«Si notre adversaire n'était pas l'Algérie, on aurait demandé à recevoir à Alger» Kuweider Muftah, le président de la Fédération libyenne de football, a accepté hier en milieu de journée, peu avant la finale de la coupe arabe, de répondre à nos questions au bout du fil. Le premier responsable du football libyen s'est dit déçu de voir au moins une équipe arabe dire adieu à la CAN à l'issue de ce troisième tour. Il parle aussi de beaucoup de choses, voici le contenu. La sélection libyenne sera dans l'obligation d'affronter un gros morceau lors du dernier tour des éliminatoires de la CAN 2013, à savoir l'Algérie, comment vous avez accueilli cette nouvelle ? Je ne vous cache pas que j'ai été très déçu en apprenant que la sélection libyenne allait affronter son homologue algérienne lors du dernier tour des éliminatoires de la coupe d'Afrique des nations 2013, et ce, pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'on voulait que la Libye tombe sur une sélection d'Afrique noire et l'Algérie aussi, dans le but d'avoir au moins quatre pays arabes présents à ce tournoi, après l'élimination de nos frères égyptiens. Ce tirage verra ainsi au moins une équipe arabe faire ses adieux à cette compétition prestigieuse. La deuxième, c'est que nous avons hérité d'un adversaire très solide, faut-il le souligner. La sélection algérienne reste sur une très bonne CAN en 2010 et aussi une participation à la dernière Coupe du monde. Vous pensez que votre tâche sera impossible ? Non, ce n'est pas ça, mais il faut avouer quand même qu'on aura beaucoup de difficultés. Tout d'abord, il y a la différence de moyens. La sélection algérienne a les moyens qu'il faut pour réussir, contrairement à nous. Puis, la Libye traverse une situation très difficile que tout le monde connaît. Il y a le championnat qui est interrompu, la majorité de nos joueurs sont issus du championnat national, on a quelques professionnels uniquement. Néanmoins, dans le football, il n'y a pas d'impossible. C'est-à-dire ? Dans le football, l'impossible n'existe pas. N'importe quelle équipe peut créer l'exploit. Il faut prendre l'exemple de la sélection centrafricaine qui a réussi un grand exploit en éliminant l'Egypte, ténor du football africain. Donc, vous voulez rééditer le coup de la RCA, mais avec l'Algérie ? Ecoutez, il y a une grande différence entre la Libye et la République centrafricaine. Historiquement, la Libye est une nation qui respire le football plus que la RCA. Sur le plan des résultats, on a réussi de meilleures performances qu'eux, même en compétitions interclubs. Cela dit, nous savons que le match de l'Algérie sera très difficile, mais nous allons nous préparer pour réussir un bon résultat. Une qualification à la CAN 2013 est un objectif pour nous. Pour vous, quelle est la difficulté face à l'Algérie ? Peut-être que l'Algérie sera plus avantagée puisque ses joueurs sont dans la majorité des professionnels, ils seront à ce moment-là bien préparés, après avoir fait un grand travail avec leurs équipes. Sur le plan technique, il y a un certain avantage pour l'Algérie, mais sur le terrain, il y aura la volonté pour réaliser un bon coup. Vous savez, le football libyen s'est développé et s'est débarrassé de ce complexe qui le handicapait auparavant. La question que se posent beaucoup d'Algériens et même des Libyens concerne la ville qui va abriter cette rencontre... La Fédération libyenne de football souhaite programmer cette rencontre face à l'Algérie sur le sol libyen. On est en contacts permanents avec la FIFA, car nous collaborons avec cette instance. Dans le cas où on refuserait de nous domicilier en Libye, on sera ainsi obligés de choisir un pays neutre. Et là, vous me donnez l'occasion de vous raconter une anecdote. Allez- y... Lundi dernier, soit avant le tirage au sort, j'étais avec mon ami et frère Mohamed Raouraoua lors de la cérémonie d'ouverture de la Coupe arabe des nations des moins de 17 ans. C'était une occasion pour moi de lui faire une proposition concernant la domiciliation des matchs de la sélection libyenne lors des éliminatoires du