Conséquence directe du conflit entre la Géorgie et la Russie, le Premier ministre canadien, Stephen Harper, a déclaré mardi qu'il avait l'intention de revoir tous les aspects de la coopération entre le Canada et la Russie, y compris les aspects économiques. De l'avis unanime des experts, la déclaration de Stephen Harper n'est pas inspirée par des motifs économiques, et se fonde sur des considérations purement politiques. Le Canada est le principal partenaire économique, commercial et politique des Etats-Unis, c'est pourquoi, compte tenu des critiques acerbes adressées par Washington à Moscou, Ottawa ne pouvait que s'aligner sur les positions de l'administration américain. Cette option du gouvernement canadien de revoir les aspects de la coopération économique entre les deux pays portera un coup à la persévérance du géant russe du gaz, Gazprom, qui essaie depuis 2005 de prendre pied sur le marché nord américain. Cela impliquera notamment la remise en cause de l'accord conclu en mai dernier pour l'approvisionnement par Gazprom du futur terminal de Rabaska. Une entente préalable pour la livraison en gaz naturel liquifié (GNL) à hauteur de 100% des capacités du futur port méthanier a été signée entre Gazprom et le consortium à la tête de Rabaska, à savoir les sociétés canadiennes Gaz métro et Enbridge ainsi que le français Gaz de France. Le déficit de capacités de regazéification aux Etats-Unis ne permettait pas jusque-là à Gazprom d'accroître l'importation de GNL. Dans ce contexte, le terminal canadien pourrait être une sorte de billet d'entrée sur le marché américain. En outre, les terminaux canadiens sont une solution idéale du point de vue de l'optimisation de l'itinéraire et de la durée du transport du gaz liquéfié. La rupture de ces ententes priverait Gazprom de l'espoir d'accéder prochainement au marché nord-américain. En effet, Gazprom envisageait de livrer des volumes importants de GNL justement sur le marché d'Amérique du Nord, c'est pourquoi ces déclarations constituent, dans l'ensemble, une tendance regrettable pour le holding, car elles peuvent entraver considérablement l'arrivée de la compagnie sur ce nouveau marché. Par ailleurs, toute remise en question d'un projet de ce genre compromettrait le débouché sur le continent américain que cherche à exploiter Gazprom dans le champ gazier marin de Chtokman en mer de Barents. Cette décision se répercutera négativement sur le développement de Gazprom sur le marché nord américain. Cependant, un tel scénario est peu probable. D'ailleurs, le porte-parole de Gaz Métro, Frédéric Krikorian, a fait savoir que le conflit Russie/Géorgie n'affecterait pas les objectifs fixés par l'entreprise au début des négociations du projet Rabaska. “Nous nous étions fixés comme objectif la fin de l'année pour la conclusion de nos contrats. Nous maintenons cet objectif”, a-t-il dit. M. Krikorian a ajouté qu'il ne souhaitait pas commenter les propos du Premier ministre canadien. “Nous sommes des hommes d'affaires et nous laissons aux politiciens les questions politiques”, conclut-il.