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Ali Benarbia : «J'étais fier qu'on m'appelle l'Algérien de Manchester !» 2e partie
Publié dans Le Buteur le 29 - 11 - 2009

«Moi, j'ai toujours été arabe à 100%, que ce soit dans ma façon de vivre, ma façon de jouer ou celle d'agir. Je suis algérien à 100 %.»
Votre refus de jouer pour l'Algérie durant 10 ans était motivé par un souci de pousser les dirigeants de la FAF à mieux considérer les joueurs internationaux, c'est ça ?
Parfaitement ! Il fallait que quelqu'un le fasse parmi les joueurs. Je ne voulais pas que les internationaux aient des soucis avant de répondre à une sélection. Qu'ils viennent d'Europe par avion ou en taxi de Tlemcen, Blida ou Constantine, je voulais que les joueurs n'aient plus à se soucier sur ce plan-là. Puisque ce sont des joueurs qui vont représenter les couleurs du pays, on leur doit un peu de considération. Vous imaginez comment c'était ? Le joueur devait payer le billet de sa poche et attendre quelques mois avant d'être remboursé. Ce n'est pas une question d'argent, car pour l'Algérie, les joueurs sont tous prêts à payer le double pour vêtir le maillot de la sélection. Mais du respect pour tous et l'arrêt du bricolage ! C'est ce que je réclamais.
Mais bien avant qu'on vous sollicite, la FAF avait déjà arrête de demander aux joueurs d'acheter les billets avec leur propre argent, non ?
A mon arrivée en sélection, j'avais discuté de ce problème avec les dirigeants de l'époque et on m'a fait comprendre que ces pratiques ne se reproduiront plus jamais. C'était un engagement sincère de la part des responsables de la FAF. Demandez aux anciens internationaux et vous allez voir qu'ils vous diront exactement la même chose. Je suis heureux que ces pratiques aient cessé. Ce n'est pas moi qui ai arrêté ce problème, mais bien la FAF. Les gens ont compris qu'il fallait que ça cesse. Mais moi, je n'ai aucun passé international avec l'Algérie. Je ne peux pas me permettre de parler de l'Equipe nationale.
En équipe de France aussi, un problème d'assurance avait opposé un joueur de l'OL qui s'était blessé chez les Bleus et Aulas avait poussé une gueulante contre la FFF.
Non, en France le problème qui s'était posé était lié au salaire du joueur international quand il se blesse. Parce que lorsque vous avez de gros salaires à gérer, qui va les payer quand le joueur international se blesse en sélection ? Les Anglais par exemple viennent de régler ce problème chez eux en décidant de les payer. Mais moi, je ne parlais pas de cela, car au moment où j'avais posé ce problème, j'avais précisé à Harchache et Belbey de ne pas jouer en sélection, parce qu'ils n'avaient pas de club. Je leur avais dit : ‘si vous vous blessez, qui s'occupera de vous ? Qui prendra en charge les frais de vos soins ?
Omar Belbey s'était blessé et la FAF avait pris en charge tous les soins…
Eh bien, si vous avez la réponse à cela, vous n'avez qu'à appeler Belbey et Harchache pour voir ce qu'ils en pensent. Harchache, depuis qu'il a eu ce problème, n'est plus réapparu en Equipe nationale. Je l'avais pourtant bien averti en lui disant : ‘‘Tu n'as pas de club, tu ne peux pas jouer en Equipe nationale.''
Les gens continuent de douter de votre réponse concernant vos hésitations à venir jouer pour l'Algérie. Beaucoup d'Algériens restent persuadés que vous attendiez secrètement une convocation d'Aimé Jacquet en Equipe de France. Qu'avez-vous à répondre ?
Il faut que tout le monde sache une chose : à l'âge de 16 ou 17 ans, c'est moi-même qui avais entrepris les démarches pour jouer avec l'Equipe d'Algérie…
Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Personne ne semble être au courant de cela…
Mais ceci n'est pas très important pour moi. Tous les joueurs de ma génération s'étaient retrouvés en sélections régionale ou nationale. Mais moi, qui étais le meilleur d'entre eux, et cela je le dis en toute modestie et avec toute la gêne que je ressens, je leur ai dit tout de suite que mon souhait était d'aller rejoindre la sélection de mon pays, l'Algérie. J'ai donc vitre fait d'entreprendre les démarches pour me rapprocher de la sélection algérienne, alors que j'étais encore adolescent.
