Farouk Ksentini juge que le dossier des disparus de la tragédie nationale devra être clos, en l'absence de preuves contre les hypothétiques bourreaux. Les familles des victimes devraient donc attendre pour faire leur deuil, se réjouissant d'indemnisation. Lors d'une rencontre-débat organisée par le quotidien El-Moudjahid, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), a déclaré que le terrorisme a fait des ravages dans les esprits et lancé ses démons même dans les institutions d'Etat. En avocat du banc des accusés, il dira que «sur le plan civil, l'Etat est responsable. Mais pas coupable des disparitions», a-t-il soutenu. Ponctuant dans la foulée le «chaos» dans lequel le terrorisme avait plongé le pays pendant ces années-là et les ravages qu'il avait commis, il a indiqué que «le terrorisme n'a pas fait que des ravages sur les corps, mais surtout dans les esprits des gens», explique Farouk Ksentini. En tout cas, le défenseur des droits de l'Homme algérien juge qu'«il est impossible d'identifier, aujourd'hui, les responsables des disparitions durant la tragédie nationale». Farouk Ksentini a expliqué que la démarche des familles des disparus -est légitime et parfaitement concevable- sur le plan intellectuel. Cependant, dans la pratique, elle est «irréalisable». Et de s'interroger : «comment identifier, plus de dix ans après, des agents de l'Etat qui se seraint rendus coupables de ces disparitions». «En vérité, personne ne sait ce qui s'est passé. Il n'y a ni archives ni témoignages », a-t-il noté. Se demandant aussi : «comment demander donc à l'Etat de se lancer dans des procès contre des personnes sans la moindre preuve ni de dossier substantiel».Dans cette optique, il a indiqué, que «personnellement, je préfère que la page soit tournée», soulignant qu' «aucun pays n'a réussi à identifier ni à juger des auteurs de disparitions. Même s'il y a eu des semblants de procès (dans un pays d'Amérique Latine), presque anecdotiques», a-t-il dit. «Il faut être raisonnable et se rendre à l'évidence que l'Etat n'a pas à se lancer dans des opérations qu'il sait par avance perdues», a encore souligné M. Ksentini. Il a affirmé, néanmoins, n'avoir «jamais cessé» de dialoguer avec les familles des disparus pendant la tragédie nationale qui demandent vérité et justice. Tout en indiquant que la question des disparus est «réglée partiellement», il a souligné que la CNCPPDH «a fait tout ce qui était en son pouvoir pour amener l'Etat à reconnaître sa responsabilité civile dans cette affaire et admettre, par la suite, le principe de l'indemnisation».