L'amélioration du système de soins en Algérie exige la contribution de «toutes les composantes sociales», a estimé le professeur de chirurgie cancérologique Mohamed Brahim Farouk, lors d'une conférence animée à Oran. Le développement de la qualité des soins nécessite «l'ouverture d'un débat impliquant les usagers, les mouvements associatifs, les professionnels de la santé, les sociétés savantes et les organismes partenaires du secteur de la santé», a précisé le spécialiste dans sa communication présentée lundi soir à l'Institut de développement des ressources humaines (IDRH). «Par ses valeurs humaines, la santé est un facteur de cohésion de la société favorisant la paix sociale», d'où l'intérêt, selon le Pr Farouk, d'une contribution générale à l'émergence des «conditions et modes d'expression à même de donner un contenu et un aboutissement concret au débat». L'intervenant qui est également chef de service de chirurgie au Centre hospitalo-universitaire d'Oran (CHUO), a abordé son exposé par un historique de l'évolution du système de santé, rappelant qu'à la fin de la période coloniale le pays comptait deux hôpitaux universitaires, deux centres anti-cancer, deux hôpitaux régionaux, 112 établissements polyvalents et 14 autres spécialisés. Il a relaté qu'à l'époque, les malades disposaient de 38.000 lits, soit un lit pour 300 habitants, plus 10.000 autres lits privés, «mais ces équipements ne profitaient pas à la population algérienne, et c'est pour ça qu'à l'indépendance tous les indices de la santé étaient au rouge: une espérance de vie de 50 ans, une mortalité infantile de 180/1.000, des maladies transmissibles hydriques (MTH) et le paludisme à l'état endémique». Pour couvrir les besoins en santé de la population, le pays disposait d'un effectif médical composé de 500 praticiens dont seulement 280 Algériens, et pour faire face à cette situation l'Etat avait pris des mesures urgentes comme de renforcer le corps médical par l'appel à la coopération étrangère et l'instauration d'une mi-temps obligatoire dans le secteur public pour les médecins du secteur privé, a indiqué le Pr Farouk. La période 1974-1989 a vu le nombre de praticiens passer de 6.715 en 1979 à 19.528 en 1988 et l'on note une baisse notable des maladies transmissibles, un recul de la mortalité infantile et un allongement de l'espérance de vie, a-t-il ajouté en observant que les actions entreprises dans le domaine de la santé à cette époque se sont déroulées dans un contexte d'accroissement des revenus pétroliers et de croissance économique élevée. A partir de 1990, le système de santé s'essouffle en raison de plusieurs facteurs imputés, entre autres, à la gratuité de la médecine, à l'économie de marché, et au manque de ressources financières. Au début des années 2000, la réforme hospitalière est inscrite comme priorité majeure dans l'espoir d'apporter les correctifs indispensables pour une réelle adaptation des structures de santé aux changements socio-économiques ainsi qu'à l'évolution épidémiologique. «L'on ne peut que regretter de n'avoir pas vu les professionnels de la santé, la société civile et les partis politiques se mobiliser pour la concrétisation de cette réforme hospitalière, premier pas vers une réforme profonde de notre système de santé», a déploré le Pr Farouk. Cependant, et en dépit des insuffisances rapportées encore aujourd'hui, «l'essentiel des pathologies lourdes ainsi que le plus grand nombre de patients sont pris en charge par le secteur public», a-t-il souligné, relevant que «de nombreuses techniques médico-chiururgicales de pointe sont réalisées dans des structures publiques, outre les programmes nationaux de santé qui continuent à être réalisés avec beaucoup de succès». L'ouverture du secteur de la santé au privé et la libéralisation du marché du médicament ont été également abordés, le Pr Farouk Brahim préconisant à ce titre davantage d'engagement de la part du secteur privé dans le cadre d'une complémentarité avec le secteur public.