Invité du forum d'El Moudjahid, jeudi passé, le docteur Lotfi Benbahmed, président de l'ordre national des pharmaciens, a estimé qu'il est nécessaire de créer une agence nationale pour la régulation du marché du médicament dans le pays. Au cours de la rencontre où il était question du marché du médicament et des efforts de l'Etat en matière de régulation, le Dr Benbahmed a indiqué que cette agence aurait pour missions le contrôle, l'agrément, l'autorisation à la vente ainsi que la lutte contre la contrefaçon. Le Dr Benbahmed, tout en précisant que le marché du médicament «n'était pas un marché ordinaire», a mis l'accent sur le fait que pour une meilleure efficience de la future agence du médicament, il est impératif qu'il y ait en son sein des experts en mesure d'apporter des «réponses techniques à des questions techniques». Le conférencier a observé que la future agence du médicament se devait de jouer le rôle d'» interlocuteur» des laboratoires nationaux et étrangers dans le but de mener à bien la politique du médicament en Algérie. Selon lui, et au regard de l'augmentation «inéluctable» des besoins des Algériens en médicaments durant les 5 prochaines années, il y a lieu, à tout prix, de renforcer les mesures incitatives (foncier, crédit, marges, fiscalité, formation...) pour le développement de la production nationale. Evoquant la situation du pharmacien hospitalier, le président de l'Ordre national des pharmaciens n'a pas hésité à le qualifier de «parent pauvre du système national de santé publique», surtout en l'absence d'un statut particulier pour ce métier, à l'instar de ce qui existe dans les pays voisins. Sur la contrefaçon en matière de médicament, le Dr Benbahmed a estimé que l'Algérie était «relativement» épargnée par ce phénomène. «Il n'y a pas de vente de médicaments via Internet. En outre, contrairement à certains pays voisins, le médicament n'est pas vendu dans les marchés des produits de consommation courante, s'est félicité le Dr Benbahmed, relevant toutefois la nécessité de combattre la contrebande «ahurissante» sévissant dans ce domaine aux frontières avec le Maroc. L'orateur a par ailleurs fait savoir que le marché du médicament en Algérie avait quadruplé dans la mesure où de 400 millions de dollars il y a quelques années, il est aujourd'hui évalué à quelque 1,6 milliard de dollars, ce qui rend incompréhensibles les pénuries qui touchent certains types de médicaments. S'agissant de l'exercice illégal de la pharmacie, le conférencier a fait savoir que des dizaines de pharmacies, de sociétés de distribution et de laboratoires d'analyses avaient été proposés à la fermeture pour location de diplôme, absence de pharmacien directeur technique ou de pharmacien biologiste. «Il y a des pharmacies sans pharmaciens alors que paradoxalement, beaucoup de diplômés universitaires dans le domaine sont au chômage», a regretté le Dr Benbahmed. Pour le Dr Benbahmed, «les bonnes pratiques, la responsabilité pharmaceutique et la formation» sont les missions que le conseil de l'ordre se propose d'accomplir. Tout en fustigeant les médecins qui prescrivent des médicaments non disponibles en Algérie, le conférencier a dénoncé, à l'occasion, ceux d'entre eux qui prescrivent des molécules «obsolètes». «Les prescripteurs ont assurément un grand rôle à jouer dans la réussite de la politique du médicament dans notre pays», a souligné le Dr Benbahmed tout en réfutant la thèse selon laquelle les Algériens consommaient trop de médicaments. Le Dr Amir Touafek, vice-président de l'ordre national des pharmaciens chargé de l'industrie, également président de la commission nationale de la déontologie et de la réglementation, s'est demandé, pour sa part, si la production locale était en mesure de répondre aux «pathologies de demain». «Les unités de production dont disposent le pays ne sont pas en mesure de fabriquer des médicaments pour la sclérose en plaque, l'Elsheimer ou les différentes formes de cancer», a-t-il déploré. Pour lui, et dès lors que «la maladie n'attend pas», il devient «vital» que les cinq (5) plus grands laboratoires mondiaux implantés en Algérie fabriquent des produits biotechnologiques.