Qui aviez-vous contacté à l'époque ?
J'ai dit à mon père de se rapprocher des responsables de la Fédération algérienne et il est allé voir le Consulat d'Algérie du côté de Narbonne, près de Montpellier, pour leur dire mon intention de rejoindre la sélection.
Que lui avait-on répondu ?
Ils lui ont dit qu'ils allaient transmettre cela à la FAF et qu'on allait m'appeler bientôt. Mais je n'étais pas le seul dans ce cas. Malheureusement, il y en avait beaucoup avec moi. Nous étions plusieurs joueurs à vouloir rejoindre l'Equipe d'Algérie, mais le passage était fermé pour nous tous. Le pont n'était pas encore fait entre les jeunes Algériens nés en France et la sélection nationale. C'était encore très fragile. On voyait que les Espagnols, les Italiens, les Portugais voulaient tous jouer pour leur pays et nous aussi on voulait faire pareil. Mais les échos qui nous parvenaient du bled n'invitaient pas les joueurs à courir vers la sélection d'Algérie. Quand vous voyez un joueur vous raconter qu'il est allé jouer pour l'EN et qu'à son retour, on l'a bloqué pendant une heure et demie à l'aéroport à cause de sa carte du Service nationale, il y avait de quoi hésiter un peu !
Franchement Ali, vous n'avez jamais songé secrètement à jouer pour l'Equipe de France ?
Mais jamais ! Franchement, comment voulez-vous que je pense à l'Equipe de France ou à celle de l'Algérie alors que moi-même je ne me trouvais pas aussi balaise que vous le dites pour prétendre à une sélection avec les Bleus ou les Verts ? Je ne me suis jamais considéré comme un joueur exceptionnel. Le fait de pouvoir jouer en seconde division était déjà un rêve pour moi.
Mais après avoir progressé, ça vous a donné des idées, non ?
Mais j'avais déjà fait le pas vers la sélection algérienne, puisque j'avais discuté avec Rabah Madjer, lorsqu'il était sélectionneur. Mais je lui avais demandé si toutes les conditions étaient favorables pour accueillir de manière professionnelle, les joueurs et qu'on puisse se retrouver facilement en sélection. Mon souci était de faire ce fameux pont entre la sélection d'Algérie et les joueurs évoluant en Europe.
Les Algériens ne comprenaient pas votre refus de rejoindre les Verts, alors qu'à la même époque, George Weah, élu meilleur joueur du monde, était allé jouer avec le pauvre Liberia en ayant pris le soin d'acheter des tenues complètes pour ses coéquipiers de sa propre poche. Vous comprenez à votre tour que ça gêne un peu les Algériens ?
Le supporteur algérien qui me dit cela aussi bien en France qu'en Algérie, je le comprends totalement. Car moi, si j'étais à la place des supporteurs, j'aurais exactement la même réaction. Mais par contre, est-ce qu'on vous a dit que moi aussi j'ai ramené pour 60 personnes des tenues complètes pour la sélection d'Algérie ?
Non, on ne le sait pas !
Eh bien, c'est normal parce que chez nous, on ne dit pas ces choses-là. Mais puisqu'on m'oblige à me justifier, je le dis aujourd'hui.
C'était où et quand ?
Je l'ai fait pour l'Equipe nationale à Annaba, lorsqu'on y avait joué deux matchs amicaux (contre la Bulgarie, le 14 novembre et la Roumanie le 15 décembre 2000, ndlr). J'avais offert à chaque joueur une tenue complète qui comprenait les survêtements, les shorts, les maillots avec le nom de chaque joueur dessus. Et à la fin du match, tous les joueurs avaient gardé les deux maillots de l'Equipe nationale, avec le chasuble, le survêtement et tout le reste. Est-ce qu'on vous l'a dit ça ? Est-ce que vous m'avez entendu claironner cela ? Jamais !
Cela vous honore de l'avoir fait surtout dans la discrétion.
Mais moi, si j'ai fait cela, je voulais que, avec l'aide de la FAF, on parvienne à envoyer un message aux jeunes qui évoluent en France ou en Europe pour qu'ils sachent que les choses s'améliorent en sélection d'Algérie. Je voulais que les jeunes puissent franchir la mer sans hésiter et aller défendre la sélection de leur pays sans regrets. Le pont était déjà installé de la sorte, mais je ne l'ai jamais revendiqué. Je ne fais pas les choses comme ça.
