Spectaculaire sur un an, la hausse des prix s'est encore accélérée au cours des mois: 100 dollars le 2 janvier, 105 dollars le 6 mars, 110 dollars le 13 mars. Depuis la semaine dernière, où les prix ont dépassé 126 dollars pour la première fois, l'emballement est vertigineux et les records tombent dru tous les jours. Pour le président de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), M. Chakib Khelil, “ le marché ne voit pas où tout cela va s'arrêter. Invité lundi sur le plateau du journal télévisé de la chaîne “Canal Algérie”, le président de l'Opep a indiqué que ce qui se passe actuellement refléte l'état d'ébullition du marché. Le regain de tensions géopolitiques entre l'Occident et l'Iran, les sabotages sur les installations nigérianes et la crise au Venezuela qui risque de s'amplifier, sont autant de facteurs qui enflamment le marché. Du côté des producteurs hors Opep, le tableau n'est pas plus réjouissant. Confrontés à l'épuisement de nombreux gisement, de nombreux producteurs peinent à maintenir leur rythme de production. M. Khelil a cité, à ce titre, la perte de production au Mexique et en Russie. Par ailleurs la récession et la faiblesse du dollar sont, selon lui, les éléments déterminant de l'orientation du marché pétrolier. Il a insisté, à cet égard, sur la relation direct qui existe entre le dollar et le baril de pétrole. 1% de variation sur la valeur du dollar représente un réajustement de 4 dollars sur le prix du baril, a-t-il encore précisé. Cette situation a poussé les spéculateurs à s'engager dans le marché pétrolier pour se couvrir contre l'inflation en période de baisse du dollar. Depuis plusieurs mois, l'Opep assure que le marché est suffisamment approvisionné et invoque la responsabilité des investisseurs pour lesquels le pétrole est une valeur sûre. Ce point de vue n'est pas partagé par les consommateurs, notamment les Etats-Unis. D'ailleurs, Le président George W. Bush devrait demander à nouveau cette semaine à l'allié saoudien d'agir pour contenir la flambée des prix du pétrole. Mais les experts sont tout sauf sûrs que M. Bush convaincra le roi Abdallah, souverain de la première puissance pétrolière mondiale, d'intervenir pour que l'Opep augmente sa production. Certains doutent même qu'il essaiera vraiment. En effet, si la question était: est-ce que l'Opep ferait quelque chose si elle pouvait faire baisser les prix, la réponse serait oui. Mais la vraie question, c'est: est-ce qu'elle est capable de le faire dans cet environnement, et la réponse semble moins évidente. Malgré la légère baisse enregistrée hier, la tendance ne semble pas s'orienter vers l'apaisement des cours. Lundi, le marché semblait se tourner avec inquiétude vers le Liban, où des combats avaient repris à Tripoli après une semaine de violences entre factions armées. “Bien que le pays ne produise pas de pétrole, les tensions au Liban s'ajoutent à l'instabilité générale de la région”, commentaient les analystes du cabinet John Hall. Avec le calendrier, un dernier piment pourrait encore faire grimper les prix : la “driving season” (saison des grands déplacements automobile aux Etats-Unis) approche, réclamant de vastes quantités d'essence.