Cinq années après son entrée en vigueur, l'accord d'association Algérie-Union européenne n'a pas eu l'effet escompté ; celui de booster les exportations hors-hydrocarbures et d'attirer des investissements directs productifs. A terme, l'accord d'association (dans l'esprit de Barcelone) devait construire une zone de prospérité partagée. Force est de constater, quelques années seulement de la mise en œuvre de l'arrangement, que l'Algérie s'est sentie quelque part flouée. Le ministre des Finances, Karim Djoudi, a exprimé, une nouvelle fois, à Bruxelles (Belgique), la déception de l'Algérie, soulignant que «les flux d'investissements européens sont endeçà des attentes de l'Algérie. «Je considère, après près de cinq années d'application de l'accord, que les flux d'investissements européens sont en deçà des attentes de l'Algérie, en particulier ceux destinés à promouvoir la diversification de son économie et de ses exportations. L'objectif de cet accord est de bâtir une relation globale et un partenariat gagnant-gagnant -devant se traduire- notamment par l'accroissement des investissements directs européens en Algérie», a-t-il déclaré dans un discours prononcé au Forum de Crans Montana (Bruxelles) sur «l'Afrique après le G20 de Pittsburgh et Londres: les nouveaux paramètres économiques». L'investissement direct européen est «le point faible» de l'accord d'association, bien que la dynamique des investissements ne réagisse pas à un cadre institutionnel, mais à des facteurs d'attractivité économique qui renvoient à la restructuration de l'industrie et des services. Les investissements UE sont peu importants et de petite taille en comparaison avec les investissements des pays arabes. Contrairement, l'objectif recherché par l'accord d'association avec l'Union européenne investit très peu en Algérie. Selon des sources proches de l'ANDI, sur les cinq dernières années, les investissements européens n'ont pas dépassé les 3 milliards de dollars. Pour sa part, l'UE (par la voix de Tomas Dupla Del Moral), directeur en charge du Proche-Orient et de la Méditerranée du Sud au sein de la direction des relations extérieure de l'UE, lors d'une conférence de presse, à la fin d'une visite de deux jours effectuée récemment en Algérie, estime que les investissements européens en Algérie ont été multipliés par cinq en trois ans. «Il y a eu une progression importante des investissements européens en Algérie. A la date de l'entrée en vigueur de l'accord d'association en 2005, ces investissements étaient de l'ordre de 234 millions d'euros. En 2008, ces investissements ont atteint 1,14 milliards d'euros. On peut considérer que ce n'est pas suffisant, mais il y a clairement une tendance à maintenir dans l'avenir», avait-t-il précisé. Il a indiqué qu'en 2005, ces investissements se concentraient à 70 % dans le secteur de l'énergie. «Aujourd'hui, ils sont à 70 % dans des secteurs hors-hydrocarbures. Les investissements ont augmenté dans le sens de la diversification», avait relevé le responsable européen. Selon lui, les décisions d'investissements sont du ressort du secteur privé. « Ce que nous pouvons faire, par contre, est de faciliter les conditions pour que l'opérateur économique soit attiré par le marché algérien», avait-t-il noté. Mais ce n'est pas seulement dans les investissements que l'Algérie a perdu au change. Chiffres à l'appui, le ministre soutiendra que sur le plan commercial, les données sur la période 2005-2009 indiquent qu'en valeurs absolues, les importations de marchandises sont en croissance continue et ont pratiquement doublé, alors que sur la période considérée, les exportations sont fluctuantes et constituées essentiellement de produits énergétiques». «Les exportations hors-hydrocarbures demeurent très marginales et sont souvent soumises à des obstacles non-tarifaires», a-t-il insisté. Pour rappel, le directeur général du commerce extérieur au ministère du Commerce, M. Chérif Zaâf, avait relevé, que l'évaluation initiale de la mise en œuvre de l'accord -fait ressortir- une balance commerciale hors-hydrocarbures «très déséquilibrée», en faveur de l'UE. «Pour 1 dollar exporté vers l'UE, l'Algérie importe pour 20 dollars », avait-il avancé. M. Chérif Zaâf avait ajouté que depuis 2005, première année de mise en œuvre de l'accord d'association, les importations algériennes auprès de l'UE ont augmenté de près de 80%, passant de 11,2 milliards de dollars à 20,8 milliards de dollars en 2008. Les opérateurs économiques estiment que la faiblesse du volume des exportations algériennes hors-hydrocarbures vers les pays de l'UE est due au fait qu'ils soient confrontés à «des contraintes liées à des conditions techniques et réglementaires d'accès au marché européen des plus restrictives». Le fait est que le marché européen, en dépit de clauses claires, reste fermé aux produits algériens, contrairement aux produits européens qui bénéficient d'un accès privilégié au marché algérien. C'est en quelque sorte à ce niveau que se situe l'agacement de l'Algérie. L'argentier du pays révèlera, à ce sujet, que ‘'le démantèlement tarifaire retenu dans l'accord d'association s'est traduit au plan du budget de l'Etat par un manque à gagner évalué à 2,2 milliards de dollars, ceci en contexte de forte sollicitation de la ressource publique pour la couverture financière du budget de l'Etat''. A la fin du processus de démantèlement tarifaire et l'entrée effective en zone de libre-échange entre l'UE et l'Algérie, en 2017, il se traduira par un manque à gagner estimé à près de 3,5 milliards de dollars. «En dernière instance, c'est moins de ressources fiscales, peu d'investissements, peu d'exportations hors-hydrocarbures, et une économie qui pourrait privilégier l'acte de commercer à celui de produire», a constaté le ministre des Finances, soulignant que, l'enjeu, pour l'Algérie, n'est pas dans la perte des ressources immédiates, mais dans l'instauration d'une dynamique d'investissement et de croissance, de mise à niveau et renforcement de la compétitivité». Le rendez-vous de cette année 2010, prévu par la clause de rendez-vous, devrait fournir l'occasion de renégocier l'ensemble des questions en suspens dans l'industrie, l'agriculture et les services. Et par là même, de faire avancer le dossier d'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce.