Au regard de la conjoncture internationale parfois défavorable et touchant presque la quasi-totalité des pays sous-développés, le débat est engagé à grande échelle sur la question de la "défense économique" et par conséquent l'implication de la "sécurité alimentaire". La crise alimentaire secoue plus de 80 pays à travers le monde. L'Algérie pourrait ne pas être à l'abri de cette crie, étant importatrice de plus de 90 % de produits alimentaires pour une facture de plus de 5 milliards de dollars. L'Algérie a été déjà secouée par la crise des céréales et du lait conséquence de la hausse de ces deux produits sur le marché international. Cette situation s'est manifestée dès le départ par une flambée des prix et à la fois par une diminution des stocks et des émeutes de la faim dans un certain nombre de pays, estime M. Hamid Aït Amara, universitaire, spécialiste des questions d'économie agricole. Il souligne quelques réactions dans un certain nombre de pays qui ont interdit l'exportation des surplus qu'ils avaient pour garantir l'approvisionnement de leur marché domestique. "En cas de crise, les pays qui produisent vont d'abord réserver leur production à la consommation économique". Il explique qu'il y a, d'abord, une priorité qui est affectée à l'alimentation des populations concernées. "L'Etat a un devoir d'assurer l'alimentation de sa population ", a-t-il déclaré. Concernant l'Algérie qui pourrait être touchée par cette crise, M. Hamid Aït Amara s'interroge d'abord s'il y aura des excédents sur le marché. "Est-ce que ceux qui ont produit jusque-là des excédents vont continuer à produire ces excédents. Une première question qui s'adresse à l'offre et qu'il faut examiner. Il y aura bientôt plus de 9 milliards d'habitants en 2050, est-ce que l'offre va suivre la demande mondiale et jusqu'à présent. Avec cette flambée des prix, la réduction des stocks, tout le monde s'est aperçu qu'il y avait danger". Il ajoute que pour nous "c'est le pétrole contre la nourriture. Nous vendons le pétrole et le gaz pour acheter à manger". Il rappelle que la facture d'importation de produits alimentaires, qui était de 5 milliards en 2007, passera probablement, en 2008 à 8 et 9 milliards de dollars. "On prévoit que les prix vont rester assez élevés d'ici une dizaine d'années. Ce qui explique que si on projette nos dépenses d'importation sur 2015 avec le taux démographique, les consommations constantes par tête à ration égale et avec les prix de 2008 on va arriver à 16 milliards de dollars. Il faut trouver cette somme. Tant qu'on a du pétrole et du gaz on a de l'argent, le jour on en aura plus, financerons nous nos importations.", rappelle M. Aït Amara. Et d'ajouter que "dès les années 1950, les exportations de l'Algérie ne couvraient pas ses importations, la balance agricole était déficitaire". Pour remédier à cette crise, ce spécialiste pense qu'il faut reconstruire une politique agricole nationale. Une déclaration, dit-il, faite ces derniers jours à Rome par le ministre de l'Agriculture et du Développement rural. "Il va falloir investir beaucoup d'argent dans la restauration des conditions de la production (fertilité, protection des sols soumis à l'érosion, régénérer les végétations, capter l'eau, cultiver ce qui ne l'est pas)", a-t-il déclaré. Il estime que trois millions d'hectares de terres agricoles sont restées en jachère en Algérie. Evoquant l'adhésion de l'Algérie à l'OMC, M. Aït Amara estime que "l'OMC est une machine au service des plus forts contre les plus faibles. Si on ne comprend pas cela on n'a rien compris à l'économie mondiale. Comment voulez-vous mettre en concurrence des économies qui sont à des développements tout à fait différents. Or, l'idée de l'OMC, c'est un marché unique sur lequel l'offre et la demande compétitive vont régler la satisfaction de tous aux meilleurs prix. Il y a des pays gagnants et des pays perdants. Nous, sommes dans la catégorie des pays perdants parce qu'on n'a pas les capacités aujourd'hui de construire une économie compétitive dans les normes qui sont les normes de rentabilité du capital au niveau mondial". A son avis, il faut aujourd'hui pour l'Algérie de "négocier d'autres règles du commerce international. Nous avons besoin de changer et il n'y a aucune raison de se mettre dans un système où les règles nous sont défavorables".