Bien que par la taille de sa population comme par son PIB, l'Algérie présente un marché potentiellement très intéressant pour les investisseurs, de nombreuses contraintes font que celui-ci attire peu les opérateurs logistiques internationaux. Ses infrastructures spécialisées sont peu développées. Le réseau Anima a publié récemment une étude «Investissements prioritaires pour le développement de la logistique en Méditerranée». Le projet est né du constat que, pour les pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) et pour l'Egypte, il existe un potentiel important de progression de l'efficacité de leurs systèmes logistiques. Pour ces pays, largement intégrés à l'économie mondiale, cette marge de progression se traduit par un handicap par rapport aux pays qui les concurrencent sur les mêmes segments de marché, car elle affecte la compétitivité de leurs exportations. Cela a pour conséquence directe de limiter l'attractivité de ces pays pour les investisseurs industriels internationaux, qui craignent de voir leurs marges réduites par les surcoûts qu'impliquent les inefficiences des services logistiques. Ces inefficiences impliquent également un surcoût que doivent supporter les populations de ces pays, et une limitation à la progression de leur niveau de vie. Cette étude se concentre sur les pays du Maghreb et l'Egypte (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte, appelés par la suite pays MATE), et a pour objectif d'identifier des opportunités d'investissements à même d'avoir un impact direct positif sur l'amélioration de la logistique en Méditerranée. «L'Algérie est un grand pays, peuplé et riche en hydrocarbures, ce qui peut être très attractif pour un investisseur. Cependant s'implanter dans ce pays n'est pas chose aisée, et l'environnement des affaires est considéré un des plus difficiles de la région» relève le document. L'Algérie, souligne-t-on, s'est lancée dans une politique de grand travaux, avec notamment le projet d'autoroute Est-ouest, doté d'un budget de 7,8 milliards d'euros, ou le plan national d'investissements ferroviaires, estimé à plus de 11 milliards d'euros, et montre des signes d'ouverture vers l'économie de marché, comme le traduit la privatisation d'une partie de ses infrastructures portuaires. Selon l'estimation d'Anima, le secteur des services logistiques, qui est très peu développé et dominé par des acteurs locaux, pourrait représenter un marché de plus de 300 millions d'euros. Les dysfonctionnements actuellement existants laissent penser qu'il existe également un marché pour le conseil spécialisé et la formation. «Les opportunités existent donc, dans le BTP, les équipements, les services logistiques, le conseil, etc.… mais les conditions du pays incitent à une certaine prudence» affirme ANIMA. Selon le document les ports les mieux desservis d'Algérie sont Alger et Oran, avec respectivement 7 et 8 services hebdomadaires réguliers, suivis par Bejaia et Skikda (4 services hebdomadaires). Comme dans le cas du Maroc, l'offre de services est dominée par Maersk (32% des capacités), suivi de prés par le suisse MSC (30%), et par le français CMA-CGM (20%). Les services de Maersk relient les grands ports algériens avec les hubs de la compagnie localisés à Algesiras et Gioia Tauro. MSC opère principalement les routes triangulaires Valence-Barcelone-ports algériens. La CMA-CGM dessert les ports algériens depuis sa base principale de Marseille, alimenté depuis Barcelone et Gênes. Dans le domaine de la logistique, les situations sont assez différentes en fonction des pays. Le Maroc et la Tunisie, qui ont été caractérisés antérieurement comme d'importants exportateurs de produits manufacturés, ont déjà commencé à accomplir des progrès significatifs. Le Maroc est certainement le pays le plus avancé dans ce domaine, ce qui se traduit par l'implantation d'opérateurs globaux et le développement au cours des dernières années d'infrastructures spécialisées dans les grands pôles économiques du pays, dans les régions de Casablanca ou Tanger. «L'Algérie présente la situation la moins favorable» estime ANIMA. Bien que par la taille de sa population comme par son PIB, le pays présente un marché potentiellement très intéressant pour les investisseurs, de nombreuses contraintes font que celui-ci attire peu les opérateurs logistiques internationaux. Ses infrastructures spécialisées sont peu développées. En matière d'inventaire des principaux investissements réalisés dans le transport maritime en Algérie, le document souligne qu'à Oran, Alger, Djendjen, les différents projets de modernisation ont pour objectif d'augmenter les capacités d'accueil de conteneurs.» Oran va acquérir de nouveaux équipements et agrandir ses quais, DP World prévoit de moderniser le terminal de conteneur d'Alger et de rénover intégralement Djendjen ; Portrek veut agrandir le port de Bejaia et améliorer les zones d'entreposage des conteneurs ; le port de Skikda a prévu un investissement de 19 millions d'euros pour de nouveaux équipements et l'amélioration de ses accès terrestres » rapporte Anima. Le document cite aussi le projet «Cap 2025» de Cevital. «Implanté à Cap Djinet (wilaya de Boumerdès), à quelque 65 km d'Alger, «Cap 2025» est encore un projet hypothétique, porté par le seul secteur privé (groupe Cevital), et non présenté dans les pages qui suivent. Il s'agit de desservir la capitale dont le port est très contraint par son insertion urbaine, par nouveau port en eaux profondes, doté de plus de 20 km de quais liés à une zone industrielle intégrée d'une superficie de 5 000 ha» indique Anima. Le projet, objet d'un partenariat international, concentrerait 30 milliards de dollars d'investissements –avec en particulier 3 complexes industriels (pétrochimie, aluminium, sidérurgie), un chantier naval, la fabrication d'automobiles et de conteneurs, la production d'électricité, le dessalement de l'eau de mer, ainsi qu'un millier de PME. «Vaste programme… qui explique l'horizon temporel (2025) mentionné dans le nom du projet. Mais l'Algérie ne peut se contenter de regarder les opérations Tanger Med ou Enfidha, et sa puissance industrielle peut lui faire regretter son manque d'initiatives en matière logistique» conclut Anima.