Jeudi, le Gouvernement algérien a répondu, par le biais du ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, aux «allégations» de Bruno Tertrais, portant sur l'utilisation des réacteurs nucléaires à des fins militaires. C'est la première réaction officielle de l'Etat algérien après la parution du livre «le Marché noir de la Bombe » par le maître de recherches à la Fondation pour la Recherche Stratégique, Bruno Tertrais. Les milieux politiques et les médias nationaux se sont précipités à réagir à la publication de ce livre polémique, qualifié de «grimoire» et d' «anathèmes». «Les installations du pays sont soumises régulièrement aux inspections de l'AIEA. Celles-ci peuvent avoir à tout moment de l'année. L'Algérie, dans ce domaine, a toujours prôné l'ouverture», a estimé le ministre de l'Energie et des Mines. Chakib Khelil a également déclaré que «l'Algérie a soumis à l'AIEA (l'Agence internationale de l'Energie atomique, ndlr) une demande d'un protocole additionnel au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) ». Et d'ajouter que «l'Etat algérien est entrain de mettre en place toutes les mesures pour la signature d'un protocole additionnel au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)». Pour rappel, ce protocole a été adopté en 1998 et a été signé depuis par une soixantaine de pays sur les 189 Etats membres de l'AIEA. Le protocole porte exclusivement sur la vérification par cette agence, à tout moment, de la comptabilité des matières nucléaires déclarées, relève-t-on. D'après certains propos rapportés par des titres de la presse nationale, ce sont les Etats-Unis qui ont exercé des pressions sur l'Algérie pour la signature de ce protocole additionnel. A cet effet, l'Ambassadeur américain à l'AIEA Gregory Schulte, est venu en Algérie en 2008 pour demander officiellement aux autorités algériennes d'adhérer à ce protocole qui, selon les concepteurs, est une garantie de plus pour la non prolifération des armes nucléaires. Par ailleurs, Chakib Khelil a fait remarquer que des états possédant déjà la bombe nucléaire «n'ont pas été inquiétés par l'AIEA». En fait, le ministre de l'Energie et des mines a fait allusion aux pays comme Israël, le Pakistan et l'Inde qui possède une armada de missiles à ogives nucléaires mais qui n'ont paradoxalement toujours pas adhéré au TNP ! 29 000 tonnes de réserves d'uranium D'après Chakib Khelil, les réserves réelles d'uranium sont de 29 000 tonnes. Ces réserves peuvent, selon le ministre de l'Energie et des mines, faire fonctionner à plein temps deux centrales de 1000 megawatts chacune pendant 60 ans. Pour rappel, les experts internationaux avaient pronostiqué jusque-là ce potentiel à 26.000 tonnes seulement. Il faut savoir que l'Algérie possède deux réacteurs atomiques expérimentaux à Draria et à Ain Oussera. Aussi, l'Etat envisage de construire une autre centrale nucléaire pour la production électrique aux horizons 2020. Et après 2025, il est prévu la construction d'autres centrales pour préparer l'après-pétrole. Pendant l'été 2009, Chakib Khelil a annoncé depuis l'Argentine que «l'énergie nucléaire n'est plus une priorité pour l'Algérie », car elle est «onéreuse». Dans tous les cas de figures, le ministre avait ponctué naguère l'absence d'un consensus stratégique et politique du nucléaire algérien qui n'est pas toujours bien établi. Une nouvelle loi sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique Par ailleurs, Chakib Khelil a annoncé que la prochaine loi sur l'utilisation pacifique de l'énergie atomique sera bientôt soumise au gouvernement pour examen et adoption. Ce texte de loi prévoit, selon lui, la création d'une agence de sécurité et de sûreté nucléaire et une autre sur la recherche et la production. «Nous allons tout faire pour que les futures centrales nucléaires algériennes respectent les normes internationales en matière de sûreté", a-t-il noté. Cette loi nucléaire est attendue par les partenaires étrangers, en exercice en Algérie, dont le groupe atomique français Areva qui souhaite d'exploiter les gisements d'uranium d'El Hoggar. Sur le même registre, l'Algérie et la France ont signé, en décembre 2007, après la visite du p résident Nicolas Sarkozy, une convention de coopération dans le domaine nucléaire civil portant sur la formation, la recherche et l'exploitation des gisements. L'accord a été adopté en 2008 par Euratom, le mécanisme de contrôle européen. L'Algérie a également signé plusieurs accords de partenariat portant sur le développement du nucléaire à des fins pacifiques avec, entre autres, l'Argentine, les Etats Unis, la Russie et la Chine. A priori, la récurrente polémique sur le nucléaire algérien est tombée comme un cheveu dans la soupe dans un monde qui se veut «dénucléarisé». Vaste programme.