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Revalorisation du prix du Gaz tant attendu lors du GNL 16 et le FPEG : Entre les producteurs et consommateurs le torchon brûle
Publié dans Le Financier le 16 - 04 - 2010

Les enjeux économiques et stratégiques de la GNL 16 et de la réunion du FPEG sont importants. Tout le monde attend des débouchées sur quelque chose de concret, notamment sur la façon d'appréhender, avec efficacité, les prix du gaz qui ont chuté d'une façon vertigineuse (4 dollars par BTU (British Thermal Unit), ces derniers mois). En extrapolant et en théorie, l'indexation du prix du gaz sur le prix du kilowatt électrique sera discutable au GNL/16.
Pour le moment, il faut sa-voir que le prix du gaz est indexé sur celui du pétrole, avec un décalage. Il résulte qu'avec un prix du pétrole par exemple à 41 dollars le baril et un prix du gaz à 7 dollars le British Thermal Unit, l'écart entre les deux est de 12.4 dollars par tonne équivalent pétrole (Tep). Selon l'Office fédéral allemand des cartels, l'indexation du prix du gaz naturel sur le pétrole favorise le renchérissement des deux énergies et empêche l'apparition d'un marché libre du gaz, tel que souhaité par l'UE. Aujourd'hui, producteurs et clients remettent en question la nature des contrats de livraison à long terme. La durée des contrats à long terme sera discutée pour être substantiellement réduite, au maximum deux à quatre ans. Selon les experts, la partie ToP devrait correspondre aux besoins réels du client, et non plus à une quantité de référence fixée à l'avance. D'après l'expert algérien en énergie M. Merabet, «à mesure de la diminution des réserves pétrolières, le prix du pétrole continuera à augmenter normalement sans la complicité des Etats. Or, en ce qui concerne le gaz, les réserves sont nettement plus importantes et dureront bien plus longtemps. Par le biais de l'indexation des prix, la perspective d'une pénurie prochaine du pétrole a donc pour effet de pousser le prix du gaz naturel à la hausse, même si ce dernier est encore suffisamment abondant». C'est en fait pour réguler le marché mondial du gaz qu'on a créé des formules pour corréler le prix du gaz au produit le plus concurrentiel, pour rendre le gaz compétitif. Mais le plus saugrenu de l'histoire est que le gaz est moins cher que le pétrole à même équivalent énergétique. Dans les contrats de long terme, si chers à notre ministre Chakib Khelil, il s'agit de formules glissantes sur 6 mois : «on constate donc, d'une part, un amortissement de la volatilité du prix du baril de brut, car les formules se basent sur des moyennes et, d'autre part, un décalage temporel entre les prix du pétrole et du gaz», note notre expert. Les contrats de long terme sont encore « obligés » d'indexer le prix du gaz sur celui du pétrole, puisqu'il faut que le gaz soit plus compétitif qu'une énergie substituable. M.Merabet pronostique que le prix du gaz ne sera plus corrélé au prix du pétrole, mais au prix de l'électricité, du fait de l'usage final du gaz qui concerne de plus en plus la production d'électricité. «Le GNL sera de plus en plus corrélé aux prix de l'électricité et les contrats de long terme vont basculer. De toute façon, gaz, pétrole et électricité sont très corrélés en termes de prix : les sous-jacents restent les mêmes », explique l'expert algérien. Actuellement, la fixation des prix sur les deux marchés est très différente. Cependant, l'Agence Internationale de l'Energie a révélé qu'une convergence croissante des prix de gros du gaz et de l'électricité sur les marchés libéralisés. Idem pour l'essor historique des prix aux USA qui montre que même en l'absence d'indexation, les prix du pétrole et du gaz fluctuent de manière plus ou moins parallèle. En effet, le prix annuel moyen du gaz à la production aux USA (Wellhead Price) suit depuis longtemps avec un certain décalage celui du pétrole (First Purchaser's Price). Et le même constat est fait, à moyen terme, pour les cours du gaz et du pétrole sur le marché à terme de New York (NYMEX). Et puis cette indexation du gaz au pétrole est archaïque. Elle a été établie dans un autre contexte énergétique mondial. Quand le gaz naturel a été introduit en grandes quantités sur le marché européen à la fin des années 1960 et au début des années 1970, le mazout était le combustible le plus utilisé, en industrie comme dans les foyers. Les parties concernées ont installé ce principe d'indexation sur le prix du pétrole pour sauvegarder le gaz qui avait du mal à s'imposer devant le mazout. Ce dernier a presque totalement disparue mais le principe d'indexation perdure encore aujourd'hui.
