La grève des syndicats autonomes est terminée. Les enseignants grévistes ont eu gain de cause de toutes leurs revendications. Aujourd'hui, les élèves de tout le territoire national reprendront les cours. Les syndicalistes- et à leur tête ceux du Snapest, Cnapest, Snte, Unpef, Snapap, Satef et Unpef- jubilent après avoir tenu le défi malgré le fait que l'administration était sourde à leurs doléances. D'après M. Madani, président du bureau régional ouest de l'Unpef, toutes les revendications des syndicats- formulées dans quatre points fondamentaux -à savoir, le régime indemnitaire à effet rétroactif à partir de janvier 2008, les primes du rendement, la révision de la gestion des œuvres sociales mises depuis 1994 sous l'égide de l'UGTA et le problème des contractuels, ont abouti et ce, de façon exhaustive. «On ne peut pas espérer mieux», ajoute-t-il. Même ambiance de jovialité au SNTE. M.Bakraoui déclarera à son tour que la réussite de la grève est totale. Il faut savoir que même les 18 jours de grève seront payés. Concernant l'inextricable gestion de l'éducation et après abrogation de la Loi la concernant, une commission neutre issue de l'Administration sera chargée de gérer ce secteur. Quant au rattrapage du retard enregistré par cette grève, il sera comblé selon un calendrier spécifique à chaque établissement. D'après M.Madani de l'Unpef, qui assure les cours à l'établissement scolaire d'Ibn Sina, «lors d'une réunion organisée hier avec la Direction de l'établissement, il a été décidé que le retard soit comblé à travers des cours de rattrapage selon un calendrier et la première semaine des vacances d'hiver sera supprimée». Une grève pas comme les autres Cette grève n'est pas com-me les autres, les précé-dentes. Elle a ponctué le potentiel mobilisateur des syndicats autonomes qui ne cesse de croître. Une évidence que les pouvoirs publics ne peuvent plus ignorer. Ni jouer à la politique de l'autruche. Le dialogue social est désormais instauré. L'exclusion injustifiée de ces syndicats par le passé est désormais obsolète. Depuis les trois jours de grève des syndicats autonomes de la Fonction publique en février 2008 et la grève unitaire d'avril 2008, à la grève de l'Edu, on constate l'apparition d'un mouvement de résistance sociale. D'après les syndicalistes approchés hier, ce mouvement de résistance se veut perpétuel et s'installera dans la durée. En fait, c'est le vœu pieux des syndicats autonomes. Si l'on s'hasardait à une lecture politique, le recul des luttes politiques du syndicat traditionnel et des partis «timorés» avec leur quête perpétuelle de compromis avec le pouvoir, profite aux syndicats. La réussite de la grève de novembre 2009- traduit aussi la mutation du syndicalisme autonome d'une identité corporatiste- qui l'a toujours caractérisé en syndicalisme unitaire. D'après Farid Cherbal, un universitaire-chercheur et syndicaliste, «cette mutation est particulièrement visible dans le secteur de la Fonction publique où les luttes syndicales associent à la fois les travailleurs des secteurs de l'éducation, de la santé, de l'administration, etc. L'apparition des actions unitaires dans la Fonction publique est essentiellement due au fait que les revendications sont communes». Et d'ajouter : «les syndicats autonomes n'ont de ce fait d'autre option que de transcender leur corporatisme pour revenir au syndicalisme unitaire, seul à même d'instaurer un rapport de force nouveau sur la scène sociale et syndicale. On le voit très bien, c'est la première fois depuis 2003 que les trois paliers de l'éducation nationale sont totalement paralysés. L'impact de cette grève est immense ». Ils donnent deux exemples édifiants qui traduisent à son sens les contradictions qui agitaient et continuent depuis plus d'une décennie l'UGTA : «le renouvellement de la section syndicale UGTA d'Arcelor-Mittal est un exemple de mouvement syndical démocratique et revendicatif. Pour défendre leur usine, leur emploi, les travailleurs d'El Hadjar ont repris en main leur section syndicale. Cela s'est fait de manière très démocratique. Pourtant, ce mouvement s'est opéré à l'intérieur de l'UGTA. Cette contradiction n'est pas un cas isolé. On peut rappeler la coordination des syndicats de l'éducation mise en place dans les années 1990 par le regretté Redouane Osmane ; c'était sous l'égide de l'UGTA. Cette coordination était le véritable ancêtre des syndicats autonomes de l'éducation. Le deuxième exemple nous vient du syndicat UGTA des travailleurs du port d'Alger. Les luttes des travailleurs de ce secteur névralgique par excellence sont tout aussi édifiantes. La dynamique actuelle, insufflée par les syndicats, les syndicats autonomes surtout, est en train de pénétrer, par capillarité, à l'intérieur de l'UGTA. Une dynamique qui accentue les contradictions qui existaient déjà entre l'appareil syndical traditionnel de l'UGTA qui a depuis des années abandonné les luttes revendicatives- pour devenir un partenaire à part entière des pouvoirs publics -et qui a validé toutes les politiques économiques et le segment revendicatif à l'intérieur de l'UGTA qui subsiste et persiste toujours. Conclusion : le syndicalisme revendicatif et démocratique à l'intérieur de l'UGTA n'a pas disparu».