La secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, qui a entamé jeudi dernier une tournée qui l'a conduite à travers quatre pays maghrébins, a dû attendre la dernière étape de son périple pour se voir confrontée aux véritables problèmes qui perdure dans la région. Il s'agit, bien évidemment, de l'épineuse question de l'autodétermination du Sahara occidental. En effet, au moment où la femme forte du département d'Etat étasunien s'apprêtait à rallier la capitale du royaume marocain, après son étape d'Alger, le président sahraoui, Mohamed Abdelaziz, a sauté sur l'opportunité pour interpeller Rice sur l'indépendance de son pays et les violations des droits de l'homme dont continue de se rendre coupable l'armée royale dans les territoires occupés. «Comme vous le savez, soulignera le responsable du Polisario dans sa lettre, le Maroc a occupé illégalement le Sahara occidental, malgré les résolutions du Conseil de sécurité et l'avis de la Cour internationale de justice. Cet Avis affirmait clairement l'inexistence de liens de souveraineté entre le Sahara occidental et le Maroc et recommandait, à juste titre, l'application du droit à l'autodétermination. L'invasion militaire marocaine a précipité le Maghreb dans un cycle de déstabilisation et d'incertitudes. Elle est similaire, par sa nature, à l'invasion du Koweït par l'Irak et à celle du Timor-est par l'Indonésie. Le Front Polisario, qui résistait déjà contre le colonialisme espagnol, se devait de continuer sa résistance au nom du peuple sahraoui, au nom de la légalité internationale et au nom du droit. A dessein, M. Abdelaziz, à travers sa démarche, vise à interpeller la conscience de l'émissaire de l'administration Bush, et ce, en lui citant des cas d'invasion auxquels les Etats Unis se sont opposés, le Koweït et Timor. En effet, Mohamed Abdelaziz, autant que le peuple sahraoui entier, tout comme l'ensemble de l'opinion internationale trouvent intrigante la position des USA vis-à-vis de la lutte du peuple sahraoui pour son indépendance étant donné que la superpuissance a toujours tranché implicitement en faveur du colonisateur, le Maroc. Rice est également interpellée sur le fameux référendum sur l'autodétermination qui tarde à avoir lieu, bien qu'il soit prévu depuis les accords de cessez-le feu en 1991. Ceci au moment où le président sahraoui exhorte la secrétaire d'Etat américaine à se pencher plutôt sur les véritables problèmes qui ont toujours remis en cause les initiative de création d'un ensemble régional maghrébin solide et efficace, à l'image de la question du Sahara occidental, au lieu de se contenter du discours superficiel. «Alors que vous entreprenez une visite au Maghreb, y compris au Maroc, permettez-moi de vous dire que le problème majeur qui empêche encore la concrétisation d'un Maghreb uni n'est autre que cette annexion illégale, singulière dans notre région. Nous espérons que votre présence vous permettra d'intervenir auprès des responsables marocains pour les convaincre de revenir à la légalité internationale et laisser ainsi aux négociations actuelles la possibilité d'aboutir et de permettre l'organisation du référendum d'autodétermination du peuple sahraoui». En outre, il y a lieu de relever que, jusque-là, si ce n'est cette sortie fracassante de Mohamed Abdelaziz, tous les pronostics tablaient sur une visite sans grands enjeux stratégiques pour Condoleezza Rice, que ce soit à Tunis, à Alger ou à Rabat, à l'exception de la première étape de ce périple, à savoir Tripoli, qui revêtait un intérêt majeur pour les Américains autant que pour les Libyens.