Historique
Le gaz naturel servait surtout à se chauffer, jusqu'au milieu des années 1990. En effet, il a été utilisé en Europe avant tout comme combustible de chauffage et pour la production de chaleur industrielle. Il n'était pas du tout utilisé pour générer de l'électricité. Quelques années plus tard, c'est la fièvre du gaz. L'évolution de la part du gaz dans la génération de l'électricité est passée de 7% à 18%. Et tous les experts avancent qu'en Europe, l'électricité sera de plus en plus générée par le gaz, au détriment du charbon et de l'énergie nucléaire. Puis vint le GNL qui a tout chamboulé. En effet, l'avènement du marché du GNL transporté par bateaux connaît un développement sans précédent. A l'unanimité, les experts affirment que l'émergence d'un marché spot du GNL et sa croissance soutenue crée un potentiel croissant pour contrôler les prix. Ces derniers prévoient aussi que l'essor du marché du GNL créera la concurrence gaz-gaz. Autrement dit, le prix du gaz se basera de plus en plus sur ses propres fondamentaux. En outre, L'arrivée de nouveaux acteurs sur le marché européen du gaz (pays du bassin caspien, pays du Golfe, Egypte, Angola, etc.) attisera également la concurrence et réduira la dépendance par rapport au réseau actuel d'alimentation, ce qui sapera peu à peu la relation avec le prix du
pétrole, relèvent-ils.
Une OPEP du gaz fait trembler l'Europe
Ce qui intrigue les pays industriels dans le FPEG, c'est son apparence d'une OPEP gazière. «D'ailleurs, plusieurs pays sont maintenant membres des deux organisations. Bien que le siège social du FPEG soit à Doha, la Russie, premier exportateur mondial de gaz naturel, pèsera très lourd dans la balance. Même si la chute vertigineuse des prix de l'énergie de ces derniers mois a sûrement accéléré le processus, le projet était dans les cartons du Kremlin depuis 2001», note Benoit Lapierre, Analyste politique spécialiste de la Russie. L'essor démographique des pays de l'UE, avec son extension vers les pays sous domination soviétique, pauvres en richesses et en infrastructures d'énergie, est le talon Achille de l'Europe. L'UE a peur du gaz plus cher, et de la nouvelle OPEP du gaz. La création du Forum du gaz (FPEG) a donné l'alerte à l'UE. Le but premier du FPEG de trouver une stratégie pour lever le principe d'indexation, le plus rapidement possible. Lors de ses réunions, le FPEG a voulu toujours trouver un consensus afin de stabiliser le marché sur la base d'un prix « juste », acceptable pour les producteurs et pour les consommateurs. La Russie avec son géant Gazprom qui veut être hégémonique sur le marché du gaz international est le 1er défenseur de la « désindexation ». Les Russes estiment que « les frais de prospection, de production et de transport de gaz augmentent », alors que les prix restent inchangés. L'Iran insiste, de son côté, pour que le FPEG fonctionne comme l'OPEP afin de fixer les quotas d'extraction du gaz, contribuant ainsi à la hausse des prix du combustible. Le Qatar, le nouveau venu sur le marché du gaz, le Qatar, a élaboré tous ses projets gaziers pour exporter le GNL en Europe. In fine, l'Algérie est dans une position médiane. « Elle préfère privilégier actuellement une bonne entente avec les pays consommateurs, avec un prix «juste» permettant d'amortir le capital avancé extrêmement lourd et avoir un profit raisonnable», selon l'expert Y.Merabet.
Ce qu'attendent les protagonistes des rendez-vous d'El Bahia ?
Pour le moment, la Russie préfère considérer le FPEG comme une structure s'occupant de projets communs et de la création, entre autres, de réseaux de transport du gaz. Mais comme le laisse entrevoir plusieurs indices, une décision historique pour stabiliser les prix du gaz est en gestation. Le challenge serait d'exhausser le prix du gaz de 4 à 14 dollars le MBTU (ndlr : le MBTU «million d'unités thermales britanniques» égal à 27,6 mètres cubes).
Pour Chakib Khelil, «Il faut diviser le prix du baril de pétrole, actuellement autour de 80 dollars, par six, cela donne 13-14 dollars par MBTU, ce qui est équitable. Le gaz est propre, il est très demandé pour la production d'énergie. Cela fait sens». Le prix pour livraison en avril s'échange actuellement autour de 4,40 dollars. Les géants nationaux, les sociétés de services (utilities), les « majors », les structures arbitrales…., entre autres, seront tous présents à Oran pour le GNL/16. Pour eux, c' est l'occasion tant attendue pour soulever la revalorisation du prix du GNL, en tenant compte du surcoût de la transformation et de la qualité raffinée du produit.
Le British Thermal Unit (Btu, BTU) est une unité d'énergie anglo-saxonne qui est définie par la quantité de chaleur nécessaire pour élever la température d'une livre anglaise d'eau d'un degré Fahrenheit. Cette unité de chaleur commune pour tous les combustibles est convertible en kilowatt.


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