Les gens restent encore un peu sceptiques en évoquant Benarbia. Votre image n'est pas très claire aux yeux des supporteurs des Verts. Vous les comprenez ?
Mais moi, je ne me soucie pas de cette image qu'a de moi le supporteur algérien. Ce que je veux, qu'on retienne de moi, par contre, c'est que là où je suis passé, que ce soit à Monaco, Bordeaux, Paris, Manchester, on dit toujours de moi que Benarbia est un joueur algérien. On n'a jamais dit que j'étais un Français d'origine algérienne. Et vous savez pourquoi ? Tout simplement parce que j'ai toujours été fier d'être algérien.
On n'en doute pas.
Moi, lorsque j'étais au PSG avec ce brassard, les médias disaient Benarbia, l'international algérien, pareil quand je portais le brassard de capitaine à Manchester, les gens disaient toujours qu'Ali Benarbia est le premier joueur algérien à avoir porté le brassard en Angleterre. A Bordeaux, lorsqu'on m'avait élu meilleur joueur de Ligue 1, c'était l'Algérien que j'étais qui était mis en avant. A Monaco aussi, lorsque j'avais gagné le titre de champion de France et que j'avais joué une demi-finale de Ligue des Champions contre la Juventus de Zinédine Zidane, c'était l'Algérie qui était représentée à travers moi. On m'a toujours qualifié de meneur de jeu algérien. C'est cette image que j'ai toujours véhiculée fièrement depuis mes débuts à Martigues. Je me rappelle très bien que Guendouz venait de quitter le club et on disait que le jeune Algérien Ali Benarbia avait débuté chez les pros à l'âge de 17 ans. C'était toujours l'Algérie qui était mis en avant. Je ne comprends pas qu'on puisse douter de mon algérianité. A chaque fois que je me promène à Paris ou ailleurs, il n'y a que les Algériens qui viennent m'aborder et discuter avec moi.
Vous devriez être fier de voir aujourd'hui donc ce fameux pont installé entre les Algériens d'Europe et les Verts, non ?
Parfaitement ! Vous ne pouvez pas imaginer combien je suis content de voir la FAF structurée et les joueurs aller sans problème en Equipe nationale. Vous allez voir comment la mentalité va changer en France. Je suis sûr que même si un joueur atteint le niveau de Zidane, il ne foncera pas la tête baissée vers les Bleus. L'équipe d'Algérie a désormais son mot à dire dans le choix des grands talents binationaux. Le pont est solide et l'Algérie peut espérer récupérer ses meilleurs joueurs, quel que soit le pays dans lequel ils sont nés.
Est-ce que vous comprenez les hostilités de la part des supporteurs algériens à votre égard, à vous et Brahim Hemdani, pour avoir attendu l'âge de 31 ans avant de dire oui à l'EN ?
Je ne tiens pas à m'étaler sur cette question dans les journaux, mais sachez que j'en ai beaucoup parlé avec des amis et que, à chaque fois que je voulais régler ce problème au niveau de la FAF, je ne trouvais pas d'interlocuteur sérieux. La seule personne qui m'a rassuré au niveau de la FAF était M Kezzal. Et dès que j'ai répondu à l'appel, je l'ai confronté à la presse pour qu'il mette en marche les structures nécessaires pour accueillir les joueurs internationaux.
Mais comment pouvez-vous expliquer cela aux supporteurs qui vous ont attendu toutes ces années ?
Les jeunes supporteurs qui ne connaissent pas comment ça fonctionnait au niveau de la FAF ne peuvent pas comprendre cela. Mais ceux de ma génération peuvent aisément leur expliquer tout le bricolage qui y régnait et qui a fait que des joueurs hésitaient à faire le pas. On n'était pas sûr de pouvoir rejoindre son club à temps pour préparer un match aussi important que celui de la Ligue des Champions. Les choses ont changé par la suite, comme je l'ai vécu après le match contre l'Angola où j'ai pris tout de suite l'avion pour rejoindre mon club. Mais avant, ce n'était pas évident de le faire.
Mais vous aviez tout de même des moments de joie en sélection, non ?
Bien sûr ! La fierté de porter le maillot de l'Algérie suffisait déjà à mon bonheur. Il y a aussi le fait de rencontrer des hommes que je ne connaissais pas du tout et nouer des liens d'amitié aussitôt, dans une ambiance très sincère.
De quoi vous vous rappelez au juste en EN ?