Mondial 2014 et de ce dernier tour des éliminatoires de la CAN 2013 sur le sol algérien. Mon ami Raouraoua a accepté la proposition et nous a même souhaité la bienvenue en Algérie. Hier (Ndlr : jeudi), Raouraoua m'a appelé en début de soirée pour me dire en souriant que l'aller aura lieu à Annaba et le retour à Alger (rires). Donc c'est une hypothèse ? Non, c'était une discussion amicale et conviviale avec mon ami Mohamed Raouraoua que j'estime beaucoup. Si on était tombé sur une autre équipe, on aurait préféré jouer chez vous en Algérie... En cas de refus de domicilier le match sur le sol libyen, quelle sera votre proposition ? On choisira à ce moment-là un des pays voisins, à savoir l'Egypte, en premier lieu, suivi du Maroc puis de la Tunisie. Voilà l'ordre des pays qu'on va choisir. Les autres pays voisins, comme le Tchad et le Niger, sont à écarter. Je ne pense pas que ce sera des solutions. En fonction de quoi allez-vous choisir le pays ? C'est clair, nous choisirons le pays par rapport à la proximité, les conditions d'accueil et surtout la sécurité pour les deux équipes et les officiels. Nous n'allons pas emmener l'Algérie dans un pays où elle ne sera pas en sécurité, c'est sûr, vous pouvez être à l'aise de ce côté. Ne pensez-vous pas que jouer le match à Tripoli est presque impossible vu la situation sur le plan sécuritaire ? On peut programmer un match à Tripoli, je suis persuadé qu'il ne s'y passera rien. D'ailleurs, que ce soit à Tripoli ou à Benghazi, la sécurité existe et s'est même améliorée. Mais jouer à Tripoli ou même à Benghazi face à l'Algérie, constituera un danger pour notre équipe nationale... (Il nous coupe). Non, je ne suis pas d'accord avec vous. La sélection algérienne sera très en sécurité ici en Libye. Il y a d'excellents rapports entre les deux peuples et qui ne datent pas d'aujourd'hui. Ce n'est pas parce que l'Algérie a accueilli des personnes pour des raisons strictement humanitaires que l'équipe d'Algérie craindra l'aspect sécuritaire. Le peuple libyen a toujours été reconnaissant envers son homologue algérien pour sa position et surtout par rapport à son histoire et sa glorieuse guerre de Libération nationale. Il y a un respect mutuel entre les peuples algérien et libyen. D'ailleurs, si on remonte dans le passé, il ne s'est jamais produit le moindre incident lors d'une confrontation entre les deux sélections ou les clubs représentants les deux pays. Il ne faut rien craindre. D'ailleurs, moi, je me suis rendu en Algérie lors de l'inauguration du nouveau siège de la Fédération algérienne de football en mai dernier,et j'ai été accueilli vraiment royalement. Je ne m'attendais pas à ça, et j'en ai été très ému. Y a-t-il une délégation de la FIFA ou de la CAF qui va se rendre à Tripoli dans les prochains jours ? Oui, effectivement. En principe, une délégation de la FIFA viendra lors du mois de Ramadhan prochain, puisqu'il y aura une manifestation footballistique internationale qui aura lieu sur le sol libyen. Ce sera une occasion pour cette instance de faire le constat sur place sur l'aspect sécuritaire. On est très optimistes, à la fédération, de pouvoir jouer nos matchs chez nous. Quand allez-vous saisir la CAF pour l'informer de votre souhait de recevoir l'Algérie à Tripoli ? Ces jours-ci. Nous allons lui demander carrément de programmer notre match face à l'Algérie sur le sol libyen, précisément au stade de Tripoli qui demeure le premier choix, le second étant celui de Benghazi. Ça devrait se faire dans trois ou quatre jours. Et en cas de refus de la CAF de nous laisser jouer sur le sol libyen, on demandera à jouer soit en Egypte, au Maroc ou en Tunisie. Pour la Tunisie, ça risque d'être compliqué... Oui, je suis d'accord avec vous. Les autorités tunisiennes peuvent refuser notre demande car ce match peut drainer la grande foule des deux côtés. Lorsque nous avons reçu le Cameroun à Sfax, ils n'ont permis qu'à un petit nombre de supporters de rentrer et ce, pour des raisons strictement sécuritaires. Je pense que l'Egypte ou le Maroc vont accepter, au cas où ce ne serait pas à Tripoli.