusqu'à juin 2012. On s'est mis d'accord que je parte sans indemnités de transfert. Vous qui venez fréquemment en Algérie, ne seriez-vous pas tenté par une aventure d'une ou deux saisons avec un des grands clubs algériens, histoire de vous relancer et de vous faire connaître surtout du sélectionneur national ? Oui, c'est intéressant, après, j'irai pour me relancer et pourquoi pas gagner un titre, ça dépend du projet sportif du club. Oui, je serai enchanté de jouer en Algérie. N'est-ce pas une régression de venir jouer en Algérie alors que vous avez encore la possibilité de rebondir dans un club en Europe ? Vous savez, l'humilité est une des valeurs formidables qu'on a en Islam. C'est vrai que je pourrais trouver facilement un club en France, en Grèce, en Ecosse, en Espagne, en Turquie ou ailleurs ; mais j'ai envie cette fois d'être dans un environnement favorable pour me relancer. J'ai envie de jouer chez moi, pour montrer ce dont je suis capable. J'estime qu'on ne me connaît pas assez chez moi. J'ai envie que le sélectionneur national soit proche de mes prestations afin de taper aux portes de l'Equipe nationale. Si je signe en Algérie, c'est pour me relancer, mais c'est surtout pour atteindre mon rêve de jouer pour mon pays. J'estime qu'en Espagne, on ne m'a pas assez vu, j'étais comme caché. En Algérie, je serai bien exposé et ce sera à moi de montrer ce que je sais faire sur le terrain. Et puis, ce n'est pas dévalorisant comme on peut le croire de jouer en Algérie. C'est un championnat professionnel qui est certes à ses débuts, mais qui va finir par s'organiser de mieux en mieux à l'avenir. Vous ne serez pas le seul à venir d'Europe jouer en Algérie… C'est sûr ! Les exemples ne manquent pas. Lemmouchia a commencé et d'autres ont suivi et ça leur a bien réussi. Le cas d'Ismael Bouzid est édifiant dans ce sens. Il a eu l'humilité d'aller jouer au Mouloudia d'Alger et aujourd'hui, il est sollicité en Europe et il est toujours international. On ne doit pas être complexés d'aller jouer en Algérie. Il faut savoir faire preuve d'humilité et se remettre en cause. Parfois, il est bon de reculer pour mieux sauter. C'est ce que j'ai envie de faire, inch'Allah, même si le fait de jouer en Algérie ne signifie pas un recul en soi. Moi, j'ai besoin de retrouver toutes mes sensations. Rejouer un maximum de matchs, une saison pleine et chargée pour retrouver les automatismes. Personnellement, je n'ai aucun complexe à jouer en Algérie. Mieux encore, je serai fier de jouer chez moi. Si je signe cet été avec un club algérien, sachez que je serai très heureux d'y être. Car j'aime trop le pays. La preuve, c'est que j'y vais trois ou quatre fois dans l'année. Quelle serait votre préférence, la JSK, l'USMA, l'ESS, le MCA ou l'ASO ? Sincèrement, je n'ai pas de préférence. Que ce soit la JSK, l'USMA, le MCA, l'ESS, le MCO ou l'ASO qui vient de gagner le titre, tous ces clubs sont respectables et je sais parfaitement que chacun d'eux est capable de gagner le championnat. Qui aurait pensé que le Mouloudia d'Alger allait jouer sa survie en fin de saison après avoir gagné le titre l'année dernière ? C'est pareil pour l'ESS qui a lâché prise devant la grosse envie affichée par Chlef. La JSM Béjaïa aussi progresse, tout comme le CRB qui a réalisé un bon parcours. Vous voyez donc bien que toutes les équipes se valent. Par quoi allez-vous être le plus tenté ? Le projet sportif du club passera bien avant toute autre considération. J'ai envie de vivre une très belle aventure avec un club algérien. Dans ma tête, je rêve de jouer des matchs passionnants et de vivre l'ambiance des stades d'Algérie et toute la ferveur qu'il y a autour. Je sais que ce sera un bon tremplin pour atteindre les Verts. Il y a donc des chances de vous voir dans le championnat d'Algérie cet été ? Oui, il y a des gens qui discutent avec les dirigeants de certains clubs algériens et j'attends de voir ce que cela va donner. Si ça avance, tant mieux, sinon il y a d'autres contacts en Europe. Votre priorité, c'est l'Algérie ou l'Europe ? Sincèrement, au fond de moi, c'est l'Algérie qui me tente cette saison. J'ai envie de jouer devant mes compatriotes pour pouvoir convaincre d'abord les miens. Après, je sais que c'est une question de mektoub. C'est Dieu qui décidera au final de tout.