Par exemple du premier match amical à Annaba. J'avais pris les joueurs pour leur dire que c'est très important que vos parents vous voient à la télé représenter la famille et le pays. Je leur ai suggéré d'aller tous ensemble chez le coiffeur pour soigner chacun son image. On avait débarqué tous ensemble dans un salon de coiffure et le coiffeur était tout étonné de voir tous les joueurs de l'Equipe nationale envahir les lieux. On avait bouché toute la rue ce jour-là. Il fallait qu'on se rase et qu'on se coiffe pour donner une belle image de l'Equipe d'Algérie sur le terrain. Je voulais qu'on soit tous habillés pareil et qu'il n'y ait plus de joueur qui arrivent avec un t-shirt différent ou qui vienne en retard à l'entraînement.
Aujourd'hui, les choses ont complètement évolué au sein de l'EN.
C'est vraiment agréable de voir l'EN aussi bien organisée aujourd'hui. Je pense que cette qualification est le résultat de deux ou trois ans de travail sérieux de la part de gens qui œuvrent autour de l'EN. Mais moi, l'équipe dans laquelle j'avais joué contre l'Egypte, je ne l'avais connue qu'une semaine avant. On ne pouvait pas arriver au même résultat avec des moyens totalement différents. Dans l'EN actuelle, on sent qu'il y a des automatismes dans le jeu, on sent que le groupe vit bien de l'intérieur. Et cela vaut tout l'or du monde.
Comment aviez-vous vécu vos premiers pas en EN ?
La première fois, c'était un peu bizarre, car on s'était retrouvés en match amical entre les pros de France et les locaux. C'était à Lyon. Et chaque équipe voulait que je fasse une mi-temps avec elle. J'étais à Bordeaux à l'époque. Rien que ça, c'était immense pour moi. Que dire du fait de vêtir le maillot national !
Vous saviez au fond de vous qu'un jour ou l'autre, vous alliez dire enfin oui à l'Algérie ?
Vous savez, j'aurais vraiment souhaité venir jouer comme tout le monde, sans avoir à retarder ma venue. Quand je jouais à Monaco, j'étais pratiquement seul à m'entraîner lorsqu'ils allaient en sélection. A Bordeaux aussi. Mes coéquipiers ne comprenaient pas pourquoi je n'allais pas en sélection moi aussi. Mais souvent, c'était parce qu'on ne m'avait pas appelé. Mais je n'ai jamais dit pourquoi on m'a mis à l'écart.
A quel moment vous a-t-on contacté pour la première fois ?
C'était en 1986 et le président de la République était M. Chadli. J'avais 17 ans.
Le même âge qu'avait Karim Ziani lorsqu'il avait pris sa décision de jouer pour l'Algérie. Vous auriez joué le même rôle que lui en EN, si vous aviez accepté de dire oui aux Verts, non ?
Mais moi je suis né en 1968. Lorsque j'avais 17 ans, le contexte était complètement différent. Je vous dis que le pont n'était pas encore établi en 1986. Il n'y avait aucun joueur de mon âge à avoir répondu à la sélection. Ce n'était pas pareil. De plus, lorsqu'on m'a appelé, je n'étais rien du tout. Je venais juste d'intégrer l'équipe première de Martigues et j'avais fait un gros match contre Marseille. C'est quand l'OM voulait me recruter que l'Algérie s'était intéressée à moi.
Cela veut dire qu'on vous a repéré assez tôt !
Mais à ce moment-là, l'Algérie avait déjà la grande équipe de 1986. Qu'est-ce que j'étais moi à cette époque ? Rien comparé à eux.
Mais vous auriez tout gagné si vous aviez dit oui. Vous auriez sans doute été champion d'Afrique avec Madjer en 1990 ! Qu'est-ce qui a bloqué cette première sélection ?
J'étais un peu dans le flou à cette époque. Je ne savais pas ce qui m'attendait là-bas. Je ne connaissais pas trop le pays, même si on allait des fois en vacances avec mes parents. Je vous dis que c'est parce qu'il n'y avait pas encore ce pont qui pouvait inciter les jeunes de mon âge à aller les yeux fermés en sélection. C'était tout nouveau.
Et vous aviez répondu quoi à ce moment ?
Si vous voulez, j'avais toujours posé les mêmes questions liées aux assurances des joueurs, une fois sélectionnés.
On va essayer de rester franc avec vous Ali. Pensez-vous que les gens vont comprendre qu'à 17 ans, un adolescent peut penser aux assurances et à toutes les garanties ?
