Les marchés sont pris d'assaut par les ménagères et les chefs de famille à l'occasion du ramadan. Malgré la hausse qui a touché pratiquement tous les prix des fruits et légumes, y compris ceux de saison, les Algériens n'ont pas dérogé à la tradition de faire des provisions en prévision du mois sacré. Dans les marchés, les chalands s'arrêtent à différents étals pour remplir leurs couffins de victuailles. L'un des légumes les plus prisés est évidemment la courgette, ingrédient incontournable pour la fameuse Chorba, plat traditionnel qui embelli la table familiale. Le prix de ce produit agricole est passé en moins d'une semaine de 60DA à 90 voire 120 DA dans certains marchés. Les autres légumes n'ont pas non plus été épargnés par cette tendance haussière qui intervient chaque année dès que Ramadan pointe son nez. Le prix des haricots verts est ainsi passé de 80 dinars à 140 dinars. La laitue est cédée à 100 dinars. La tomate qui d'habitude est vendue pour 20 à 25 DA, est désormais commercialisée pour pas moins de 60 DA. Les hausses varient dont de 50à 150%. Elles ne répondent de ce fait à aucune logique. Les détaillants assurent qu'ils ne gagnent pas grand-chose. Ils soutiennent que ce sont les intermédiaires qui gonflent leurs marges et pénalisent par ricochet aussi bien les consommateurs que les commerçants finaux. « On la malchance d'affronter la colère des clients qui nous reprochent souvent de vendre trop cher alors que nous même nous achetons la marchandise à peine moins chère », fulmine Mohammed, marchand de légumes au Marché Tnache (Alger-centre), visiblement peu incommodé par les odeurs nauséabondes qui se dégagent d'un avaloir d'eaux usées juste au dessous de son étal. « Plusieurs vendeurs comme moi ont cessé leurs activité car ça ne rapporte pas beaucoup et ça ne leur permet pas de nourrir leur famille. Certains préfèrent travailler comme agent de sécurité ou autre avec un salaire fixe plutôt que d'avoir à batailler pour assurer un minimum de rentabilité », a-t-il ajouté. Au marché de gros de Boufarik, dans la wilaya de Blida, l'incessant va-et-vient des véhicules utilitaires venus s'approvisionner en fruits et légumes dénote la disponibilité des produits. Les 48 wilayas sont approvisionnées à partir de ce site. «Vous trouverez de tout ici et pour certains légumes et fruits, il y a plusieurs variétés et choix », indique Amar, commissionnaire dans ce marché. Il réfute les accusations lancées contre sa profession, selon lesquelles ils sont à l'origine de la flambée des prix. « Certes la production est disponible mais il y a plusieurs opérateurs maintenant qui ont investi dans le stockage et qui font en sorte à maintenir les prix qui leur conviennent. Ils travaillent sans facture ni aucun document au vu et au su de tout le monde alors que nous, on doit prendre en compte les frais de stockage, le montant de la location qui est très élevé, le transport de la marchandise et les impôts, surtout les impôts», relève-t-il en triturant un pan de sa chemise à carreaux soigneusement repassée. « Les agriculteurs vendent au plus offrant. Comme ils ne sont pas redevables devant le fisc, ils gèrent leur production comme ils veulent et elle atterri souvent dans l'informel », renchérit Saadi, mandataire lui aussi. Selon lui, s'il y avait traçabilité de la production surtout pour les exploitants agricoles qui bénéficient des aides de l'Etat, les prix seraient plus stables et ne subiraient pas cet effet yoyo. Il estime cependant que les détaillants ont leur part de responsabilité. « L'autre jour je suis allé dans un marché à Alger et j'ai constaté que l'un des commerçant vendait de la pomme de terre de dernier choix au prix de celle de meilleure qualité. Eux l'achètent à moitié prix et les gonflent après en nous accusant de faire dans la spéculation », note-il le visage rouge de colère. Les consommateurs sont ainsi pris en otage entre les détaillants et les mandataires qui se renvoient la balle mutuellement. « Ils sont tous avides du gain facile et ils n'ont pas peur de Dieu », s'indignent Zhor une mère de famille rencontrée dans l'un des marchés de la capitale. « Je fais les courses pratiquement tous les jours et c'est édifiant comment les prix changent du jour au lendemain. Il y a quelques jours, j'avais acheté des oignons pour 30 DA le kilogramme. Je suis revenue le lendemain chez le même marchand pour acheter de nouveau pour les stocker et je les trouve à 40 DA. Ce n'est pas normal », témoigne-t-elle. Elle souligne que les commerçants « n'ont font qu'à leur tête ». « Il est de plus en plus dur de garnir sa table durant le mois de ramadan. Si ça continue comme ça, on va tous devenir des nécessiteux et quémander les couffins du ministère de la solidarité », conclu-t-elle.