C'est parce que vous ne me connaissez pas que vous dites cela. Il faut savoir que lorsque j'avais démarré en équipe première, il n'y avait aucun joueur de mon âge qui jouait en meneur de jeu, que ce soit en Ligue 1 ou 2. Les meneurs de jeu avaient tous 26, 27 ans. Le fait de donner de telles responsabilités à un gamin de 17 ans prouve qu'il en a un peu plus dans la tête que dans les jambes. Vous comprenez ? Pourtant, il y avait des joueurs beaucoup plus forts que moi.
Mais le fait de dire ces choses là ne va pas aider les jeunes qui se retrouvent dans le même cas que le vôtre et qui vont penser à faire une carrière comme celle de Zidane, au lieu d'opter très jeune pour l'Algérie.
Je n'ai aucun conseil à donner aux jeunes, parce qu'ils ont tous leurs parents ou leurs proches pour les diriger. C'est à eux de faire leur choix tous seuls. Je n'ai rien à voir avec ces jeunes, car moi, je suis né en Algérie. J'ai toujours voulu jouer pour l'Algérie. J'aurais peut-être pu avoir l'occasion de jouer pour l'Equipe de France. Mais mon cœur est incomparable au leur. Car j'ai toujours baigné dans l'idée de ne jouer que pour l'Algérie, du fait que j'ai toujours été algérien dans mes papiers. Alors que les jeunes nés en France ont tous la possibilité de jouer pour les deux pays. Moi, j'ai toujours été arabe à 100%, que ce soit dans ma façon de vivre, ma façon de jouer ou celle d'agir. Je suis algérien à 100 %. Tous les Maghrébins de France se reconnaissaient en moi quand ils me voyaient jouer. C'est aux jeunes d'aujourd'hui que ce choix va se poser, pas à moi.
Dans quel sens au juste ?
Vous n'avez qu'à voir l'Islam et sa progression en France. Ça va bientôt devenir la première religion de France. Les jeunes vont donc gagner des repères en tant que Français musulmans et leurs connaissances de l'Algérie sont plus approfondies qu'étaient les miennes au même âge. Ils vont donc facilement pouvoir opter pour la sélection d'Algérie. Ce n'était pas pareil pour moi en 1986. Même Zidane avait dit qu'il avait toujours préféré jouer pour l'Algérie. Mais lorsqu'on voulait le faire venir en Algérie, même Zidane n'était pas encore le joueur que tout le monde connaît.
Vous avez sans doute connu Zidane en personne. Quelle anecdote avez-vous à raconter de Zizou ?
Un jour, on allait affronter Zidane et la Juventus avec Monaco, et Fabien Barthez m'avait fait comprendre que Zidane ne parlait pas beaucoup. Mais une fois sur le terrain, ils nous a vus discuter longuement et ça l'avait étonné et ses yeux étaient restés écarquillés.
Vous aviez discuté de quoi, de l'Algérie ?
Non, on parlait en fait de son frère Nouredine qui avait fait les essais en même temps que moi, au centre de formation de Martigues.
Et Nouredine Zidane n'avait pas été retenu, on suppose, non ?
Malheureusement non. Et pourtant, il était très, très fort. Et on disait que Nouredine était plus fort que Yazid (le prénom de Zinédine pour les intimes, ndlr).
Vous connaissez Mehdi Lacen ?
Non.
(On lui explique qui il est et tout le tapage médiatique que ça a fait). Que pensez-vous de sa décision ?
Je pense que c'est une question très personnelle. Il a sans doute ses raisons. C'est à lui de les expliquer clairement pour se faire comprendre. Mais personne ne doit lui imposer quoi que ce soit. C'est à lui de voir ce que le drapeau algérien représente dans son cœur. Tout dépend de ce que ses parents lui ont appris. Il lui suffit de se poser la question suivante : qu'est-ce qui te donnera le plus de frissons, le maillot d'Algérie ou celui d'un autre pays ?
Le fait de voir l'EN aller en Coupe du monde, ça ne vous donne pas des envies d'être dedans ?
C'est sûr qu'on en rêverait tous ! J'aimerais bien que les joueurs savourent chaque instant de ce bonheur dans lequel ils baignent. Qu'ils sachent qu'il y a de très grands joueurs qui n'ont jamais eu ce privilège. A eux de vivre pleinement leur bonheur et de faire en sorte qu'il soit total lors de la Coupe du monde.
Entretien réalisé par Nacym Djender
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